La réponse est non.
Christoph Blocher, comme l'UDC, a toujours approuvé la libre circulation des personnes avec les 15 premiers pays de l'Union européenne. Cette libre circulation des personnes a fait l'objet d'un
accord, signé le 21 juin 1999, approuvé par le Parlement le 8 octobre 1999, et par le peuple le 21 mai 2000. Cet accord, l'ALCP ( ici ), prévoyait une période de transition depuis le 1er juin 2002 jusqu'au 31 mai 2007. Pendant cette période de 5 ans la libre
circulation des personnes était soumise à des conditions, notamment à des contingents et à la priorité donnée aux travailleurs suisses, une préférence nationale en quelque sorte. Ces limites ont
été abandonnées il y a seulement 18 mois. Cet accord conclu pour une période de 7 ans doit donc être maintenant renouvelé, avant son échéance le 31 mai 2009.
Christoph Blocher et l'UDC se sont opposés à la première extension de cet accord de libre circulation, à la suite de l'entrée dans l'Union européenne, le 1er janvier 2004, de dix
autres pays. Il s'agissait principalement de pays de l'est européen. CB et l'UDC estimaient entre autres que l'expérience du premier accord de libre circulation des personnes n'ayant pas été
menée à son terme, il était urgent d'en attendre les résultats. Cette première extension a toutefois été adoptée par le peuple le 25 septembre 2005 en dépit de l'opposition de l'UDC et de CB.
Cette première extension est entrée en vigueur le 1er avril 2006. « Jusqu'au 30 avril 2011, la Suisse peut toutefois maintenir certaines restrictions relatives au marché du
travail, tels les contingents séparés, la priorité des travailleurs indigènes et le contrôle des conditions de travail et de salaire » ( ici ).
Le 1er janvier 2007 deux autres pays ont rejoint l'Union européenne, la Bulgarie et la Roumanie. Il y a donc lieu d'entériner ou non cette deuxième extension. Dans l'article 2 de son
arrêté fédéral du 8 octobre 1999, d'approbation de la première libre circulation, le Parlement faisait la distinction entre reconduction et extension, et soumettait l'une et l'autre à l'adoption
d'arrêtés fédéraux distincts, sujets à référendum, et ne donnait pas de délai pour approuver une extension. Or le 12 juin 2008 le Parlement a décidé de fusionner les deux objets en un paquet
auquel il n'est possible de donner qu'une seule réponse ( ici ).
Face à cette manœuvre anti-démocratique - les représentants du peuple ne lui laissent qu'une parole ambigüe -, contraire à l'arrêté fédéral du 8 octobre 1999, et à toutes les promesses faites
depuis, la première réaction de l'UDC et de CB a été de lancer un référendum contre cette décision parlementaire. Réflexion faite, CB et l'UDC y ont vu un piège tendu par leurs adversaires, qui
les auraient tenus pour responsables de l'échec de la reconduction, et ils ont décidé non seulement de ne pas lancer de référendum, mais de ne pas le soutenir, et, s'il devait y avoir un
hypothétique référendum de prôner l'abstention.
Seulement, « malheureusement, le référendum a abouti et la question est désormais posée », comme le souligne Christoph Blocher ( ici ). Il s'agit d'une nouvelle situation ». Ce que ne dit pas Christoph Blocher, mais qu'il pourrait ajouter, c'est que ce référendum a
abouti grâce aux jeunes UDC, sans qui Les Démocrates Suisses et La Lega auraient bien eu du mal à recueillir les 50'000 signatures nécessaires, obtenues de justesse d'ailleurs.
La situation est également nouvelle de ce point de vue. Du coup l'UDC Suisse, et CB, ont décidé de faire campagne pour le non lors de la réunion des délégués du parti, le 29 novembre
dernier, par 432 voix contre 45 et 6 abstentions ( ici ).
En cas de victoire du non au paquet qu'il a mal ficelé, le Parlement serait obligé de revoir sa copie lors de la session de mars 2009. La démocratie directe et la démocratie tout court l'auraient
emporté. Le Parlement pourrait adopter la poursuite de la libre circulation initiale, qui ne ferait vraisemblablement pas l'objet d'un référendum. Les accords bilatéraux I ne seraient donc pas
remis en cause. Le Parlement pourrait rejeter ou non l'extension à la Bulgarie et à la Roumanie. En cas d'approbation un référendum serait à coup sûr lancé avec de fortes chances d'aboutir. Mais
il n'y aurait pas de « clause guillotine » qui vaille, que d'aucuns brandissent comme un épouvantail. Et la Suisse ne serait même pas hors délai.
Francis Richard
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