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25 octobre 2025 6 25 /10 /octobre /2025 18:00
La joute, de Richard Millet

La joute.

De quoi s'agit-il?

 

Le sous-titre en dit un peu plus:

Ou le combat de l'homme et de la femme dans la nuit du siècle.

 

Et [l'avertissement] Liminaire davantage:

Le combat dialogique entre l'homme et la femme  au sein du couple.

 

Où dialogique est un mot important.

 

Ce journal sans dates est fruit de l'expérience de l'auteur, hors de la morale et de la psychologie, dans le seul domaine sexuel et reproductif mais dans ce qui lui est propre, i.e. sa présence de soi à soi en un monde où le désert croît et où cette croissance implique la destruction des relations humaines aussi bien que l'authentique face à face de l'homme et de la femme.

 

Le lecteur est prévenu. Il ne doit pas s'attendre à un traité en bonne et due forme:

 

Ce livre eût été tout autre si le fragmentaire ne décidait de son ordre; un ordre secret, fait d'aimantations, relances et reprises plus que de simples répétitions, et où le lecteur tracera son chemin, tant il me semble que le sujet abordé ne peut que le renvoyer à sa subjectivité.

 

Le fait est que le lecteur doit faire face à un tourbillon de notes, qu'il ne peut lire d'une traite, qui exigent de sa part, parfois des relectures et, même, parfois des recherches dans le dictionnaire, des mots ne faisant pas partie de son vocabulaire habituel méritant d'être bien définis pour le bien comprendre.

 

Il est donc vain de faire un résumé de ce genre d'ouvrage, que le lecteur se doit de prendre, de laisser mûrir, de reprendre pour en savourer la quintessence.

 

Des exemples, d'inégales longueurs, choisis subjectivement, dans l'ordre où ils apparaissent, en donneront au lecteur une idée, une pâle idée, mais une idée tout de même, et peut-être l'envie de s'y plonger à son tour, sachant que des parties d'un texte, même en nombre, ne peuvent jamais rendre compte du tout, si elles peuvent être révélatrices de celui qui les a écrites et de celui qui les sélectionne:

 

