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2 mars 2013 6 02 /03 /mars /2013 20:00

 

Institut Libéral 28.02.13Le 28 février 2013, l'Institut Libéral organise à Genève une conférence sur un thème quelque peu obscur de prime abord: Souveraineté et concurrence des systèmes.

 

Les trois intervenants sont Jean-Pierre Roth, ancien président du directoire de la Banque nationale suisse, Edouard Cuendet, secrétaire général du Groupement des banquiers privés genevois, et François Schaller, rédacteur en chef de L'AGEFI. 

 

Le descriptif de la conférence est plus explicite:

 

"Cours plancher vis-à-vis de l'euro. Différends fiscaux avec l'UE et les États-Unis. Pressions réglementaires de l'OCDE instrumentalisée par le G20. La Suisse, qui dispose de l'important avantage institutionnel de sa non-appartenance à l'Union européenne tout en étant traditionnellement l'une des économies les plus ouvertes sur le monde, ne peut échapper aux bouleversements internationaux. Elle semble de moins en moins en mesure de faire appliquer son droit compétitif lorsqu'il apparaît entrer en collision avec les intérêts de grands États ou de cartels d'États. Quelles stratégies un petit pays peut-il développer à l'avenir pour préserver ses libertés et sa conception d'un État subsidiaire de proximité?"

 

Dans son introduction Pierre Bessard souligne que les petits Etats et les cités-Etats sont les plus à même de fixer des limites à la centralisation, de respecter le principe de subsidiarité et d'avoir dans le même temps un grand degré d'ouverture sur le monde. Le cas de la Suisse et de Singapour, par exemple.

 

Jean-Pierre Roth constate qu'Adam Smith a gagné sur Karl Marx, que le capitalisme est sorti vainqueur de son affrontement avec le communisme. Le capitalisme revêt toutefois plusieurs habits: il peut être rouge, comme en Chine, social-démocrate, comme en Europe, impérialiste, comme aux Etats-Unis. Il s'agit en fait d'oppositions de mises en forme.

 

La crise de l'euro résulte, selon lui, de problèmes de gouvernance. Tout le monde est monté dans un même bâteau sans qu'il n'y ait de pilote... L'euro a été un oreiller de paresse. C'est ainsi que l'Italie a perdu 20% de productivité par rapport à l'Allemagne depuis la création de la monnaie unique. Aussi la crise de l'euro n'est-elle pas une crise technique mais une crise des finances publiques, conséquence de la dilatation des régimes sociaux.

 

Dans ce contexte la Suisse a su préserver la qualité de sa monnaie en stabilisant les prix, en limitant l'inflation, même si elle a dû prendre des mesures de sauvegarde, telles que le cours plancher.

 

Sa stratégie doit se donner pour objectifs de:

 

- se maintenir au top de la qualité en matière de technologie, de recherche, de conditions cadres, de stabilité monétaire, de diversification des marchés;

- renforcer sa cohésion intérieure face aux attaques extérieures.

 

Edouard Cuendet expose que les attaques contre la souveraineté fiscale de la Suisse ne se font pas pour de nobles motifs, mais pour acquérir des parts de marché. La réglementation et le refus du libre-échange des services sont des moyens de parvenir à ces fins.

 

La FATCA, la législation américaine relative aux rapports entre l'administration fiscale, l'IRS, et les institutions financières, doit être observée par ces dernières sous peine d'exclusion du marché américain. Elle engendre des coûts prohibitifs et a une portée extra-territoriale...

 

La France de François Hollande remet en cause la convention successorale avec la Suisse (la taxation se fera au domicile fiscal des héritiers au lieu de celui du défunt), abolit unilatéralement les forfaits fiscaux, taxe les exilés fiscaux.

 

Sous prétexte de protéger les consommateurs l'Union européenne oblige les institutions financières de pays tiers à avoir un établissement dans un pays de l'UE pour pouvoir y proposer leurs services et menace de rétorsions les pays dont la fiscalité des entreprises serait trop faible (à Londres les taux sont certes élevés mais les assiettes d'imposition miniscules...).

 

L'OCDE a créé une organisation, le Global forum (sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales), qui détermine les conditions à remplir pour être conforme à la norme fiscale internationale. La Suisse reste bloquée à la première phase, en compagnie du Vanuatu, du Liban et des Emirats arabes unis, bien qu'elle ait conclu 40 accords de double-imposition: on lui reproche de ne pas en avoir conclu avec les grands Etats membres...tels que l'Italie hostile.

 

Edouard Cuendet suggère plus de fermeté. Les accords bilatéraux se sont montrés efficaces, mais il faut conclure des accords globaux et refuser le saucissonnage. A l'interne il faut faire davantage front et refuser l'autoflagellation: les Suisses seront respectés dans la mesure où ils se respecteront eux-mêmes.

 

François Schaller remarque qu'il n'y a jamais eu autant de démocraties sur la planète, mais que la démocratie est limitée par la Déclaration des droits de l'homme de 1945, par la solidarité, par le sauvetage de la planète...

 

L'unité de lieu n'est plus la nation mais le monde. L'égalité des nations est malmenée. Le Conseil fédéral et le Parlement ont fait ce qu'ils pouvaient, mais ils ont pu peu...

