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19 août 2009 3 19 /08 /août /2009 22:30
L'accord extra-judiciaire - reproduit (ici ) par Le Temps de ce jour - entre les Etats-Unis et la Suisse sur le dossier qui oppose le fisc américain  à UBS a donc été signé aujourd'hui, à 9 heures 30 de Miami, et à 15 heures 30 de Berne.

A lire cet accord, qui fait référence à l'article 26 de la Convention de double imposition du 2 octobre 1996 et à l'Accord d'interprétation de cette convention en date du 23 janvier 2003, il n'y aurait rien de nouveau : le droit suisse serait respecté, les Américains auraient les noms des coupables, tout serait bien qui finirait bien.

La Convention de double imposition de 1996 conclue par la Suisse avec les Etats-Unis, plus favorable que celles conclues avec d'autres pays, aurait son origine dans le fait qu'en droit fiscal américain l'imposition est fondée sur la nationalité et pas seulement sur la résidence.

L'Accord d'interprétation du 23 janvier 2003 de cette Convention n'est pas facile d'accès. Le n°39 d'Etudes et Enquêtes du Centre Patronal, consacré au Secret bancaire et à la place financière suisses, est obligé de reconnaître (voir mes articles Une étude du Centre patronal - 1ère partie : le secret bancaire suisse  et Une étude du Centre patronal - 2e partie : la place financière suisse ) que :

Il faut déployer des talents dignes de Sherlock Holmes pour trouver le texte de ce fameux accord d'interprétation : il ne se trouve pas dans le recueil des traités internationaux. Bien caché, il doit être recherché dans les archives du site Internet de l'administration fédérale.

Il n'empêche que les fameux critères qui se trouvent dans cet accord doivent être les mêmes que ceux qui  figurent dans l'annexe à l'accord d'aujourd'hui - qui ne sera pourtant rendue publique que dans 90 jours - si le droit suisse est bien respecté comme les cosignataires le prétendent. La revue du Centre Patronal explique qu'il y a trois cas de figure prévus :

Premièrement, la fraude qui ne serait pas réalisée dans un but de fraude fiscale ; deuxièmement, la destruction de livres comptables, leur non-production et leur absence de tenue; troisièmement, le fait de ne pas remplir une déclaration d'impôt, couplé avec un comportement qui rend difficile, pour l'autorité fiscale, la découverte de certains éléments non déclarés. Quatorze cas concrets illustrent les trois cas de figure mentionnés plus haut.

Ce que ne dit pas le Centre Patronal c'est si la demande d'entraide judiciaire prévue dans ces trois cas doit être nominative ou si elle peut se contenter d'exiger d'une banque suisse qu'elle passe ses clients américains au crible de ces critères et qu'elle en livre, après cette opération, les noms en pâture. 

Il semble bien qu'une telle demande devait être nominative. Sinon pourquoi tant de palabres - et tant de suspense - pour en arriver à l'accord d'aujourd'hui  ? Il aurait suffi d'appliquer la Convention de double imposition de 1996 à la lumière de l'Accord d'interprétation de 2003...

Il semble bien que la concession qu'ait faite la Suisse aux Etats-Unis soit donc bien de donner des noms spontanément, en respectant cette fois la procédure qui prévoit un recours de la part des nominés, au contraire de ce qui a été pratiqué en début d'année. Mais cette concession est de taille et c'est un fâcheux précédent... On n'imagine pas en effet que l'absence d'amende et la renonciation à un procès aient été obtenues sans concession... 

UBS aurait détecté environ 4'450 comptes suspects de tomber sous le coup des critères de la Convention de 1996. C'est ce nombre important qui, comme un os à ronger, aurait calmé l'appétit du fisc américain qui estimait, quant à lui, à 52'000 le nombre de comptes qu'UBS aurait dû lui livrer, sans d'ailleurs justifier comment il arrivait à un tel chiffre.

Les premiers 500 comptes devraient être livrés sous 90 jours, le reste sous 360. C'est à ces conditions que l'accord d'aujourd'hui ne serait pas remis en cause. Il ne serait définitif que dans 370 jours.

Et s'il s'avère entre-temps que le nombre est moins élevé - par exemple si un grand nombre de recours aboutissent ? L'accord ne prévoit un nombre moins élevé qu'en tenant compte des titulaires de compte qui se seront rendus au fisc américain d'ici le 23 septembre prochain. D'autres mesures pourraient être envisagées :

Si, 370 jours après la signature de cet accord, les résultats diffèrent significativement de ce qui peut en être raisonnablement attendu.

Autant dire que l'année à venir sera longue et courte à la fois ... et que la Suisse et UBS ne sont pas vraiment au bout de leurs peines.

Francis Richard

Interrogé dans le cadre de l'émission Forum, du 20 août 2009, entre 18 et 19 heures, sur La Première, Philipp Fischer, avocat d'affaires, confirme mon analyse :

Il est important de constater que dans la conception traditionnelle de l'entraide en matière fiscale il appartenait à l'autorité requérante, donc ici à l'autorité américaine, de nommer les titulaires des comptes concernés, au sujet desquels les informations étaient requises de la part des établissements bancaires suisses. L'accord change de manière radicale cette approche dans la mesure où il n'appartient plus à l'autorité requérante d'identifier les clients mais à la banque concernée, donc ici à l'UBS, d'identifier ces comptes sur la base de ces fameux critères qui ne sont pas encore connus à l'heure actuelle, et, une fois que ces clients, qui ne sont pas connus de l'autorité américaine ont été identifiés, l'autorité fiscale suisse rend une décision de communiquer les noms aux autorités américaines. Là il y a un changement de rôle pour l'identification des comptes concernés qui est très important et qui permet de dire qu'on a affaire à un changement de paradigme. 

L'internaute peut écouter sur le site de Radio Silence ( ici ) mon émission sur le même thème.
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  • : Ce blog se veut catholique, national et libéral. Catholique, il ne s'attaque pas aux autres religions, mais défend la mienne. National, il défend les singularités bienfaisantes de mon pays d'origine, la France, et celles de mon pays d'adoption, la Suisse, et celles des autres pays. Libéral, il souligne qu'il n'est pas possible d'être un homme (ou une femme) digne de ce nom en dehors de l'exercice de libertés.
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  • Francis Richard
  • De formation scientifique (EPFL), économique et financière (Paris IX Dauphine), j'ai travaillé dans l'industrie, le conseil aux entreprises et les ressources humaines, et m'intéresse aux arts et lettres.
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