  • L'amour n'est pas l'avenir d'une illusion conjugale, ni une construction narcissique. Il est la passion continuée par d'autres moyens, et le mariage souvent la condition de sa véritable naissance: un amour au-delà de l'amour, loin de tout idéalisme, mais toujours à naître - la joute étant moins une catharsis raisonnée, ou la transfiguration rhétorique des mille problèmes de la vie conjugale: elle tient à distance le pathos et la rancoeur, et les effets des idéologies sexuelles.
  • La joute est ce par quoi nous ne cessons d'aller l'un vers l'autre - et dans quoi la rencontre a moins d'importance que le cheminement.
  • Pas d'autre "identité sexuelle" que celle donnée par la nature. Le reste est la vieille antienne du démon faisant l'éloge de la variation amoureuse jusque dans les perversions. Ainsi la post-modernité a-t-elle conclu avec lui un pacte où tous les vices sont tolérés, hormis la pédophilie et le viol - l'enfant et la femme appelés à régner sur le monde nouveau, au détriment ou en lieu et place du mâle blanc. Nulle joute, là; l'idéologie relativiste coupe court à toute forme de dialogue.
  • Le langage de la joute n'est ni forcément séduisant, ni poétique, mais il a la fraîcheur d'une énonciation innocente, la séduction ayant déjà eu lieu, et la parole tendant à empêcher de choir dans l'inconnaissance, et le guidant vers la lumière d'un commencement perpétuel.
  • Le mariage est un consentement des noces perpétuelles; d'où la nécessité de cette paix supérieure non seulement des sens mais de l'esprit par la parole. Épithalame et contre-chant célébrés dans la joute.
  • On a "libéré" le sexe, la femme, le corps, la jouissance, mais pour quoi? La guerre des sexes fait plus que jamais rage, dans le vocabulaire, notamment, et dans l'hygiénisme étatique où l'amour n'est plus qu'une puissance secondaire au service d'un puritanisme ludique et tolérant. La liberté est ici, comme partout, un hochet entre les mains d'adultes qui ne veulent pas vraiment grandir - i.e. entrer dans la grande joute entre l'homme et la femme.
  • L'égalitarisme contemporain nie la joute au profit d'une judiciarisation de la guerre dans le discours relativiste: l'homme est même invité à une reddition sans conditions, par quoi sa jouissance est tolérée. La joute: une sorte d'insurrection.
  • La sexualité n'est acceptable que pendant peu de temps, et comme façon de célébrer la parole, non le contraire. La parole est une forme de sexualité transfigurée, bien plus que compensatoire.
  • Un homme qui pleure devant une femme se met hors-jeu, non par "stéréotype de genre", mais parce qu'il se place hors langage, et s'avoue vaincu, alors que, rappelons-le, la joute ne suppose ni vainqueur, ni vaincu.
  • Le christianisme a fondé le sujet moderne, démythifiant ou dépassant la libido au profit de la conscience de soi comme sujet désirant et conflictuel. En prétendant "libérer" le désir, donc le sexe, la post-modernité n'a fait que le rendre obligatoire, et libérer l'ensemble des déviances et des vices. La falsification du mariage et du "genre" n'attendait plus que la réhabilitation de Sodome et Gomorrhe par un relativisme satanique.
  • Le politiquement correct tente d'imposer le mot "partenaire" dans le discours général sur le couple devenu aujourd'hui un fourre-tout de toutes les apories d'une sexualité sans autre enjeu que sa perpétuation idéologique, un partenaire ne supposant rien d'autre qu'un accord peu ou prou commercial, dans quoi la joute ne saurait donner.
  • Le divorce est une inversion de la liberté, tout comme le mariage n'est plus qu'une sacralité parodique, comme le montre le mariage homosexuel ou le mariage "blanc".
  • La joute ressemble par moments à un immense hyppalage dans lequel chacun prête à l'autre ses pensées, désirs, peurs, doutes, afin de se les représenter à partir d'une impossible altérité...
  • Il peut y avoir de l'estime sans amour, mais pas d'amour sans estime - laquelle est aussi indispensable à la joute.
  • Nous cherchons dans la rhétorique amoureuse l'hapax qui scelle la vérité de notre couple et que nous n'ébruiterons pas.
  • Les femmes que j'ai aimées parlaient un bon français. On n'imagine pas que la joute ait lieu dans une langue vulgaire ou fautive.

 

Francis Richard

 

La joute, Richard Millet, 192 pages, Les Provinciales

 

Précédents billets sur des livres de Richard Millet:

 

Fatigue du sens (17 décembre 2011)

La souffrance littéraire de Richard Millet (21 septembre 2012) :

- Langue fantôme, suivi de, Éloge littéraire d'Anders Breivik

- Intérieur avec deux femmes

- De l'antiracisme comme terreur littéraire

Trois légendes (21 novembre 2013)

L'Être-Boeuf (3 décembre 2013)

Une artiste du sexe (30 décembre 2013)

Le corps politique de Gérard Depardieu (25 novembre 2014)

Solitude du témoin (3 mai 2015)

Province (28 juin 2017)

Étude pour un homme seul (17 mai 2019)

Français langue morte suivie de l'Anti-Millet (30 juillet 2020)

Paris bas-ventre, suivi de, Éloge du coronavirus (22 juillet 2021)

Nouveaux lieux communs (8 juin 2024)

Ozanges (25 septembre 2024)

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  • Francis Richard
  • De formation scientifique (EPFL), économique et financière (Paris IX Dauphine), j'ai travaillé dans l'industrie, le conseil aux entreprises et les ressources humaines, et m'intéresse aux arts et lettres.
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