 

Pour François Schaller il faut réhabiliter l'égalité des nations en créant un forum international où des personnalités seraient invitées à débattre de cette thématique. Il est convaincu qu'un grand nombre de nations seraient intéressées, par exemple le Canada et l'Australie.

 

Il est préférable de porter le drapeau des petites nations plutôt que de s'obstiner à vouloir faire partie du G20 qui ne veut pas de la Suisse.

 

Comme les deux autres intervenants, il se désole du manque de cohésion de la Suisse, où, par exemple, la FINMA (Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers) désapprouve ouvertement le coussin conjoncturel préconisé par la BNS (Banque nationale suisse)...

 

Francis Richard

 

Co-publication avec lesobservateurs.ch

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11 octobre 2012 4 11 /10 /octobre /2012 21:30

CaliceoLe Cercle Frédéric Bastiat organise le samedi 6 octobre 2012 un dîner-débat sur le thème brûlant du Face à face islam chrétienté. 70 convives participent à ce dîner qui a lieu à Saint Paul-lès-Dax, à l'hôtel Caliceo. L'invité est Claude Sicard, agronome, docteur en économie, spécialiste du développement, auteur de deux livres sur l'islam, L'islam au risque de la démocratie et Le face à face islam chrétienté-Quel destin pour l'Europe ?.

 

En préambule Claude Sicard souligne que l'Europe est en déclin démographique, alors que les pays musulmans sont au contraire en expansion démographique. Aussi, selon lui, le printemps arabe n'est-il pas le résultat d'une aspiration à la démocratie mais d'un phénomène démographique: les populations des pays arabes souffrent de sous-emploi et se sont révoltées contre leurs dirigeants qui s'en mettaient plein les poches.

 

Cette poussée démographique se traduit par une arrivée massive d'immigrants de ces pays en Europe. L'un des signes les plus visibles en est la construction de mosquées: il y en a aujourd'hui 2'000 en France et il y en aura certainement beaucoup d'autres dans les années à venir.

 

Quels sont les risques de cette arrivée massive?

 

- Des risques d'attentat? L'orateur pense qu'ils sont minimes parce que les islamistes savent qu'ils ont pour effet de dresser l'opinion contre leur cause.

 

- Des risques de communautarisme? Ils sont réels et pourraient attenter à la cohésion nationale.

 

- Des risques d'instauration de la charia? L'orateur n'y croit pas.

 

- Des risques d'atteintes à la civilisation? Les populations de souche européenne s'y opposeraient. L'orateur pense aux Suisses qui ont voté contre la prolifération des minarets et à la France qui a interdit le port du voile à l'école et le port de la burqa pour des raisons de sécurité.

 

Pour introduire le débat Claude Sicard cite le philosophe François Jullien. Extrait de son livre Les transformations silencieuses:

 

"D'où vient que ce qui se produit inlassablement sous nos yeux, et qui est le plus effectif, est patent, mais ne se voit pas?"

 

Et l'ethnologue Claude Lévi-Strauss. Extrait de son Journal intime:

 

"Nous sommes aujourd'hui les protagonistes d'un phénomène assez paradoxal de l'histoire auquel l'islam me semble mêlé...J'ai commencé à réfléchir à un moment où notre culture agressait d'autres cultures dont je me suis fait le défenseur et le témoin.

 

Maintenant, j'ai l'impression que le mouvement s'est inversé et que notre culture est sur la défensive vis-à-vis de menaces extérieures, parmi lesquelles figure probablement l'explosion islamique. Du coup, je me sens fermement et ethnologiquement défenseur de ma culture."

 

Puis Claude Sicard donne les raisons actuelles de l'opposition entre islam et chrétienté, qui dure depuis 13 siècles...

 

LES RAISONS DOCTRINALES

 

Pour les musulmans le Coran est la parole immuable et incréée de Dieu. Moïse, Jésus, sont des prophètes inspirés de Dieu. L'islam est la religion de vérité qui doit triompher de toutes les autres. Jésus n'est pas le Fils de Dieu. Il n'est pas mort sur la Croix et la Sainte Trinité n'est que du polythéisme. Ces croyances chrétiennes résultent d'une falsification des Ecritures.

 

Si, pour les chrétiens, le Paraclet est le Saint-Esprit, pour les musulmans, c'est Mahomet. Les incroyants doivent être convertis. Les Juifs et les Chrétiens sont des dhimmis, c'est-à-dire des hommes de second rang, que les musulmans peuvent soumettre à des impôts très lourds.

 

L'homme doit se soumettre à la parole de Dieu. Le péché le plus grave est d'y désobéir. Il y a deux maisons sur Terre: le Dar al islam (maison de l'islam) et le Dar al harb (maison de la guerre). Le dijhad? C'est combattre dans le chemin de Dieu. Il y a le petit djihad qui a pour but de combattre les incroyants et le grand djihad qui a pour but de combattre ses mauvais instincts.

 

Le petit djihad est encouragé: les 4/5 du butin sont réservés aux combattants survivants et le paradis d'Allah est promis aux combattants qui périssent. C'est le petit djihad qui a fini par s'imposer comme "le" djihad 

 

Allah est le législateur. L'islam n'est pas seulement une religion. Le Coran est également un code civil et un code pénal. D'après ce code civil, il n'y a pas d'égalité homme-femme, le statut des dhimmis est fixé, et la fraternité entre musulmans doit prévaloir vis-à-vis des autres, même si l'un d'entre eux est coupable.

