Sans tarder le Conseil d'Etat genevois adoptait le 3 mars le règlement d'exécution relatif à cette interdiction de fumer. Devant un tel score, évidemment, il y avait urgence à décider qu'il serait applicable... le 1er juillet, juste après l'Euro 2008.
Le motif invoqué pour interdire de fumer dans les lieux publics était la santé tout aussi publique. Il était donc logique que, parmi les rares exceptions à cette interdiction il y ait les "chambres individuelles des hôpitaux, cliniques et autres lieux de soins"...
Ceux qui sont privés de liberté auront au moins une liberté que ceux du dehors n'auront pas. Il sera permis de fumer dans les "cellules des lieux de détention et d'internement". La direction générale de la santé publique, chargée de réprimer les contrevenants, n'étendra donc pas ses contrôles dans les prisons. Leurs clients n'auraient de toute façon pas été solvables, sinon corvéables à merci.
Car les contrevenants seront passibles d'une amende de 100 à 1000 francs et "l'exploitant ou le responsable d'un lieu qui ne fait pas respecter (l'interdiction) s'expose à une amende de 100 à 10000 francs". Ainsi en a décidé le gouvernement genevois. Le fumeur, comme l'automobiliste, peut bien cracher au bassinet des caisses publiques, dont, il est vrai, on ne connaît pas le fond.
Aussitôt les dissidents de Genève, en réponse à cette mesure liberticide, ont créé un site éponyme (ici), Internet étant encore, jusqu'à Dieu sait quand, un havre de liberté. Le 17 juin, sous leur label, ils se sont constitués en asssociation "pour défendre notamment "le respect des libertés" parmi lesquelles le droit de fumer sans gêner ou nuire à autrui".
Sont membres du Comité des "Dissidents de Genève" 15 personnalités genevoises dont un certain nombre d'avocats qui sont bien dans leur rôle de défense des libertés, ce que n'ont pas compris, ou voulu comprendre, un certain ordre d'avocats français que j'évoquais ici l'autre jour (Un conseil de l'ordre d'avocats se déshonore) .
Les "Dissidents de Genève", avant même de fonder leur association, avaient lancé "une pétition adressée au Conseil d'Etat demandant des "aménagements et exceptions" à l'interdiction de fumer dans les lieux publics à compter du 1er juillet". Cette pétition a déjà recueilli 3400 signatures parmi lesquelles celles de Me Marc Bonnant et Dominique Warluzel, ténors du barreau de Genève.
Je profite de l'occasion pour souligner que la notion de lieux publics me semble bien confuse dans les esprits. En effet par lieux publics on entend aussi bien des lieux réellement publics que des lieux privés. Un bistrot, un restaurant, une boîte de nuit sont ainsi des lieux privés. Certes ils sont fréquentés par du public, ils n'en demeurent pas moins des lieux privés.
Personne n'oblige personne à aller dans un bistrot, un restaurant, une boîte de nuit, enfumés ou non. Personne n'oblige personne à aller travailler dans un de ces établissements, enfumé ou non. C'est d'autant plus vrai que le chômage culmine vertigineusement en Suisse à un peu plus de 2 %, même si Genève oppose son exception culturelle à cette moyenne helvétique.
A mon sens l'interdiction de fumer dans des lieux privés, fréquentés par du public, viole le droit des propriétaires de ces lieux d'édicter leurs propres règles de bonne conduite que doivent respecter ceux qui les fréquentent. Au train où vont les choses il sera bientôt interdit de fumer dans la rue, lieu réellement public, pour lutter contre ...les gaz à effet de serre.
Francis Richard
PS
Je ne prêche pas pour mon poumon. Je suis non fumeur et pas autrement fier de l'être. Mais je suis choqué devant les atteintes faites aux libertés individuelles. Qu'elles soient consenties et approuvées par une majorité populaire n'y change rien.