La poésie se cristallise en une esthétique. Elle se givre dans l'été, à la fois saison estivale et événement inouï d'avoir été et d'être encore, de persévérer dans son intention, écrit Jacques Boesch en début de cet ouvrage, qui met vis-à-vis photos et poèmes, tantôt à une voix, tantôt deux.
Le paradoxe du titre oxymore n'est pas le seul de ce livre en couleurs et en noir et blanc. Car il n'est pas une photo qui ait été prise en été. L'été a donc bien été comme l'écrit Jacques Boesch, mais il est encore, en espérance ou en rémanence, autrement dit dans l'intention persistante.
Stéphanie Metzger del Campo et François Ledermann se sont baladés dans la ville, en ont tiré images et textes, et invitent à faire de même sous le Pont du Mont-Blanc, sur le Pont Rousseau, sur le Sentier des Saules (à la Jonction), en Vieille Ville, aux Bastions ou aux Eaux-Vives.
Même les bâtiments, tels celui des Forces Motrices ou celui du Seujet, tels ceux qui bordent les quais ou les côtés des rues et des places, incitent à la poésie, car c'est le regard que l'on porte sur eux en se promenant par beau ou par mauvais temps, qui les poétise et les idéalise.
En ce fol temps, c'est un bel hymne à la ville du bout du lac, dont, quand il n'est pas représenté par une image, la présence se devine proche, même lorsqu'une rue ou un bâtiment ne le sont pas. Car ses eaux entêtantes, mêlées à celles du Rhône qui le traverse, en emplissent l'atmosphère:
Lac de toutes les frontières
Lac de toutes les épaisseurs
Fréquence mystique
D'un rivage
Qui s'offre au bleu du ciel
SMDC
Voir le lac tant aimé
Le voir ivre de bise
Jouer sur les quais
Regard d'enfant
Sur le monde des bâtisses figées
Bordant les rêves mouvants
FL
Francis Richard
Givre d'été, Stéphanie Metzger del Campo et François Ledermann, 128 pages, Slatkine