 

Pour les chrétiens, Mahomet est un faux prophète. Jésus a prêché un religion d'amour: aimez-vous les uns les autres. De ce premier commandement découlent l'égalité, la justice et la solidarité entre tous les hommes. Le religieux et le politique sont séparés. La relation se fait de l'homme à Dieu. La liberté de conscience prévaut et les conquêtes se font par l'exemple et non par la guerre.

 

Face à face islam chrétientéLES RAISONS HISTORIQUES

 

Alexis de Tocqueville écrit dans De la démocratie en Amérique:

 

"Quand le passé n'éclaire plus l'avenir, l'esprit marche dans les ténèbres."

 

Au VIIe siècle il y a deux mondes: l'empire romain et l'empire perse. Les musulmans partent à la conquête de ces deux mondes.

 

Damas est prise en 636, Jérusalem en 638, Alexandrie en 643, Tanger en 704, Gibraltar en 711. Si les musulmans sont arrêtés à Poitier en 732, ils prennent la Sicile en 826 et pillent Rome en 846. Entre le VIIIe siècle et le IXe siècle les conquêtes musulmanes s'étendent jusqu'à l'Indus. Au XIe siècle les Seldjoukides s'emparent de Konya en 1084 et d'Antioche en 1085.

 

Les croisades déclenchées à l'appel du pape Urbain II sont une riposte aux conquêtes musulmanes. Il s'agit de la reconquête de la Terre Sainte des chrétiens et de la reconquête de l'Espagne. C'est ainsi que Jérusalem est reprise en 1099 et que la présence chrétienne se concrétise en Terre Sainte sous la forme de quatre petits Etats. Les croisades se terminent deux siècles plus tard avec la chute de Jérusalem en 1291.

 

Si la Reconquista de l'Espagne s'achève avec la prise de Grenade en 1492, les Turcs envahissent l'Europe des Balkans en 1359. Constantinople tombe entre leurs mains en 1453. Vienne est assiégée une première fois en 1529 et une seconde fois en 1683.

 

Au XIXe siècle, la conquête de l'Algérie est destinée à mettre fin à trois siècles de piraterie, de 1515 à 1830, alors que les autres conquêtes coloniales de la France sont inspirées par une idéologie soutenue par la gauche, où l'Occident est investi d'une mission civilisatrice:

 

"La race supérieure ne conquiert pas pour le plaisir, dans le dessein d’exploiter le faible, mais bien de le civiliser et de l’élever jusqu’à elle." (Discours de Jules Ferry à la Chambre des députés, le 27 mars 1884) 

 

"L'œuvre civilisatrice qui consiste à relever l'indigène, à lui tendre la main, à le civiliser, c'est l'œuvre quotidienne d'une grande nation." (Discours de Jules Ferry au Sénat, le 6 mars 1891)

 

Les luttes pour l'indépendance au XXe siècle commencent dans les années 1920 et s'appuient sur l'islam...

 

LES RAISONS PSYCHOLOGIQUES

 

Alors que l'histoire montre que les musulmans sont sortis globalement vainqueurs en termes de conquêtes de territoires sur les chrétiens, ils éprouvent pourtant des rancoeurs à leur égard.

 

Les motifs qui reviennent le plus souvent sont les croisades, l'expulsion des Morisques d'Espagne en 1609, la colonisation, la création de l'Etat hébreu en 1947, le démantèlement de l'empire ottoman.

 

S'y ajoutent le "pillage des ressources" (pétrole), les promesses non tenues (accords Sykes-Picot de 1919), la non reconnaissance des apports à l'Occident de la civilisation musulmane.

 

Claude Sicard note, au passage, que la nationalité française a été accordée en 1865 aux musulmans d'Algérie à condition qu'ils renoncent à leur code civil. Ce que seulement deux mille d'entre eux acceptent à l'époque...

 

Quoi qu'il en soit, les musulmans se sentent humiliés, soumis à l'hégémonie de l'Occident, victimes d'injustices, en proie à un complot judéo-chrétien. Ils nourrissent une psychologie victimaire et revendicatrice.

 

Selon les musulmans la civilisation occidentale est arrogante, sans Dieu, immorale. C'est une civilisation de l'objet, où la polygamie est mal organisée. Ils ne comprennent pas comment cette civilisation matérialiste a pu devenir aussi puissante alors qu'elle ne reconnaît pas l'omnipotence de Dieu.

 

Le Directeur général de l'ISESCO (Islamic, Educational Scientific and Cultural Organization), le Dr Othman Altwaijri, estime qu'il faut trouver un équilibre entre le spirituel et le matériel et que l'islam est la civilisation de demain parce qu'il est une alternative à la culture de l'éphémère.

 

LES SCENARIOS CATASTROPHES

 

Les prévisions démographiques ne sont pas encourageantes. En moyenne européenne le taux de fécondité est de 1,36 enfant par femme. En 2050, 47% de la population devrait atteindre l'âge de la retraite et il devrait y avoir 1,4 actif pour 1 retraité. C'est pourquoi il est réaliste de prévoir qu'à ce moment-là 30 à 40% de la population sera de confession musulmane et qu'elle sera plus ou moins intégrée, d'autant que le Conseil de l'Europe recommande de respecter les différences culturelles...

