En 1916, la NRF publie Le Porche du Mystère de la deuxième vertu de Charles Péguy. Il y a tout juste un siècle. Treize ans plus tard ce texte paraît en volume.
Quand je m'afflige de l'incompréhension des hommes entre eux,
quand je vois qu'ils ne s'aiment pas et qu'ils recuisent leur haine,
quand je constate qu'ils ne cherchent ni à se connaître ni à se comprendre,
quand les uns croient que leur dieu est supérieur à celui des autres,
quand les autres croient détenir la vérité qui échapperait aux uns,
quand les uns sont pétris de certitudes et s'en prennent à ceux qui doutent,
quand les autres collent des étiquettes, pour leur nuire, à ceux qui ne suivent pas la même route qu'eux,
quand les uns ne retiennent que les défauts des autres en oubliant les leurs,
quand les autres dénient aux uns toutes qualités,
quand les uns
quand les autres
Ce qui m'étonne, dit Dieu, c'est l'espérance.
Et je n'en reviens pas.
Cette petite espérance qui n'a l'air de rien du tout.
Cette petite fille espérance.
Immortelle.
[...]
L'Espérance est une petite fille de rien du tout.
Qui est venue au monde le jour de Noël de l'année dernière.
Qui joue encore avec le bonhomme Janvier.
[...]
La Charité aime ce qui est.
Dans le Temps et dans l'Éternité.
Dieu et le prochain.
Comme la Foi voit.
Dieu et la création.
Mais l'Espérance aime ce qui sera.
Dans le temps et dans l'éternité.
Pour ainsi dire dans le futur de l'éternité.
L'Espérance voit ce qui n'est pas encore et qui sera.
Elle aime ce qui n'est pas encore et qui sera
Dans le futur du temps et de l'éternité.
Et quand je suis arrivé au bout de ma lecture, je demande à mon Créateur, puisque cela ne va pas de soi, de recevoir la grande grâce de continuer toujours à espérer.
Francis Richard
St Jean-de-Luz, Pâques 2016
Le Porche du Mystère de la deuxième vertu, Charles Péguy, 192 pages, Poésie / Gallimard