J'ai voulu écrire la biographie de mon père afin de lui rendre justice d'abord, parce qu'il a fini sa vie sans avoir pu la conclure comme il le méritait; et afin de transmettre à mon tour ce qu'il m'a donné: un art de vivre, une éthique du métier, écrit Pierre Friderici dans le prologue.
Ce récit est plus qu'une biographie, l'hommage d'un fils à son père, pour lequel il éprouve de la fierté. Pour ce faire, ayant du temps, mais pas d'expérience, ni d'argent à mettre, il a demandé de l'aide à Jean Steinauer, journaliste, historien et ami de longue date.
Comme on peut le voir sur la photo de couverture (à gauche), son père, Alfred Friderici, est un patron (dans le domaine du transport routier) comme on n'en fait plus: sa tenue de travail est une salopette bleue, qu'il porte entrouverte sur une chemise et une cravate.
Alfred (1917-1996) est le responsable commercial et son frère Paul (1923-2018) le responsable technique de l'entreprise familiale, que tous deux, autodidactes, ont repris à la mort de leur père, Charles-Félix, en 1958, sans connaissances particulières en management.
Cela ne va pas les empêcher de la développer formidablement, localement et à l'international, et de la diversifier jusqu'au début des années 1970, en dépit des réglementations et des protectionnismes, jusqu'à ce que le département Moyen-Orient lui soit fatal.
Ce qui caractérise Le Grand Fred, surnom qui lui a été donné par ses amis, c'est son enracinement local à Morges, où, sur plusieurs générations, tous les Friderici, ou presque, ont trouvé femme. Son fils Pierre parle du biotope originel morgien de la Maison Friderici...
Ce qui caractérise le Grand Fred également, c'est qu'il prend depuis longtemps une irrémédiable distance avec la secte darbyste, qui a marqué de son empreinte sa famille avec le mariage de son père avec les deux soeurs Bussy qui en sont adeptes.
Cette secte sera un facteur déclencheur de la chute de la Maison Friderici: Mais pour venir à bout de la plus grande structure de transport routier du pays, il faudra des erreurs stratégiques et pas moins qu'un retournement conjoncturel d'ampleur internationale...
Du Grand Fred, qu'a-t-on envie de retenir? Ce portrait que dresse de lui son fils:
Alfred n'a jamais été un homme d'argent. Il est mû par le goût d'entreprendre, pas celui d'accumuler. Il applique beaucoup de rigueur au contrôle des dépenses et des encaissements, mais ne montre nulle âpreté au gain. Ce bon vivant ne crache ni dans un bon vin ni sur une fine table, mais il a dans son quotidien des goûts simples et ne croit pas à la sincérité des signes extérieurs de richesse.
Francis Richard
Le Grand Fred, Pierre Friderici et Jean Steinauer, 96 pages, Bernard Campiche Editeur