Le dernier livre de Guy Millière sur Israël va à l'essentiel et s'adresse aux Juifs du reste du monde et aux non
Juifs:
"En laissant planer la mort sur Israël, le monde occidental se condamne lui-même à survivre sous l'ombre de la mort."
Car, rappelle-t-il, l'Occident doit une part essentielle de ses valeurs au judaïsme et au peuple juif.
Ce livre retrace d'abord l'histoire du peuple juif, indissociable de celle de l'antisémitisme, depuis la diaspora jusqu'au projet sioniste au XIXe siècle.
Bien avant le premier Congrès sioniste mondial à Bâle en 1897, un mouvement était en marche:
"Des Juifs étaient revenus en terre d'Israël où ils avaient retrouvé des Juifs qui n'étaient jamais partis, et grâce à des mécènes divers et généreux, avaient racheté des parcelles à leurs propriétaires, effendi: à un très bon prix, et par des contrats volontaires. Ils n'avaient chassé personne et formé des collectivités imprégnées d'un socialisme utopique, kibboutz, ou créé des entreprises agricoles et embauché, contre un salaire, les populations arabes."
Les Britanniques, au cours des années 1910 ont fait des déclarations contradictoires. Il est important de le rappeler parce
qu'elles contiennent en germe les conflits futurs.
En 1915 le Haut-Commissaire britannique en Egypte, Henry McMahon fait des promesses au chérif de La Mecque, Husayn bin Ali, et à son fils, Faisal ibn al-Husayn. Forts de ces promesses ces derniers prennent la tête d'une révolte arabe en 1916, soutenue par les Britanniques.
Dans une lettre adressée en novembre 1917 à Lord Lionel Walter Rotschild, le ministre britannique des Affaires étrangères, Arthur James Balfour, dit que son gouvernement envisage favorablement l'établissement en Palestine d'un foyer national du peuple juif.
Ces contradictions n'empêchent pas la conclusion d'un accord, le 4 janvier 1919, entre Faisal ibn al-Husayn et Chaim
Weizmann, président de l'Organisation sioniste, valant approbation de la lettre de Lord Balfour. Faisal ibn al-Hussayn devient alors roi de Syrie.
A l'issue de la Grande Guerre, le Royaume-Uni se voit confier un territoire, le Mandat palestinien, pour favoriser l'établissement du foyer national juif, tandis que la France se voit confier un Mandat sur la Syrie: Faisal ibn al-Hussayn est chassé de Syrie et le royaume d'Irak lui est attribué à titre compensatoire.
80% du Mandat palestinien, qui constituent dès lors l'émirat de Transjordanie, sont attribués en avril 1921 par les Britanniques au frère de Faisal, Abdallah ibn al-Husayn. Sur les 20% restants, le Mandat résiduel, ils favorisent l'immigration arabe et restreigne l'immigration juive...
Sur le Mandat palestinien, les actes anti-juifs commencent dès 1920, et les Britanniques nomment, en 1921, mufti de
Jérusalem, l'un de leurs instigateurs, Muhammad Amin al-Husayni, nationaliste, adepte d'un islam véhément, qui s'avérera proche du national-socialisme, puisqu'il rendra visite à
Hitler de novembre 1941 à mai 1945... et approuvera la "solution finale".
Les Britanniques, contrairement au mandat qui leur a été confié, tolèrent sur le territoire du Mandat résiduel des discours anti-juifs, ce qui accrédite, chez les Arabes, qu'ils les acceptent...
De part et d'autre des crimes sont commis. La situation devient de plus en plus explosive.
En mars 1946, les Britanniques transmettent le dossier du Mandat résiduel aux Nations-Unies. Le 29 novembre 1947, les Nations-Unies adoptent un plan de partage du Mandat résiduel, que les Arabes n'acceptent pas. Sur les terres accordées aux Juifs, l'indépendance d'Israël est proclamée le 14 mai 1948, au lendemain du départ des troupes britanniques.
Les pays arabes voisins attaquent alors le nouvel Etat, qui n'est soutenu par aucun pays. Mais, à la surprise générale, Israël gagne cette guerre...
Jusqu'en 1973, il y a tout juste 40 ans, il n'existe pas de peuple palestinien, mais des Arabes palestiniens, fragment du peuple arabe. Lors du sommet de la Ligue arabe réuni à Alger du 26 au 28 novembre 1973, les pays arabes vaincus changent de stratégie:
"L'OLP s'est trouvée redéfinie comme un mouvement menant une "lutte de libération nationale".
