Cruel est le mot-clé, et le titre, du roman noir de Nicolas Verdan. Les deux premiers chapitres, qui se passent en 1990, le troisième, en 1997, doivent être lus comme des signes avant-coureurs et explicatifs de ce petit mot.
Dans le premier et le deuxième chapitre, il est question d'un enfant qui a été kidnappé et à qui l'un de ses ravisseurs, Paul, pour le faire taire, lui dit que sa maman l'a abandonné et lui donne le conseil d'ami: tu peux l'oublier.
Dans le troisième, le dialogue est plus énigmatique, mais là encore il s'agit d'une personne à qui l'on dit que sa maman a fait quelque chose d'inacceptable pour elle et qui ne lui aurait pas été dit si elle ne l'avait pas demandé.
Les faits relatés ces années-là préfigurent les événements qui se déroulent, de nos jours, du mercredi 14 novembre au jeudi 29 novembre. Une petite recherche dans le calendrier indique que nos jours se situeraient en 2018...
Le 14, un détenu sort de la prison de Bochuz; une vieille dame, Gisèle Armand, est tuée à Gollion; Stefan, fils de Vesna Meyer, la directrice de l'Hôpital Vaud-Valais, est enlevé pendant sa leçon d'équitation avec une activiste.
Vesna Meyer est candidate des Verts Libéraux au Conseil fédéral. Sa pire ennemie, cheffe de l'UDC Suisse, Regula Wyss, est, ce qu'elle ignore, la maîtresse de Patrick, son mari, qui est entrepreneur dans les énergies vertes.
Yên Pham, qui travaille à Helvetic News, a obtenu un entretien avec Vesna Meyer. Elle veut la confondre pour sa gestion calamiteuse de l'hôpital intercantonal quand, appelée sur son portable, celle-ci abrège et s'en va.
Le même jour l'inspecteur Flynn Gardiol est pris d'un fou rire inexplicable sur la scène du crime perpétré contre Gisèle Armand... Il n'y a pourtant pas de quoi rire. L'explication de son comportement ne vient que plus tard.
Un enlèvement, un meurtre, c'est un bon début pour un polar au décor familier, et bien décrit, celui du canton de Vaud. On apprend alors qu'un troisième meurtre est commis à Aigle, qu'un autre les a tous précédés à Genève.
Il y a un lien entre les trois meurtres: c'est le même mode opératoire, et il est particulièrement cruel pour les victimes. Reste à savoir qui et pourquoi. Le pourquoi est connu en premier et le terme cruel y prend tout son sens:
Cette cruauté dont il a subi l'outrage, il l'incarne désormais. L'avoir vécue ne fait pas forcément de vous un être cruel. En revanche, le fait qu'on vous la dénie vous transforme en son messager.
Une fois connu qui a subi l'outrage, reste à l'identifier. C'est la loi du genre, il faut attendre la fin pour le savoir. Quant à l'épilogue il se rapproche d'aujourd'hui dans le temps, car il se situe le 7 décembre de l'année suivante...
Francis Richard
Cruel, Nicolas Verdan, 456 pages, BSN Press - OKAMA
Livre précédent chez Bernard Campiche Éditeur:
Le mur grec 2015)
Livre précédent chez BSN Press:
La coach (2018)