 

Quatre scénarios catastrophes sont évoqués:

 

1) Les taches d'huile : les enclaves musulmanes s'étendent

2) La libanisation

3) La guerre intérieure

4) La troisième guerre mondiale

 

Claude Sicard ne croit à aucun de ces scénarios.

 

Il tente de donner une définition au mot de civilisation. Une civilisation est composée d'un corps sous la forme de réalisations matérielles et d'un esprit constitué d'un ensemble de croyances, de principes et de valeurs morales. C'est pourquoi une civilisation peut se caractériser par une identité propre et par une compréhension propre du monde. Répondraient à cette définition cinq civilisations: la Chine, le Japon, l'Inde, l'Islam et l'Occident.

 

A la base de chaque civilisation il y a une religion. Comme toute vie, une civilisation comporte quatre phases: naissance, expansion, déclin, mort.

 

Quels sont les rapports qu'entretiennent les civilisations entre elles? Pour Francis Fukuyama, elles convergent. Pour Claude Lévi-Strauss et Samuel Huntington, elles divergent.

 

Immigration massiveLES SCENARIOS POSSIBLES

 

La civilisation occidentale, hormis l'Amérique, est en déclin. Oswald Spengler, Albert Camus ou Paul Valéry l'ont écrit il y a un bon moment déjà.

 

Ce déclin correspond à une sortie de religion, à l'accès à la démocratie. Les hommes créent les lois et élaborent une déclaration des droits de l'homme.

 

La civilisation musulmane est en expansion. Il n'y a pas de sortie de religion. Il y a bien une déclaration musulmane des droits de l'homme, mais elle est en référence avec la charia.

 

Le philosophe Jean-François Mattéi, dans Le regard vide, dit que le regard européen est un regard dirigé vers le lointain, que l'Européen voue un culte à l'abstraction et qu'il fait l'éloge de l'infini.

 

A l'opposé, Hani Ramadan écrit que "l'homme baisse les yeux sur un texte révélé".

 

Le philosophe André Comte-Sponville dit qu'il ne croit pas en Dieu, mais qu'il transmettra les valeurs chrétiennes.

 

Quels sont donc les scénarios possibles?

 

1) La civilisation musulmane détruit la civilisation chrétienne

2) Les musulmans abandonnent leur civilisation

3) Un syncrétisme se fait entre les deux civilisations, ce qui donne un produit de synthèse et de dépassement.

 

Claude Sicard pense que ce dernier scénario est le plus probable. Mais qui connaît l'avenir? Le Père Michel Lelong lui a confié un jour qu'il préférait que l'Europe soit musulmane plutôt qu'athée...

 

Claude Sicard donne deux citations à méditer:

 

"Les civilisations ne meurent pas assassinées, elles se suicident." Arnold Toynbee

 

"L'arrivée massive des immigrés est le signe que l'on trouve dans toutes les civilisations en déclin." Caroll Quigley

 

Claude Sicard pense encore que l'on a tort de distinguer les islamistes des musulmans tempérés, parce que le message est dans le Coran. Les musulmans sont piégés par le fait que la parole de Dieu organise tout. En conséquence personne ne sait comment réformer l'islam.

 

L'ISLAM EST-IL REFORMABLE?

 

Cela dit, l'islam de l'Indonésie est un islam réformé et l'oeuvre de Mustafa Kemal en Turquie est partie du constat que l'islam était la cause de la décadence de son pays. Ce qui lui a fait adopter le code civil suisse, le code pénal italien et le code de commerce allemand.

 

De plus l'évolution vers un islam modéré peut être facilité par le droit reconnu aux musulmans qui se trouvent dans un pays situé en dehors du Dar al islam de ne pas respecter tous les interdits de l'islam.

 

Au sujet du printemps arabe, Claude Sicard est convaincu que les islamistes qui ont pris le pouvoir échoueront sur le plan économique.

 

Jacques de Guenin, fondateur du Cercle Frédéric Bastiat, fait remarquer qu'un syncrétisme devrait être facilité par le progrès de la pensée rationnelle et par la différence entre l'évangile et le Coran. Autant l'évangile est lumineux pour n'importe quel lecteur, autant le Coran, dont il lit des sourates tous les jours, est incohérent, mal organisé et mal écrit. La solution ne serait-elle pas de faire lire l'évangile aux musulmans?

 

Patrick de Casanove, président du Cercle Frédéric Bastiat, rappelle que le libéralisme est avant tout une éthique de la liberté, qu'il est ouvert à toutes les cultures et qu'il pourrait donc bien réconcilier les contraires. A condition bien entendu que les Français non musulmans prêchent d'exemple. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

 

Certes, mais n'est-ce pas les femmes musulmanes, ou non, parce qu'elles sont plus nombreuses que les hommes, et les premières intéressées, qui permettront l'évolution vers un islam modéré, comme le suggère une participante?

 

Francis Richard

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6 septembre 2012 4 06 /09 /septembre /2012 21:50

023L'été fleurissent les universités ... d'été.

 

Mais, comme le disait George Orwell à propos des cochons, dans Animal farm , il y a des universités plus égales que les autres.

 

Il y a celles dont on parle, celle du PS, de l'UMP, du MEDEF, que sais-je, et celle que l'on passe sous silence, un silence assourdissant.

