Pour ceux qui croient en Dieu, la messe en latin est à la messe du Long fleuve tranquille celle que semble affectionner le pape François, ce qu'est la basilique romaine contemporaine de Saint Augustin à une salle polyvalente dans une barre d'immeubles à Aubervilliers: on y chercherait en vain le sacré et la transcendance.
Ainsi parlait Michel Onfray, dans Le Figaro du 19 juillet 2021.
Pour que le lecteur apprécie la comparaison, voici un extrait de ladite messe du Long fleuve tranquille:
Et un extrait de la messe en latin du Lundi de Pentecôte 2011 à la cathédrale Notre Dame de Chartres:
Bien qu'il soit athée, l'écrivain et philosophe réagissait dans son article, intitulé Ite missa est, à la publication trois jours plus tôt du Motu Proprio du pape François, intitulé Traditionis Custodes.
Il écrivait notamment: Le christianisme a façonné une civilisation qui est la mienne et dont j'estime que je peux l'aimer et la défendre sans battre ma coulpe, sans avoir à demander pardon pour ses fautes, sans attendre une rédemption après confession, contrition et agenouillement.
Il ajoutait plus loin: La messe en latin est le patrimoine du temps généalogique de notre civilisation. Elle hérite historiquement et spirituellement d'un long lignage sacré de rituels, de célébrations, de prières...
C'est cet héritage que le pape François veut remettre en cause par son Motu Proprio en déconstruisant celui de son prédécesseur, Benoît XVI - toujours vivant -, intitulé Summorum Pontificum, du 7 juillet 2007.
Il est intéressant de comparer l'un et l'autre texte pour tenter de comprendre ce qui anime l'un et l'autre pontife. Deux exemples, significatifs, suffiront:
- Quand Benoît XVI dit qu'il existe deux mises en oeuvre de l'unique rite romain: l'expression ordinaire du missel romain promulgué par Paul VI et l'expression extraordinaire de celui promulgué par Pie V, François répond aujourd'hui qu'il n'en existe qu'un, le premier.
- Quand Benoît XVI dit qu'un prêtre n'a besoin d'aucune autorisation pour célébrer dans l'une ou l'autre expression, François répond:
. qu'un prêtre ordonné après la publication de son Motu Proprio doit désormais demander l'autorisation de dire la messe selon l'expression extraordinaire à son évêque qui ne pourra la lui accorder qu'après avoir consulté le Saint-Siège;
- qu'un prêtre qui célèbre déjà la messe selon l'expression extraordinaire devra demander à son évêque l'autorisation de continuer à le faire.
Benoît XVI, en Gardien de la Tradition, comme doivent l'être tous les évêques, successeurs des apôtres, appliquait le principe selon lequel la lex orandi de l'Église correspond à la lex credendi.
Aussi avait-il, à la suite de Jean-Paul II, considéré, avec sollicitude, qu'il fallait faire droit à l'attachement d'un nombre non négligeable de fidèles aux formes liturgiques antérieures à Vatican II.
Le pape François n'a pas cette sollicitude. Il n'a pas confiance dans ces fidèles qu'il ne comprend pas et qu'il qualifie de groupes, pour les minimiser. Il demande donc aux évêques diocésains:
- de s'assurer que des groupes célébrant la liturgie antérieure à Vatican II n'excluent pas la validité et la légitimité de la réforme liturgique, des préceptes de Vatican II et du Magistère des Souverains Pontifes;
- d'indiquer un ou des lieux où ces groupes pourront se réunir, à l'exception des églises paroissiales, avec l'interdiction d'ériger de nouvelles paroisses;
- de fixer les dates auxquelles ces groupes pourront célébrer;
- de nommer un prêtre chargé des célébrations et de la pastorale de ces groupes;
- de vérifier que les paroisses existantes de ces groupes soient utiles;
- de veiller à ce que de nouveaux groupes ne se constituent pas.
Qu'est-ce que cela signifie? Clairement que le pape François veut la disparition du rite catholique dans son expression extraordinaire, et, avec lui, des fidèles qui y observent la lex credendi.
En se livrant à cette rupture de la paix liturgique, le pape François est-il bien Gardien de la Tradition? N'est-il pas plutôt un fauteur de division que d'unité, contrairement à ce qu'est sa mission de chef de l'Église?
Michel Onfray, lui, se demande pourquoi nous vivons avec deux papes...
Francis Richard
En la fête de Saint Jacques le Majeur.