Aujourd’hui une controverse oppose toujours ceux qui étaient favorables à l’adhésion à l’Espace Economique Européen et ceux qui y étaient hostiles.
Le proche 20ème anniversaire du rejet, le 6 décembre 2012, par le peuple suisse de l’EEE n’est pas étranger à cette effervescence médiatique et politicienne.
Christophe Darbellay, président du PDC, aurait même voulu l'autre jour que l'on revotât sur cet objet.
Quant à L'Hebdo du 29 novembre 2012, il est comme de juste du côté des nostalgiques de l’EEE.
Quels sont les arguments européistes de l’hebdomadaire romand?
- La voie bilatérale suivie par la Suisse recouvre 80% du contenu de l’EEE de 1992 et il a fallu batailler ferme pour obtenir ce résultat (comment est calculé ce pourcentage pifométrique de 80%, le journal ne le dit pas: il se contente de se réfugier derrière l’avis de René Schwok, un européiste convaincu).
- Le refus de l’EEE n’a pas profité à l’économie suisse pendant les dix ans qui ont suivi.
- L’immigration venue de l’UE n’a pas pillé les assurances sociales suisses.
- L’immigration venue de l’UE ne s’est pas traduite par du dumping salarial et une augmentation du chômage.
- Le rejet de l’EEE n’a permis qu’en partie de préserver la souveraineté de la Suisse.
Pourquoi, en admettant que ces arguments soient justes – ils le sont en partie –, la Suisse a-t-elle tout de même eu raison de ne pas accepter d’entrer dans l’EEE ?
- Parce que l’EEE n’est pas une véritable zone de libre-échange, mais une annexe pseudo- économique de l’UE (les 27 membres de l’UE sont d’office membres, indirectement, de l’EEE), destinée à contraindre, à moyen ou à long terme, ses membres à adhérer à l’Union. C’est ce qui s’est déjà passé avec l’Autriche, la Finlande et la Suède. Le Lichtenstein, l’Islande et la Norvège résistent encore.
- Parce qu’il est hérissé de réglementations bureaucratiques et autoritaires, automatiquement reprises par les pays membres non seulement dans des domaines économiques, mais également dans des domaines qui ne sont pas du tout du ressort d’un espace économique libre, tels que la politique sociale ou l’environnement.
- Parce que l’adhésion à l’EEE est assortie de contraintes financières que la voie bilatérale a permis de contenir quelque peu et qui permettent à des technocrates de faire des redistributions arbitraires en direction des pays de leur choix.
Si la Suisse avait adhéré à l’EEE, elle aurait donc été davantage à la merci de l’UE, qui est l’envers politique de cette médaille pseudo-économique, concoctée par des technocrates non élus et par des politiques qui se gardent bien de demander leur avis aux populations.
Certes la voie bilatérale est une voie étroite, laborieuse, mais elle permet de limiter les dégâts, face à un partenaire économique qui ne joue pas le jeu du libre-échange, qui est d’inspiration étatiste à grande échelle et qui essaie d’exercer sur la Suisse la loi du plus fort.
L’UE ne voudrait plus de la voie bilatérale, mais elle a plus à perdre qu’elle ne le dit à braquer la Suisse, qui est son troisième partenaire économique après les Etats-Unis et la Chine, et qui détient, seuil plancher de l'euro oblige, de fortes créances sur les deux membres du couple franco-allemand. C’est pourquoi la Suisse doit rester ferme et ne pas se laisser intimider par ce colosse constructiviste aux pieds d’argile.
Francis Richard