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20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 14:15
"Le poids des corps" d'Olivier Sillig

Le titre du roman d'Olivier Sillig, Le poids des corps, pour le mécanicien de formation, ne peut que faire penser à Isaac Newton et à sa loi sur la gravitation, la gravitation étant la principale composante de la pesanteur.

 

Dans le livre, l'expression du titre est toutefois employée non seulement au sens propre, mais aussi au figuré.

 

Jean Basler, ancien professeur de latin sans emploi, peut-être au bénéfice d'une rente AI, l'assurance invalidité, est "gros, gonflé". Un dimanche matin, dans sa petite salle de bain, il se regarde nu dans le "grand miroir laissé par la précédente locataire":

 

"Avec les médicaments, il avait pris quinze kilos. Le médecin l'avait prévenu. Le poids, il l'avait surtout pris dans le haut du corps. Les jambes n'avaient guère changé, pas grossi. Mais le ventre, beaucoup, débordant sur les côtés, et devant, plusieurs plis très gros. Son sexe - ces temps il n'avait plus d'érections matinales - semblait tout petit [...]. Il se pencha en avant - désormais il devait se pencher en avant pour l'apercevoir -, un petit oiseau déplumé qu'il réchauffa un instant dans son poing fermé."

 

Ce matin-là Jean décide de descendre à la cave, parce que toutes ses bouteilles de vin sont vides, et aperçoit une seringue sous les escaliers du rez-de-chaussée. Le lendemain, elle n'y est plus, la concierge ayant nettoyé. Tous les jours suivants, intrigué, il retourne "toujours avec une bonne raison", pour vérifier, sans résultat.

 

Jean repère une nouvelle seringue le jeudi seulement. Et le lendemain plus rien, la concierge ayant de nouveau nettoyé, sans rien dire. Mais le samedi soir, en sortant à dix heures, pour aller boire une bière, Jean entend un gémissement qui provient de sous les escaliers et y découvre une maigre jeune femme.

 

Jean, qui ne sait trop que faire, réussit à l'emmener chez lui, à lui faire prendre un bain, boire un thé, et à lui préparer un lit sur le canapé. Il laisse son portefeuille, en évidence, comme d'habitude, sur la tablette à côté du téléphone et, au matin, la droguée inconnue s'est esquivée, non s'en avoir "emprunté" les billets et la menue monnaie qui se trouvaient dans le portefeuille.

 

Le vendredi de la semaine suivante il croit l'apercevoir à un arrêt de bus avec une amie. Mais elles grimpent dans le premier bus venu et disparaissent, l'amie le regardant un court instant, semble-t-il, en riant. Le lundi suivant, il rentre tard après avoir passé une journée avec sa mère et découvre un message laissé sur son répondeur, après un autre message du bureau de placement:

 

"Bonjour, c'est Emilie Bourquet. Je vous dois cent soixante francs. Vous l'avez sans doute remarqué. Excusez-moi. Je ne pensais pas pouvoir vous rembourser de si tôt, et voilà que je suis pleine aux as!"

 

Une pause, puis le message, d'un ton plutôt joyeux, se poursuit:

 

"...Alors, si ça vous va, je vais passer ce soir. Si vous êtes pas là, je laisserai les sous dans la boîte aux lettres. A propos, excusez-moi et merci pour l'autre jour."

 

Seulement Emilie ne viendra pas et ne laissera pas les sous dans la boîte aux lettres, pour la bonne raison que le même jour elle sera retrouvée morte d'une overdose.

 

En voulant connaître le fin mot de l'histoire d'Emilie, Jean va mettre le doigt dans un sacré engrenage et dans un sacré imbroglio.

 

Jean fera la connaissance de Schuhmacher, l'oncle d'Emilie, et de l'amie de cette dernière, Maria Duarte. Il sera aux prises avec le commissaire Rioud et l'inspecteur Verdier chargés de l'enquête, le premier devenu ripoux à la suite d'un drame personnel, le second devenu ripoux parce que tenu par le premier à la suite d'un sombre accident.

 

Un jeune homme, Vincent, devenu ami de Béatrice, la fille handicapée de Rioud, et la psychiatre de Jean, Madame Beltrami, vont tout faire pour venir au secours de Jean, tombé dans un véritable guêpier, mais les choses ne tourneront pas vraiment comme ils l'auraient voulu...

 

Tout au long de cette histoire noire, où Olivier Sillig confirme, s'il en était besoin, ses grandes qualités de conteur captivant, les corps amis et ennemis chutent les uns après les autres, d'aucuns au physique, d'autres au moral. Ce qui s'accompagnera, pour deux d'entre ces derniers, de prise de poids...

 

Au milieu de tant de noirceur, deux intermèdes lumineux ont tout de même lieu. Lorsque "Maria vient se pelotonner contre la grosse masse encombrante et molle" de Jean en semi-léthargie et qu'il se passe quelque chose entre eux; lorsque Vincent se pelotonne le dos contre Beltrami, de quinze ans son aînée, contre ses seins, ses jambes étant contre les siennes, ses fesses contre son ventre, et qu'il ne se passe rien...

 

Car, les corps, quels qu'ils soient, peuvent avoir du poids...

 

Francis Richard

 

Le poids des corps, Olivier Sillig, 176 pages, L'Age d'Homme

 

Livres précédents:

 

La nuit de la musique,176 pages, Encre fraîche (2013)

Skoda, 112 pages, Buchet-Chastel (2011)

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  • : Le blog de Francis Richard
  • : Ce blog se veut catholique, national et libéral. Catholique, il ne s'attaque pas aux autres religions, mais défend la mienne. National, il défend les singularités bienfaisantes de mon pays d'origine, la France, et celles de mon pays d'adoption, la Suisse, et celles des autres pays. Libéral, il souligne qu'il n'est pas possible d'être un homme (ou une femme) digne de ce nom en dehors de l'exercice de libertés.
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  • Francis Richard
  • De formation scientifique (EPFL), économique et financière (Paris IX Dauphine), j'ai travaillé dans l'industrie, le conseil aux entreprises et les ressources humaines, et m'intéresse aux arts et lettres.
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