Hier donc les trois objets soumis à votation ont été rejetés par le peuple.
Très rapidement je reprendrai en substance les propos tenus sur TSR1 par Yvan Perrin, Vice-président de l’UDC, sur le rejet de l’article constitutionnel « Qualité et efficacité économique dans l’assurance-maladie », rebaptisé sobrement et opportunément par ses adversaires article constitutionnel « sur la santé » : « Le peuple ronchonne quand il reçoit les avis de prime d’assurance-maladie, mais il s’en accommode finalement puisqu’il rejette un moyen sûr de réduire leur montant qui est d’y introduire de la concurrence et de la transparence. En somme il est prêt à payer le prix pour avoir une médecine de qualité ». Dont acte.
Il apparaît clairement que les assurés, en particulier les assurés modestes, ont été dupes de la gauche, du réflexe corporatiste des médecins et de la propagande des cantons contre cet objet qui leur enlevait des prérogatives.
Pour masquer le fond du débat l’initiative populaire « Pour des naturalisations démocratiques » et l’initiative populaire « Souveraineté du peuple sans propagande » ont toutes deux été rebaptisées pour la circonstance par les média et les opposants à ces initiatives, c’est-à-dire tous les partis, hormis l’UDC. Le but avoué était de les caricaturer pour mieux obtenir leur rejet. Ainsi ces deux initiatives sont-elles devenues l’une l’initiative « Pour des naturalisations par les urnes » et l’autre l’initiative dite « muselière ».
Dans le premier cas l’UDC a peut-être trop parlé des conséquences et pas assez du principe. Certes il est vrai qu’en quinze ans le nombre des naturalisés a été multiplié par huit, que le taux de naturalisation par rapport au nombre d’habitants est plus fort en Suisse que dans les autres pays d’Europe, que la moitié d’entre eux est d’origine des Balkans ou de Turquie et que ce sont les originaires de ces dernières régions qui ont le taux de criminalité le plus élevé. Mais le plus grave est que par la grâce du Tribunal fédéral la naturalisation est d’acte politique devenu acte administratif.
Le Tribunal fédéral par ses deux décisions du 9 juillet 2003 a commis un abus de pouvoir. Il ne lui appartenait pas de quitter son rôle de juge pour endosser celui de législateur. Il n’a pas respecté la séparation des pouvoirs. Le malheur est que le peuple hier lui a donné raison. En lui donnant raison il a implicitement abandonné une part de sa souveraineté et renoncé à avoir le dernier mot. Il a en outre engagé le processus de changement de qualification des naturalisations qui de politiques seront de plus en plus administratives, donc automatiques.
Cette votation enfin a été l’occasion de confirmer que Madame Eveline Widmer-Schlumpf ne représentait pas l’UDC au Conseil fédéral et que la concordance au Conseil fédéral n’était que de façade. En effet elle a recommandé le rejet d’une initiative lancée par son propre parti et contribué à son échec. Son exclusion de l’UDC décidée le même jour par le Comité directeur par le score sans appel de 84 voix contre 5 n’en paraît que plus justifiée. Remarquons toutefois que les 36% recueillis par l’initiative de l’UDC dépassent largement les 29% qu’elle a recueillis lors des élections fédérales de l’automne dernier.
Quant au dernier objet les interventions de Madame Widmer-Schlumpf contre les naturalisations démocratiques sont l’illustration que la séparation des pouvoirs, dont tout le monde se réclame, mais que peu défendent réellement, voudrait que le Conseil fédéral fasse preuve d’une réelle objectivité et se cantonne dans un rôle d’information, laissant aux partis le soin de mener les campagnes de votation.
Le rejet de ces deux derniers objets me paraît donc grave parce qu’il touche à la démocratie directe. Il est paradoxal que ce soit le peuple qui ce faisant restreigne lui-même sa souveraineté. Mais en est-il bien conscient ?
Francis Richard