 

Hormis dans la presse régionale, il n'y a donc eu aucun écho, à ma connaissance, dans la presse française, non plus que dans la presse internationale, sur la 33e Université d'été de la Nouvelle Economie , qui s'est tenue du 26 au 29 août 2012 à l'Université Paul Cézanne d'Aix-en-Provence.

 

Le thème était pourtant porteur, voire provocateur aujourd'hui, parce qu'anti-socialiste : Libre-échange et progrès social . Il faut croire que la culture étatiste, dont Patrick de Casanove dit qu'elle est héréditaire en France, mais en tout cas pas génétique, a encore de beaux jours devant elle dans ce beau pays, pour son malheur.

 

L'Etat providence est pourtant condamné à mort, même si ses profiteurs ne le savent pas encore. C'est pourquoi cette université d'été fera date, parce qu'elle se situe à l'avant-garde des idées. On pourrait penser qu'arrivée à sa trente-troisième édition elle n'est plus de prime jeunesse, mais il n'en est donc rien.

 

DIMANCHE 26 AOUT 2012

 

P Nemo

Comme la libre économie reste méconnue des médias et des universités tout court en France, elle est on ne peut plus nouvelle, c'est-à-dire qu'il s'agit toujours d'une terre nouvelle à découvrir dans un pays devenu entièrement socialiste, comme l'a dit d'emblée le philosophe Philippe Nemo [photo ci-contre] lors du dîner inaugural à l'Hôtel du Roi René.

 

Pour Philippe Nemo il n'y a effectivement rien à attendre ni de l'ancienne majorité, ni de l'actuelle, qui ni l'une ni l'autre ne défendent les droits de propriété, sans lesquels il n'est pourtant pas de liberté.

 

L'impôt n'est pas le vol s'il y a contrepartie

 

Les impôts sont un critère pour déterminer si une société est libre ou non. A l'exception de libertariens et des anarcho-capitalistes, l'impôt n'est pas considéré comme un vol par les libéraux, à la condition toutefois qu'il ait une contre-partie.

 

L'impôt n'est pas un vol quand il est proportionnel si le service rendu dépend de l'usage, et n'est pas un vol quand il est le même pour tous si le service rendu est indépendant de l'usage : le vol perpétré contre un riche n'est pas supérieur à la vie d'un pauvre...

 

Il n'en est pas de même quand l'impôt est progressif ou quand il ne se justifie pas autrement que par la possession de fortune. Il s'agit alors de spoliation, suivie de partage de ces vols légaux (qui pour être légaux n'en sont pas moins des vols), à l'instar des voleurs qui se partagent leurs rapines.

 

Que faire? Opposer au socialisme les différentes doctrines libérales en matière de philosophie, d'économie, de politique. Comment? Par la conquête de la recherche scientifique, de l'éducation, des médias. A ce dernier sujet, les agences de pub étant passées à gauche, il faut créer des agences de pub libérales...suggère Philippe Nemo.

 

LUNDI 27 AOUT 2012

 

Le libre-échange a permis une croissance sans précédent

 

V Curzon Price E ColombattoVictoria Curzon-Price dresse le bilan de la libéralisation progressive des échanges au cours du dernier siècle, plus particulièrement depuis les 60 dernières années. Certes il y a toujours des entraves, mais le marché devenu mondial en profite tout de même.

 

Cela ne s'est pas fait sans mal. Cela s'est cependant traduit par un développement économique sans précédent, où l'aide du fameux Plan Marshall n'a pas joué grand rôle.

 

Les chiffres parlent d'eux-mêmes :

 

- le taux de croissance a été de 5 à 10% pendant 20 à 30 ans;

- tous les pays en ont profité, hormis ceux qui vivaient en autarcie, tels que la Corée du Nord...

 

La richesse mondiale a été multipliée par 7 depuis 1900; l'augmentation de la population par 5 sur la même période. La population mondiale vit "assez bien": un Mexicain moyen d'aujourd'hui vit aussi bien qu'un Anglais moyen en 1955; la mortalité infantile au Népal aujourd'hui est égale à celle de l'Italie de 1955.

 

En résumé le libre-échange a permis à la fois d'élever le niveau de vie et d'augmenter la population.

 

Sur les 45 dernières années les proportions de produits de base et de produits manufacturés échangés ont évolué en sens inverse. En 1963 les produits de base, PB, représentaient 89% des échanges et les produits manufacturés, PM, 11%; en 2009 les premiers représentaient 36% et les seconds 64%.

 

En valeurs absolues la progression est vertigineuse: les échanges de PB s'élevaient à 28,5 milliards de dollars en 1963 et à 1'702 milliards en 2009; ceux de PM à 3,5 milliards de dollars et à 3'253 milliards respectivement.

 

Les politiciens français sont tous protectionnistes

 

JP FeldmanJean-Philippe Feldman rappelle que le libre-échange se définit par la libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes, laquelle est loin d'être vraie de nos jours.

 

Quand Stefan Zweig accomplit son tour du monde, avant la deuxième guerre mondiale, il peut le faire sans présenter nulle part le moindre document... Ce qui est tout simplement impossible de nos jours.

