Prenant l'exemple français justement Vincent fait le constat suivant :
"La plupart des impôts progressifs actuels sont truffés de niches fiscales qui avantagent les gros contribuables, et si ces niches sont insuffisantes, ces mêmes gros contribuables ont souvent les moyens de pratiquer l'évasion fiscale. Ainsi, en France, dans les dernières années précédant la crise, le produit de l'impôt sur le revenu a-t-il été égal à seulement un peu moins de 7% des sommes déclarées (sept, pas une faute de frappe), alors que les taux marginaux se situent encore à 40%, après avoir dépassé les 50% au début du millénaire."
A partir de là il développe sa démonstration :
"Imaginez que l'IRPP français actuel soit remplacé par un impôt frappant les revenus actuels à 7% mais sans la moindre niche fiscale: il est évident que tous ceux qui aujourd'hui ont intérêt à frauder le fisc, ou à limiter leur travail productif, ou leur investissement à risque, trouveraient de nouvelles incitations à changer de comportement vis à vis du fisc. Quand bien même ceux qui sont exonérés pour cause de revenus insuffisants le resteraient, un taux de 10% suffirait à faire rentrer, sur le papier, autant d'argent qu'aujourd'hui dans les caisses publiques. Et sans doute beaucoup plus, comme les expériences de tous les pays de l'est l'ont montré."
Il ajoute que si la Grèce adopte la flat tax :
"Cela ne doit pas inciter le gouvernement grec à ajourner ses coupes dans les dépenses publiques."
Cette coupe dans les dépenses publiques y serait rapidement demandée par les contribuables eux-mêmes. Une fois instaurée dans un pays, la flat tax n'est pas seulement un bon moyen fiscal d'en rétablir les finances, mais un bon moyen de dégraisser le mammouth [la photo ci-dessus provient d'ici], du moins dans un pays démocratique.
En effet tout le monde étant logé à la même enseigne dans un tel pays, tout le monde a intérêt à ce que le taux de la flat tax, ou imposition proportionnelle, y soit le plus faible possible. Toute augmentation des dépenses publiques se traduisant par une augmentation du taux et inversement. Dans les pays où sévit l'imposition progressive c'est, d'expérience, le contraire. Les contribuables les moins riches ne s'opposent pas à l'augmentation des taux marginaux qui frappent les plus riches.
Une étude publiée hier par l'Institut Constant de Rebecque ici le confirme et va plus loin. L'auteur, Victoria Curzon Price, professeur honoraire de l'Université de Genève et présidente de ce remarquable institut, y traite "de l'équité de l'imposition proportionnelle" ici.
Après avoir rappelé qu'il existe trois sortes d'impôt sur le revenu - par tête, à taux fixe, à taux progressif -, Victoria fait le constat suivant :
"Bien que personne ne semble regretter que le riche et le moins riche paient un prix identique pour une baguette de pain, ou un même émolument pour un service de l'Etat (comme le renouvellement d'un passeport), tout le monde semble considérer que le riche doit contribuer plus que le moins riche au financement de l'Etat".
Friedrich Hayek explique pourquoi dans la Constitution de la liberté. Cela tient à la tradition culturelle du partage. A l'origine l'homme était nomade, vivait en groupe et le groupe se partageait le produit de la chasse. Quand l'homme s'est sédentarisé et est devenu agriculteur, la propriété privée est apparue :
"Sans la propriété privée, il n'y aurait pas eu d'échanges, sans échanges pas de division du travail et sans division du travail, pas de villes, pas de civilisation."
Les deux principes antagonistes du partage et de la propriété privée coexistent depuis.
Victoria souligne la différence qu'il y a entre partage obligatoire et partage volontaire, mais surtout entre les deux principes de redistribution :
"Le principe de redistribution faible, pour l'aide aux personnes nécessiteuses et le principe de redistribution forte pour l'égalité des chances et la volonté de garantir des conditions de vies minimales pour tous."
Or cette dernière redistribution "ne peut pas maintenir les motivations nécessaires aux actions entrepreneuriales sur le long terme", avec toutes les conséquences néfastes pour tout le monde. C'est pourtant la direction qu'ont prise les démocraties occidentales au cours de la dernière petite centaine d'années.
Il est clair que l'imposition à taux progressif conduit à une redistribution forte et qu'elle est clairement "dirigée contre les entrepreneurs les plus prospères (c'est-à-dire ceux qui rendent le plus de service à la collectivité) et est utilisée en faveur des moins imaginatifs et des moins actifs."
Demande-t-on leur avis à la minorité des plus riches ? Non. L'imposition à taux progressif est décidée par la majorité du plus grand groupe - celui des moins riches - contre l'avis du groupe minoritaire - celui des plus riches -, qui n'a pas voix au chapitre. Il y a incontestablement abus de pouvoir de la majorité et violation de l'Etat de droit :
"Elle prend de force ce qui est légitimement la propriété de quelqu'un".
L'imposition à taux progressif ne peut donc être équitable. Il est possible d'imaginer, sans peine, ce que serait le choix des plus riches entre une redistribution forte et une redistribution faible. Ils se prononceraient naturellement et justement en majorité en faveur de la seconde.
Victoria rappelle que "lorsqu'un individu est rémunéré pour ses efforts, le fruit de son travail devient sa propriété légitime" et qu'"une société dans laquelle l'incertitude ou la discrimination systématique des plus entreprenants et des plus prospères prévalent ne peut que péricliter à long terme". L'Etat de droit, qui "assure à chaque individu un traitement égal devant la loi" est là pour empêcher les interférences imprévisibles, pour reprendre l'expression de Hayek, que sont l'expropriation arbitraire, l'emprisonnement ou la perte de vie.
L'imposition proportionnelle serait équitable, puisqu'au moins elle ne violerait pas l'Etat de droit. Certes elle conduirait mécaniquement à une redistribution faible, mais :
"Il y a [...] de bonnes raisons de penser que [l'aide aux personnes nécessiteuses] serait réalisée plus efficacement au niveau local, avec l'aide de fondations caritatives financées volontairement , que par une bureaucratie centralisée".
Cette aide pourrait "s'avérer efficace et trouver l'approbation des plus riches".
En Suisse, par exemple, la flat tax respecterait même la Constitution fédérale qui "stipule que chacun doit contribuer aux finances publiques selon sa "capacité économique"". Enfin elle permettrait de remplir l'"obligation de rester vigilants face à l'imprévisible" :
"Il nous faut des entrepreneurs alertes et certains d'obtenir une juste récompense à leurs efforts pour nous aider à résister aux crises imprévues".
En conclusion :
"La défense de l'imposition proportionnelle s'apparente donc plus ou moins à celle de la liberté. En fin de compte, il s'agit ni plus ni moins d'assurer les conditions de la survie de notre civilisation".
Francis Richard
Pierre Garello, professeur d'économie à l'Université Paul Cézanne d'Aix-en-Provence, le 15 mars dernier, parle lui aussi de la flat tax :
Nous en sommes au
609e jour de privation de liberté pour Max Göldi, le
dernier otage suisse en Libye