Le titre, Vol 417, fait référence à un vol de renvoi, ou d'expulsion, d'étrangers et à la votation 417 du 4 décembre 1994 dont l'objet était la loi fédérale sur les mesures de contrainte en matière de droit des étrangers, acceptée par le peuple suisse par 72,9% des bulletins valables.
Dans son roman, qui se passe en décembre 1995, Marie-José Imsand donne la parole à plusieurs narrateurs au sujet de l'application, un an plus tard, de ces mesures de contrainte, qui sont, entre autres, la détention, puis le renvoi, ou l'expulsion, de requérants d'asile.
Le point de vue le plus radical est celui d'Alberto Rosso, tenancier d'origine italienne d'un bistro, le Magenta (comme le nom de son village), qui, un matin, de colère, prend ses clients en otages pour leur faire comprendre la violence que représente une séquestration.
Par là même, Alberto Rosso entend protester contre l'arrestation d'amis immigrés de son immeuble, qui ont été expulsés à l'aube, et faire savoir au peuple suisse que c'est une indignité. Il le fait en mémoire de son père qui a perdu sa santé en travaillant ici jour et nuit sur des chantiers...
Parmi les otages, il y a Célia Magda, trente-trois ans, divorcée. Mais elle est soupçonnée d'être la complice d'Alberto Rosso, parce que son petit ami fait partie du groupe d'immigrés qui habitent l'immeuble du tenancier à Lausanne et qui ont été arrêtés à cinq heures du matin.
Célia enseigne le français à des migrants dans un centre d'accueil. L'an passé, à l'occasion de la fête de fin d'année, elle et son petit ami, un jeune Roumain, se sont connus, évitant dès lors de fréquenter les lieux publics afin d'échapper aux regards jugeant leur différence d'âge.
Le jeune Roumain raconte les conditions cruelles de sa détention au centre administratif de détention de Frambois dans le canton de Genève, tout près de l'aéroport. Il n'est pas le premier à s'y retrouver depuis la votation 417, l'étape suivante étant de quitter la Suisse par vol spécial.
Charles Edward Sun, psychiatre, dans le cadre de l'enquête sur l'affaire du Magenta, pris d'assaut et détruit par la police, rédige un rapport et prend des notes personnelles pleines d'empathie pour Célia Magda, qu'il interroge et qui lui relate ses amours avec son bel homme de l'Est.
Ces points de vue convergent et soulignent le caractère inhumain de la procédure de détention puis de renvoi des étrangers arrêtés, qui, en l'occurrence, ne sont pas des criminels, mais qui sont - c'est le pire - traités comme tels lorsqu'ils sont embarqués pour leur vol spécial.
Francis Richard
Vol 417, Marie-José Imsand, 104 pages, BSN Press (sortie le 21 novembre 2019)
Livres précédents chez le même éditeur:
Le musée brûle (2016)
Affaires étrangères (2018)