 

Les candidats, lors de la dernière campagne présidentielle française, se sont tous prononcés pour du protectionnisme: les extrêmes de gauche et de droite pour la suppression pure et simple du libre-échange, les autres candidats pour sa régulation sous forme de réciprocité commerciale, c'est-à-dire pour un protectionnisme qui n'ose pas dire son nom. Dans Droit, législation et liberté, Friedrich Hayek disait que, lorsque les mots perdent leur sens, les hommes perdent leur liberté...

 

Cette résurgence du protectionnisme dénote une ignorance économique. Ce ne sont pas les Etats qui commercent entre eux, mais des particuliers. Aussi convient-il de défendre le libre-échange sur le terrain du droit, puisqu'il s'agit d'une extension du droit de propriété, et sur le terrain de la morale, puisque le protectionnisme privilégie des producteurs au détriment d'autres producteurs et de tous les consommateurs.

 

La collectivisation des concepts conduit à des erreurs

 

Pascal Salin rappelle ce qu'est le principe de l'échange libre: il se passe entre deux personnes qui y trouvent chacune leur intérêt, qu'il y ait une frontière entre elles ou non. Il y a double gain dans le libre-échange: un gain statique entre deux personnes et un gain dynamique qui résulte de la concurrence, qui, comme le disait Friedrich Hayek, est un processus de découverte.

 

En critiquant le libre-échange les tenants du protectionnisme se focalisent sur les pertes plutôt que sur les gains, tant il est vrai qu'il est plus facile de défendre des intérêts spécifiques que des intérêts diffus. Mais, comme il est impossible de protéger tout le monde, certains sont protégés au détriment de tous les autres.

 

La collectivisation des concepts de l'échange est à l'origine d'erreurs communes. Elles se caractérisent par leur caractère abstrait et par la relativisation des idées. Il en est ainsi des externalités négatives ou de la théorie de l'avantage comparatif de David Ricardo, qui ne rendent pas compte de la valeur subjective caractérisant l'échange libre entre deux personnes.

 

La protection d'industries dans l'enfance est une autre erreur commune. C'est au producteur d'actualiser ses gains futurs pour déterminer si l'activité dans laquelle il se lance sera rentable ou non. Enfin la concurrence pure et parfaite est absurde: un marché est toujours imparfait et chaque producteur doit se différencier pour vendre ses produits. C'est ce qui se produit avec la mondialisation où la réalité des différenciations s'oppose à la volonté d'harmonisation des politiques.

 

Pascal Salin conclut que l'attachement à la liberté des échanges est une exigence morale et que l'approche utilitariste peut être utile à sa défense, même si l'approche éthique reste fondamentale.

 

A l'origine de la crise de 29, l'abandon de l'étalon-or et le protectionnisme

 

F Aftalion P NemoFlorin Aftalion est à la fois historien et économiste.

 

Les grandes dates, qui ont précédé la crise de 1929 sont l'abandon de l'étalon-or en 1914, qui a pourtant assuré la stabilité des monnaies pendant les deux siècles précédents; le remplacement de l'étalon-or en 1922 par le régime de l'étalon de change-or, où les monnaies européennes sont gagées sur l'or, la livre sterling et le dollar.

 

Entre 1914 et 1922, les prix ont considérablement augmenté et revenir aux parités de 1914 nécessite pour la plupart des pays, y compris l'Angleterre, de pratiquer des politiques déflationnistes. Les Etats-Unis, au contraire, sont en expansion de 1921 à 1929 jusqu'au krach de Wall Street et accordent aux autres pays des crédits à taux faibles pendant cette période.

 

Le président Herbert Hoover, entré en fonction en début de l'année 1929, signe en juin un premier acte protectionniste, l'Agricultural Marketing Act , en faveur des agriculteurs américains qui souffrent de surproduction depuis la fin de la guerre. Ce qui provoque des représailles de la part des pays qui exportent vers les Etats-Unis dans certains domaines agricoles. Conséquence: les baisses des importations sont faibles, tandis que les baisses des exportations américaines sont considérables.

 

L'année suivante, il signe le Smoot-Hawley Act  qui, cette fois, protège l'industrie américaine en augmentant fortement les tarifs douaniers, avec pour effet de provoquer des représailles de tous les autres pays, qui sont ruineuses et d'une tout autre ampleur qu'en matière agricole. Parallèlement à ce protectionnisme il augmente les impôts, creuse les déficits, se lance dans la construction d'un grand barrage - le Hoover Dam.

 

Grâce à ces mesures étatistes, protectionnistes, la crise déploie tous ses effets: la masse monétaire se contracte de 25% entre 1929 et 1932, le commerce mondial est divisé par deux sur la même période, le taux de chômage atteint 25% en 1933.

 

Le dumping

 

A Mathieu G LanePierre Garello montre que le dumping - vendre en-dessous du coût de production pour faire des profits à long terme et se trouver finalement en situation de monopole - n'existe pas.

 

C'est une idée folle, parce que cela suppose d'avoir les reins sacrément solides dans un monde où les marchés évoluent sans cesse et de plus en plus vite, où nombre de produits ont une durée de vie très courte.

 

Le dumping fiscal est le nom que donnent à la concurrence fiscale les perdants de cette concurrence, qui font tout pour la réguler, avec pour but de la supprimer, avec l'aide de Bruxelles et de l'OCDE sous couvert d'harmonisation fiscale.

