Il y a un peu plus de trente ans maintenant, à la date de son anniversaire, j'écrivais un poème que je dédiais au Chanoine Joseph Porta, Chapelain de Notre Dame des Armées à Versailles, pour ses noces d'or sacerdotales en la fête de Saint Joseph, le 19 mars 1994.
Jeune prêtre de Constantine, en Algérie, il avait participé au débarquement en Provence et reçu près de cinquante ans plus tard, le 6 juin 1993, la Croix de Chevalier de la Légion d'Honneur, pour sa bravoure, des mains du maire de Versailles, André Damien.
Ce poème, le voici:
Soldat de Dieu
L'Armée allemande sur notre sol campée,
Il faut lui résister, ne pas perdre espérance,
Car l'Armée d'Afrique poursuit la délivrance
Et nous vient par le Sud de la France occupée.
Un prêtre d'Algérie prend part à l'équipée,
Et tout confiant, Seigneur, en votre Providence,
Se retrouve un beau jour, et bien en évidence,
Avec une chapelle au côté de l'épée.
C'est dans cet appareil qu'il débarque en Provence
Et dans la mer d'azur prend un bain de jouvence.
Sur la côte escarpée, fortement découpée,
Quelques jours suffisent à forger l'épopée.
L'armada des Alliés l'emporte avec aisance
Sur l'armée des Teutons réduits à l'impuissance.
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L'abbé peut-il songer, en faisant son devoir,
Que l'ingrate Patrie, par trahison mentale,
Lâchera sans remords sa province natale,
Qu'il lui faudra quitter pour ne jamais revoir.
Les tabors, les goumiers, pour l'instant on peut voir
Combattre avec ardeur l'ennemi qui détale
Et semble avoir perdu sa superbe brutale
Depuis qu'est ébranlé son ténébreux pouvoir.
Vous nous laissez, Seigneur, quelquefois entrevoir
La mort comme une fleur aux bien rouges pétales,
La tombe comme un lit sur lequel on s'étale,
Pour mieux nous rendre vie, quitte à nous décevoir.
Votre clerc dans le Rhin, près d'une issue fatale,
Par la barbe repris, dans la durée s'installe.
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Il retourne au pays accomplir sa mission,
Qui, après tant d'éclats, pourrait paraître obscure,
S'il ne devait aller bientôt de cure en cure,
Pour semer le bon grain des grandes admissions.
"Allez, va" et il va, telle est sa soumission.
Des embûches dressées par Satan il n'a cure.
Son apostolat n'est pas une sinécure.
Il sait pour Vous, Seigneur, lutter sans rémission
Et de votre demeure il fait les finitions.
Les abords délaissés d'une église il récure
Ou bâtit un clocher, qui est droit sans arcure,
Plus haut que la mosquée, pour votre tradition.
Mais sa prédication des ennuis lui procure
Et les balles d'acier ne font pas de piqûres.
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Il connaît encore quelques tribulations,
Quand l'Évêque de fer l'envoie chez les Helvètes.
Les mécréants très vite ont la mine défaite
Et ses succès, pour eux, sont des désolations.
Il est donc expulsé après leur délation.
À l'âge où pour d'autres résonne la retraite,
Pour de jeunes ouailles maintenant il s'inquiète.
Au fil des ans leur nombre est sa consolation
Et les fruits d'un bel arbre ont pour nom vocations.
Avec son franc-parler contre tous il tient tête,
Le Seigneur le soutient et sa conscience est nette.
Ô Dame des Armées, sous votre invocation,
Nos âmes désarmées formulent la requête,
Que leur cher chapelain son vrai départ remette.
Francis Richard
Chatou, le 14 mars 1994
N.B. La photo du Chanoine Porta provient de l'Album souvenirs 1878-1995 de Notre-Dame des Armées Versailles, tiré à 800 exemplaires en juin 1995.