Quand il revient au bout de trois ans, il ne possède plus rien. Ils lui ont tout pris, ses soi-disant prochains - la maison, l'étable, les quelques prés qu'il cultivait.
Simon a passé trois ans en prison. Lors de la chasse, par accident, il a tué Luzi avec lequel il venait de se disputer puis réconcilier. Il a été condamné pour homicide par imprudence.
D'aucuns, dans le village, irréductiblement, le voient en meurtrier. Mais il revient tout de même là. Où pourrait-il aller d'ailleurs? Il y a toujours vécu et il a soixante-cinq ans.
Heureusement, tout le monde n'éprouve pas de l'inimitié pour lui. Il y a ses anciens amis, qui le sont restés et qui ne l'abandonnent pas, et des nouveaux, qu'il se fait, naturellement.
Il est évident que Simon n'est pas un meurtrier et qu'il n'en a ni le profil ni le comportement. Et, aujourd'hui, à soixante-cinq ans il pourrait se colleter encore avec les montagnes.
L'occasion, involontaire, lui est donnée de montrer quel homme il est. Le sort veut que, lorsqu'à l'automne sont concédés les forfaits de coupe en forêt, le plus moche lui échoit.
Au lieu de refuser, ce que le forestier comprendrait, Simon relève le défi de cette Coupe sombre, très loin du village, en haut, presque à la lisière de la forêt, sous les rochers.
En l'occurrence, chez lui, il ne s'agit pas d'orgueil, mais plutôt de volonté d'aller toujours de l'avant, jusqu'au bout et peut-être, inconsciemment, d'y trouver une rédemption.
Francis Richard
Coupe sombre, Oscar Peer, 128 pages, Zoé (traduit du romanche par Marie-Christine Gateau-Brachard)