La notion de "peuple palestinien", que l'OLP avait commencé à introduire dans son vocabulaire peu de temps auparavant, fut officialisée.
La "Palestine" à libérer fut redéfinie comme terre du "peuple palestinien"."
Désormais le monde arabe ne cherchait plus à détruire et à exterminer, il ne s'acharnait plus contre un pays. Il soutenait un peuple opprimé, en lutte pour se libérer:
"Le fait que la notion de nation "palestinienne" vienne d'être forgée n'importait pas. Le fait que les "réfugiés" censés devenir membres du "peuple palestinien" aient, pour la plupart, ignoré jusque là qu'ils faisaient partie du "peuple palestinien" et aient été, pour l'immense majorité d'entre eux, des immigrants de fraîche date sur le territoire de la "Palestine" à libérer et aient eu tout juste le temps de s'y installer avant de partir et de se retrouver dans un camp de réfugés n'importait pas davantage."
Le 26 mars 1979, Israël signe un traité de paix avec l'Egypte et fait une concession, que ses dirigeants de l'époque croient mineure, mais qui sera lourde de conséquences:
"Israël signa un texte où figuraient les mots "droits" du "peuple palestinien", et "autonomie pour le peuple palestinien". Les lieux de l'autonomie étaient désignés: Gaza et la "Cisjordanie"."
Israël acceptait implicitement de se trouver dans la position de l'"oppresseur" face à l'"opprimé"...
Les rôles étaient redistribués et Israël jouait le mauvais. Israël s'était mis en tort...
En 1949 il y avait 650'000 réfugiés. Ils sont devenus 5 millions. Mais ils n'ont jamais été intégrés par les pays arabes qui avaient déclenché la guerre contre Israël:
"Nulle part ailleurs sur terre, des gens étaient encore considérés comme "réfugiés" au bout de trois ou quatre générations."
Les réfugiés? Des atouts maîtres dans les mains des dirigeants de l'Autorité palestinienne:
"Si on leur parle des "souffrances" des "réfugiés" et du "peuple", ils laissent parler ceux qui parlent, mais ne font rien pour alléger les "souffrances" en question, bien au contraire, et continuent à injecter dans le crâne des "réfugiés" constituant le "peuple" les idées monstrueuses qui en feront des assassins ou des bombes humaines."
Le livre de Guy Millière est très dense. Aussi n'ai-je développé que quelques points importants de ce livre - la genèse de l'Etat d'Israël, l'invention du "peuple palestinien", les "réfugiés" -, qui montrent combien la présentation des faits relatifs à Israël est fallacieuse:
"Aujourd'hui, Israël est délégitimé, diabolisé, placé dans la position du pays qu'il semble normal de haïr ou de mépriser."
Ses ennemis ont bien joué:
"Nul ne coud plus d'étoile sur les vêtements des Juifs où que ce soit sur terre, non.
Mais une étoile jaune plus immense s'est dessinée qui vient surplomber un pays et un peuple, et par effet induit, elle pèse sur tous les Juifs qui restent Juifs, partout sur terre."
Mais que ses ennemis ne se réjouissent pas trop. Car, ce qui a permis au peuple juif de survivre, malgré les épreuves, c'est "l'esprit de résistance".
Les dirigeants d'Israël "discernent que le court terme est le moment de tous les dangers et qu'il leur faut passer le cap du court terme":
"Ils n'ignorent pas que le monde se recompose, que d'autres puissances montent sur l'horizon, et que ces puissances n'ont guère été touchées par la haine des Juifs, ne sont ni chrétiennes ni musulmanes, et ont des rapports plus distants, plus froids, plus dépassionnés avec le monde arabe. Et ils n'ignorent pas que ces puissances peuvent nouer des relations basées sur les intérêts mutuels et le long terme. Elles se situent en Asie, surtout: Inde, Chine, Japon, Corée du Sud, Singapour."
Dans le court terme, la voix des Juifs du reste du monde et des non Juifs "doit s'élever [...] et clamer qu'il s'agit d'Israël, mais qu'il s'agit aussi d'infiniment plus", qu'il existe une ligne de fracture et de séparation entre civilisation et barbarie, entre démocratie et totalitarisme, entre amour de l'accomplissement et ressentiment criminel.
Francis Richard
L'Etat à l'étoile jaune, Guy Millière, 186 pages, Tatamis
Sur Dailymotion Guy Millière répond à des questions sur son livre: