Les Américains ont une chance folle. En effet ils sont contribuables du fisc américain quel que soit leur lieu de résidence dans le monde. Qui plus est, ils sont imposables sur tous les revenus qu’ils perçoivent de par le monde. Etre citoyen américain cela ne se mérite plus comme au bon vieux temps de la Guerre d'Indépendance, cela se paye fiscalement. Ne plus l’être aussi, d'ailleurs.
Comment, en effet, légalement, pour un Américain, échapper au fisc américain ?
Il n’y a qu’une solution : s’expatrier et rendre son passeport.
S’expatrier peut être coûteux. Le 17 juin 2008, à la fin de son mandat, le Président des Etats-Unis, George Bush a signé une loi, THE HEART ACT, selon laquelle l’« expatrié couvert », c’est-à-dire l’expatrié légal, doit s’acquitter d’une taxe sur ses biens, l’EXIT TAX. Cette taxe a pour base d’imposition la plupart des biens mondiaux du candidat, évalués à leur valeur vénale au jour précédant celui de l’expatriation.
Comment un Américain peut-il être considéré comme un « expatrié couvert » redevable de l’EXIT TAX ? Il faut qu’il remplisse au moins l’un des critères suivants :
- Disposer d’une fortune nette d’au moins 2 millions de dollars (les 626'000 premiers dollars sont exonérés)
- Avoir un revenu imposable moyen d’au moins 145'000 dollars pendant les cinq ans précédant l’expatriation
- Avoir omis de certifier être en règle avec les prescriptions fiscales pendant les cinq dernières années.
La date d’expatriation, qui va être utilisée pour valoriser les biens, est la première des dates suivantes :
- La date à laquelle l’individu renonce à la nationalité américaine devant un diplomatique ou un employé consulaire des Etats-Unis
- La date à laquelle l’individu fournit au Département d’Etat une déclaration signée de renonciation volontaire de la nationalité américaine confirmant l’acte d’expatriation
- La date à laquelle le Département d’Etat publie un certificat de perte de nationalité
- La date à laquelle une Cour américaine annule le certificat de naturalisation d’un citoyen
Il y a deux exceptions qui permettent d’échapper à l’EXIT TAX. Toutes deux s’appliquent aux binationaux de naissance :
- Il faut qu’à partir de la date d’expatriation, l’individu continue à être un citoyen de l’autre pays et à être imposé comme un résident de cet autre pays
- Il faut que l’individu ait été un contribuable des Etats-Unis pour moins de 10 ans pendant une période de 15 ans finissant avec l’année imposable d’expatriation (cette exception s’applique à celui qui renonce à la citoyenneté avant 18 ans et demi).
Le site ISLA, conseiller offshore, implanté dans la Dominique (à ne pas confondre avec la République Dominicaine), suggère ici de choisir le bon moment pour s’expatrier, c'est-à-dire quand le montant de ses avoirs nets se situe en-dessous du seuil fatidique de 626'000 dollars. Il indique également quels sont les pays qui sont les plus rapides pour obtenir une autre nationalité : la Dominique, of course, et la Fédération de St Kitts et Nevis. Un nouveau passeport peut y être délivré en 2-3 mois... Qui dit mieux ?
Feriel Mestiri, dans Le Temps du 13 août 2010, nous informe ici que les candidats américains à l’expatriation couverte « étaient 743 dans le monde en 2009, dont 502 durant le dernier trimestre, selon le Trésor américain. Trois fois plus qu’en 2008, et ce chiffre est un minimum. »
Le journaliste du Temps ajoute :
« L’avocat genevois David W. Wilson, dont l’étude Schellenberg Wittmer conseille les Américains, constate une recrudescence des expatriations, mais également des demandes de naturalisation suisse avant de pouvoir renoncer à la nationalité américaine ».
Décidément non seulement les populations des régions limitrophes de la Suisse rêvent d’y être rattachées, non seulement les PME s’installent plus volontiers en Suisse qu’en France, mais encore des Américains veulent devenir suisses pour échapper au fisc américain...
C’est un scandale ! comme dirait feu Georges Marchais…
Francis Richard
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