 

Alain Mathieu montre que le dumping social n'existe pas. Dans le prix des produits des pays émergents, les achats représentent 50%, les salaires de 15 à 20% et le reste les impôts, les transports, l'énergie.

 

Georges Lane expose qu'en 2003 le salaire brut en France était inférieur à la moyenne des 15 pays de l'Europe et même des 25, tandis que les cotisations sociales en France lui étaient supérieures. Une harmonisation se traduirait par une augmentation des salaires complets de tous les pays de l'Europe des 15 ou des 25.

 

MARDI 28 AOUT 2012

 

La mondialisation de la demande, la délocalisation de l'offre

 

Axel Arnoux fait part de son expérience de chef d'entreprise depuis 30 ans. Le groupe Chauvin-Arnoux existe depuis 1893. Il a 10 filiales dans le monde - en Europe, en Chine, aux USA - dont une au Liban, qui marche bien... Ses effectifs sont de 1'100 personnes, dont 800 en France.

 

Axel Arnoux prend l'exemple d'un wattmètre aux 1'500 composants, dont le prix moyen est de 3'000 €, qui est le fruit de 20'000 heures de recherche et qui est produit en 2-3 heures. Le marché français est de seulement 200-300 appareils par an. Il est vendu à plusieurs milliers d'exemplaires dans le monde et 2/3 des fournitures proviennent du monde entier...

 

Le groupe, qui a perdu 90% de ses effectifs en 30 ans, aurait disparu s'il n'avait pas délocalisé, s'il n'avait pas innové, s'il ne s'était pas adapté aux besoins locaux (grâce à ses bureaux d'achats délocalisés), s'il n'avait pas conçu des produits standards adaptables.

 

Le libre-échange est un processus de découverte

 

P garello A Arnoux JP FeldmanComme la concurrence, le libre-échange est un processus de découverte. Pierre Garello montre deux courbes, celle des échanges commerciaux depuis l'origine des temps et celle des mêmes échanges commerciaux depuis 1700. Sur la première courbe un premier point d'inflexion se situe après 1300, sur la deuxième courbe l'inflexion est nette en 1919 et encore plus nette en 1944, date à partir de laquelle les échanges explosent.

 

Le libre-échange résulte d'un ordre chaotique, ce que Friedrich Hayek appelait la catallexie. La main invisible d'Adam Smith s'oppose à la main qui oblige à acheter. Un entrepreneur, pour s'enrichir, doit découvrir ce dont les gens ont besoin et comment il peut les satisfaire. Pour cela il a besoin de signaux. Ce sont les prix et les profits, qui l'obligent à s'ajuster sans cesse. Pour ce faire il faut que l'échange soit libre, sans quoi il lui est impossible de saisir une opportunité là où il y a un manque.

 

Le libre-échange est un facteur de développement

 

Emmanuel Martin souligne le lien entre libéralisation des échanges et croissance économique. Pour que le libre-échange produise la croissance, encore faut-il qu'il y ait continuité de ce libre-échange et qu'il s'inscrive dans des réformes plus larges. Ainsi le climat des affaires, l'environnement fiscal, l'incertitude juridique, l'incertitude institutionnelle jouent-ils un rôle. Il faut que tout soit fait en même temps pour être en mesure d'en récolter les fruits.

 

C'est pourquoi Israël, en dépit de son ouverture, pâtit de la protection qu'il accorde à ses producteurs; c'est pourquoi le Mexique pâtit de sa politique monétaire; c'est pourquoi la Corée du Sud et Taïwan pâtissent des stimulations économiques, auxquelles ils se livrent.

 

Emmanuel Martin observe, tout comme Pascal Salin, que la collectivisation du concept d'échange a pollué le raisonnement et conduit à substituer le concept de rareté (David Ricardo) à celui d'opportunité (Adam Smith). Dans le premier cas le présupposé est que les hommes sont tous différents, sans quoi ils n'échangeraient pas, dans le deuxième cas on part de l'idée que les hommes sont tous pareils et qu'ils cherchent dans l'échange un avantage, ou à créer un avantage, ce qui se traduit par une création de valeur.

 

Compétitivité et concurrence fiscale

 

JP Delsol JP Feldman A MathieuJean-Philippe Delsol décrit les solutions apportées par les uns et les autres, en France, pour remédier à la dégradation de la balance commerciale, qui pèse sur le déficit de la balance des paiements.

 

La TVA sociale de Nicolas Sarkozy visait ainsi à empêcher que les produits étrangers ne viennent en France, de même que la taxation des transactions financières. L'exit tax était destinée à empêcher les délocalisations.

 

Les socialistes veulent en lieu et place augmenter la CSG, c'est-à-dire réduire les charges sociales en les augmentant... sans abandonner pour autant la taxation sur les transactions financières.

 

Pourquoi ces mesures inutiles à long terme? Parce que cela peut avoir quelques effets à court terme, parce que cela focalise l'attention sur des boucs émissaires tout trouvés: l'étranger, le riche, l'entreprise...

 

L'autre raisonnement, keynésien, est de faire du déficit budgétaire pour augmenter l'épargne disponible conformément à la règle du double déficit selon laquelle l'épargne moins l'investissement plus le solde budgétaire public est égal au solde de la balance des paiements courants. Ce faisant, l'épargne mobilisée n'est plus disponible pour les investissements privés.

