Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
29 août 2019 4 29 /08 /août /2019 15:30
Ce que je peux dire de mieux sur la musique, Robert Walser

Ce que je peux dire de mieux sur la musique est un recueil de soixante textes, proses et poèmes, écrits entre 1899 et 1933 par Robert Walser (1878 - 1956). Ils ont été choisis par Roman Brotbeck et Reto Sorg et publiés en allemand en 2015 sous le titre Das Beste, was ich über Musik zu sagen weiss.

 

Trente et un d'entre eux sont des inédits en français et ont été traduits par Marion Graf. Comme le souligne cette dernière dans sa note liminaire, les textes sont présentés dans l'ordre chronologique et retrace les trois grandes étapes de l'oeuvre de Walser:

 

Les années 1900, où s'épanouit le genre de la "rédaction" et du récit, les années 1910, avec des contes et des miniatures raffinées, et enfin les poèmes et les proses débridées des années 1920...

 

Dans leur postface les deux universitaires qui ont sélectionné les textes soulignent qu'en dépit de toute la ferveur musicale dont il avait été capable dans sa jeunesse, la musique, de tous les arts, reste celui dont Walser est le plus éloigné et précisent:

 

La présente anthologie, entre autres objectifs, veut proposer un catalogue de tout ce qui dérange l'écrivain dans l'institution musicale: la division stricte entre les musiciens suractifs et le public silencieux et immobile, le concert comme la quintessence du besoin de représentation et de la discipline bourgeoises, le snobisme culturel lié à la musique, le culte du génie et de la virtuosité, les solistes infatués et les cantatrices vaniteuses.

 

Comme les textes sont courts - ils varient d'une page à une dizaine de pages -, il est possible, à volonté, de les lire par petites portions, pour les savourer, et éventuellement les relire, ou alors d'une seule traite pour en retirer une impression d'ensemble.  

 

Robert Walser emploie souvent l'adjectif petit: il se dit, par exemple, fabricant de petites proses et aime les petites gens, celles des états les plus modestes, qu'il connaît bien; dans La chapelle, il s'intéresse à une petite bonne, amusante et vive, et écrit:

 

J'aime à désigner du nom de petits enfants les gens qui croient encore en un Dieu. Les enfants ont souvent plus d'esprit que les adultes, et les simples d'esprit sont souvent plus intelligents que les gens d'esprit.

 

Son rapport à la musique ne peut se réduire à ce qu'il écrit dans La musique mais c'est tout de même révélateur: Quelque chose me manque quand je n'entends pas de musique, et quand j'en entends le manque est encore plus grand. Voilà ce que je peux dire de mieux de la musique.

 

Car il est avant tout écrivain et poète.

 

Quand, dans Une tête de veau d'un brun aussi foncé, au piano, périodes et attitudes [roulent] comme des vagues et des escaliers, de haut en bas, et [giclent] dans les airs de plus belle pour s'évanouir, cela lui fait l'effet de baisers, puisque, semblables à des notes, ils sont si doux, si agréables, si précieux et illusoires, car toujours perdus à jamais:

 

Mais quiconque a cessé d'aimer et de caresser, quiconque en est lassé, transitoirement peut-être, celui-là doit et peut recommencer, tout comme dans la musique, les notes mourantes, mortes, refleurissent dans d'autres notes qui succèdent à celles qui se sont envolées, pour reprendre vie.

 

C'est pourquoi, pour parler avec ferveur de Paganini, qu'il ne peut qu'imaginer, et pour cause, jouant son jeu d'homme suivant son destin [...], flottant entre vouloir et devoir, grâce à cela prenant tous les coeurs et charmant toutes les oreilles, il le fait avec un certain droit puisque tout ce [qu'il écrit] là repose uniquement sur l'imagination et sur la méditation.

 

Francis Richard

 

Ce que je peux dire de mieux sur la musique, Robert Walser, 224 pages, Zoé ( textes sélectionnés par Roman Brotbeck et Reto Sorg, traduits par Marion Graf, Golnaz Houchidar, Jean Launay, Bernard Lortholary, Jean-Claude Schneider, Nicole Taubes)

Partager cet article
Repost0

commentaires

Présentation

  • : Le blog de Francis Richard
  • : Ce blog se veut catholique, national et libéral. Catholique, il ne s'attaque pas aux autres religions, mais défend la mienne. National, il défend les singularités bienfaisantes de mon pays d'origine, la France, et celles de mon pays d'adoption, la Suisse, et celles des autres pays. Libéral, il souligne qu'il n'est pas possible d'être un homme (ou une femme) digne de ce nom en dehors de l'exercice de libertés.
  • Contact

Profil

  • Francis Richard
  • De formation scientifique (EPFL), économique et financière (Paris IX Dauphine), j'ai travaillé dans l'industrie, le conseil aux entreprises et les ressources humaines, et m'intéresse aux arts et lettres.
  • De formation scientifique (EPFL), économique et financière (Paris IX Dauphine), j'ai travaillé dans l'industrie, le conseil aux entreprises et les ressources humaines, et m'intéresse aux arts et lettres.

Références

Recherche

Pages

Liens