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28 avril 2009 2 28 /04 /avril /2009 21:35

La Commission européenne a publié aujourd'hui ( ici ) une "communication" adressée au Parlement européen et au Comité économique et social européen pour "encourager la bonne gouvernance dans le domaine fiscal". Ce document était annoncé. Le 23 avril dans le Tagesanzeiger, le 24 dans Le Matin  ( ici ). 

A lire le document de la Commission il apparaît très clairement que, quand elle parle de "bonne gouvernance en matière fiscale", c'est en réalité des bonnes recettes, qu'il convient d'appliquer pour accroître la pression fiscale sur les contribuables européens, dont elle veut parler.
Certes la Commission n'a pas cette franchise. Aussi définit-elle "la bonne gouvernance dans le domaine fiscal" par une "coopération internationale" et des "normes communes en matière fiscale".


Sous ces termes anodins il s'agit en fait de centraliser et d'harmoniser pour être plus efficace. La Commission se dit d'ailleurs "prête à aider les Etats membres à prendre les mesures appropriées dans le cadre de la politique de bonne gouvernance dans le domaine fiscal", c'est-à-dire à mettre en oeuvre les recettes qui conviennent pour améliorer les recettes ... fiscales.


Il est intéressant de constater que la Commission ne rejette pas la mondialisation et ne pense pas qu'il faille "fermer les marchés en raison de ses effets négatifs". Elle pense qu'"une solution viable consiste à mieux gérer les effets de la mondialisation". Compte-tenu de la crise il est urgent pour elle d'intervenir.
 


Cette meilleure gestion des effets de la mondialisation est ce qu'il faut bien appeler le mondialisme, qu'il ne faut justement pas confondre avec la mondialisation. Le mondialisme, ou socialisme mondial, entend régenter le monde. Pour ce faire il ne manque pas de moyens financiers. Ces moyens proviennent de la force fiscale qui s'exerce dans le monde entier au travers d'organismes mondialistes tels que le G20, l'OCDE ou l'Union européenne, liste visible, loin d'être exhaustive, mais emblématique sur le plan fiscal.

Comme disait Michel de Poncins dans un article du 4 mai 2006 ( ici ), la mondialisation est l'inverse du mondialisme :
  

La mondialisation est la simple liberté du commerce, c’est-à-dire l’exercice par chacun de son droit naturel d’acheter ou de vendre où il veut et comme il veut dans le monde entier. Ce droit doit pouvoir s’exercer sans que les Etats mettent le moindre obstacle à son exercice, que ce soit sous forme de droits de douane ou de réglementations.


L’effet d’enrichissement venant de ce commerce étendu à toute la planète vient de deux sources. D’abord les consommateurs bénéficient de certains produits fabriqués ailleurs et qui sont meilleurs ou moins chers que chez eux. D’autre part, les producteurs également bénéficient des mêmes facilités ce qui aide à due concurrence leurs propres fabrications au bénéfice des consommateurs.


La  Commission reconnaît qu'au sein du marché intérieur européen il peut y avoir des difficultés résultant de l'intégration des économies :


L'ouverture des frontières peut ainsi mettre les systèmes fiscaux à rude épreuve et entraver la perception de recettes suffisantes pour financer les dépenses publiques.

Cet aveu est significatif : la Commission ne se pose pas la question de savoir s'il ne faudrait pas diminuer les dépenses publiques, elle se demande comment faire pour que les recettes fiscales ne diminuent pas. Ce qui choque la Commission, ce n'est pas le niveau confiscatoire des impôts et taxes d'un pays. Ce qu'elle trouve "dommageable", c'est que des mesures fiscales établissent : 


Un niveau d'imposition effective nettement inférieur à ceux qui s'appliquent normalement dans l'Etat membre concerné.

C'est pourquoi elle souligne que :

L'application de la politique communautaire en matière d'aides d'Etat aux mesures relevant de la fiscalité a contribué à la suppression des distorsions de concurrence résultant de régimes fiscaux spécifiques introduits par les Etats membres pour leurs entreprises.

Dans cet esprit la Commission se félicite que la "Déclaration de Doha sur le financement du développement" - qui s'est tenu du 29 novembre au 2 décembre 2008 - ait appelé : 

A consentir davantage d'efforts pour accroître les recettes fiscales en modernisant les systèmes fiscaux, en améliorant le recouvrement de l'impôt, en élargissant l'assiette fiscale et en luttant vigoureusement contre la fraude fiscale.

Pour la Commission les régimes d'imposition, tels que ceux de la Suisse, qui octroient aux sociétés des avantages par rapport aux régimes d'imposition pratiqués dans l'Union européenne, constituent des "aides de l'Etat" [sic]. Les entreprises sont aidées par l'Etat quand elles ne sont pas pressurées par lui !

Cette subversion du vocabulaire, on la retrouve dans les termes employés pour traduire dans les faits "la bonne gouvernance dans le domaine fiscal" : transparence, échange automatique d'informations et concurrence fiscale loyale.

La transparence n'est rien d'autre que l'atteinte à la sphère privée, l'échange automatique d'informations que la délation automatique et la concurrence fiscale loyale que l'absence de concurrence fiscale.

Comme le dit Jan Krepelka (voir mon article  A lire : "Le secret bancaire : un impératif moral" de Jan Krepelka ) :


Le secret bancaire est une simple conséquence d’un droit à la vie privée qui est considéré comme allant de soi dans bien d’autres domaines.

Selon Le Matin du 24 avril ( ici )  , le rapporteur d'une directive sur la fiscalité de l'épargne devant le Parlement européen , le socialiste français Benoît Hamon a déclaré :

 

Il est légitime, au moment où l'on demande aux contribuables européens [on ne leur demande pas justement, on leur impose] de venir sauver le secteur bancaire, que le secteur bancaire fasse des efforts pour aider les Etats à lutter contre la fraude fiscale [il faut qu'il dénonce ses clients].

Comme le dit Thierry Afschrift (voir mon article Le secret bancaire défend l'individu contre l'oppression ) :

En l'absence de concurrence, les prix montent, et ceci vaut bien sûr aussi pour les taux d'impôt.

La Commission considère que l'impôt à la source accordé à trois Etats membres, Autriche, Belgique et Luxembourg, en contrepartie du maintien de leur secret bancaire, n'est qu'une autorisation "à titre transitoire" et qu'il faudra bien qu'ils renoncent au secret bancaire. Il en sera de même pour la Suisse. La Commission européenne ne supporte pas qu'un pays puisse échapper à l'enfer fiscal européen sans encourir des "mesures de rétorsion efficaces qui restent à définir".

Ici ou là, j'ai lu que, lors du sommet du G20, l'essentiel avait été préservé, à savoir que le libre-échange avait été préservé. Je ne partage pas cet optimisme. Il s'agit là d'un libre-échange de façade, réglémenté par des instances mondialistes. En revanche l'avènement d'un gouvernement mondial, fiscal, et quasi totalitaire, est de plus en plus manifeste.

Francis Richard

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  • Francis Richard
  • De formation scientifique (EPFL), économique et financière (Paris IX Dauphine), j'ai travaillé dans l'industrie, le conseil aux entreprises et les ressources humaines, et m'intéresse aux arts et lettres.
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