 

De plus, quand le déficit budgétaire augmente, les taux d'intérêt aussi, de même que les coûts. Ce qui préfigure une augmentation des impôts demain, auquel il convient de faire face en épargnant dès aujourd'hui.

 

Pour favoriser l'échange il faut donc au contraire réduire les déficits, non pas en augmentant les impôts mais en engageant des réformes structurelles, c'est-à-dire en changeant de modèle social (assurances au lieu de taxation) et de modèle fiscal (plus de simplicité et une fiscalité raisonnable, ordonnée aux personnes).

 

Compétitivité et modèle social

 

Alain Mathieu remarque que le solde du commerce extérieur est de - 3,5% en France et de + 6% en Allemagne.

 

Quels sont les facteurs de compétitivité? Les coûts et les hors-coûts (qualité, SAV, réseaux commerciaux, innovation, taille de l'entreprise...).

 

A partir de la publication des auditions d'une étude non publiée, dont les rapporteurs étaient Jérôme Cahuzac et Pierre Méhaignerie, Alain Mathieu a pu reconstituer pourquoi les entrepreneurs français sont devenus moins compétitifs que les entrepreneurs allemands:

 

- les charges sociales employeur représentent 20% du salaire brut en Allemagne et 40% du salaire brut en France

- les prélèvements obligatoires sont inférieurs en Allemagne de 10 points de PIB: 6% proviennent de la rémunération des fonctionnaires, 1,3% des dépenses de logement (50% des HLM ont été privatisés en Allemagne), 0,4% des dépenses de santé (la convergence des tarifs public-privé est effective en Allemagne).

 

C'est donc l'augmentation des coûts qui fait la différence de compétitivité entre la France et l'Allemagne.

 

MERCREDI 29 AOUT 2012

 

Le protectionnisme monétaire

 

Photos-diverses-557.JPG Jacques Garello rappelle que l'échange peut se faire sans monnaie. C'est le troc. Mais cela ne va pas bien loin. D'où la création de monnaie pour le faciliter.

 

La monnaie peut être nationale ou non. La monnaie est une rente. C'est la rémunération d'un service. Mais dévaluer une monnaie peut rapporter beaucoup plus gros que la seule rémunération du service rendu.

 

La monnaie nationale peut être fixée directement à l'or (gold standard) et s'exprimer en poids d'or, ou être fixée indirectement à l'or via une autre monnaie convertible en or (gold exchange standard): jusqu'en 1971 l'once d'or valait ainsi 35 $.

 

Qu'est-ce que la dévaluation d'une devise? Un vol opéré sur les détenteurs de la devise en question:

 

"Si je dois de l'argent aux autres c'est que je ne suis pas assez compétitif."

 

Alors la solution de facilité, qui est une forme de protectionnisme, est de dévaluer. Comme tous les protectionnismes, c'est inefficace.

 

En fait l'émission de monnaie est toujours une créance. On ne lui fait confiance que si la créance est solide. C'est pourquoi la concurrence des monnaies est bénéfique. Elles devraient même être déconnectées des Etats et redevenir privées. Car l'avenir est à un système financier et monétaire sous la responsabilité des émetteurs.

 

La mondialisation s'oppose à la souveraineté des Etats

 

Carlo Lottieri rappelle cette vision selon laquelle là où il y a société il y a Etat. La rupture s'est produite à la fin du Moyen-Age qui était un univers très complexe. Les traités de Westphalie ont reconnu les Etats. A partir de là ces derniers ont tous poussé à la centralisation.

 

Avec la mondialisation la propriété est de retour. Les entreprises et les individus se déplacent. Il en résulte un conflit entre la mondialisation et les Etats, qui s'unissent progressivement, à la faveur de l'idéologie des droits humains, typiquement européenne, et qui se traduit par une perte du goût de la liberté et du risque.

 

Aussi la crise n'est-elle pas globale, mais spécifiquement européenne. L'Europe devient une forteresse étatiste à la centralisation de laquelle ne s'opposent que les nationalistes.

 

Comme les parasites sont en plus grand nombre que les producteurs, la crise désastreuse qui en résulte pourrait bien être une opportunité pour aller vers un libre-échange européen, sans les directives...

 

L'Union européenne est un cartel d'Etats

 

V Curzon Price E ColombattoEnrico Colombatto ne voit pas d'inconvénient à la constitution de cartels privés - ce ne sont que des accords -, à la condition, toutefois, bien entendu, qu'ils n'empêchent pas le libre accès à d'autres entreprises sur leur marché.

 

Il n'en est pas de même des cartels étatiques, tels que l'Union européenne. Car ils organisent la violence étatique. 

 

Ces cartels exerce leur violence dans trois domaines:

 

- la réglementation en édictant des règles communes;

- les impôts en se donnant pour but l'harmonisation fiscale qui se heurte cependant à l'accord unanime de l'augmentation des impôts et surtout à la répartition des dépenses une fois levés ces impôts;

- la monnaie (la vraie monnaie est un moyen d'échange qui inclut des contreparties solides; la fausse ne vaut que le papier dont elle est faite) en obligeant à accepter leur valeur arbitraire, le cours légal.

 

Le problème de l'euro est qu'il permet à la banque centrale européenne d'imprimer autant de monnaie qu'elle veut et de la transférer à qui elle veut, notamment aux mauvaises banques européennes, puis aux fonctionnaires, ce qui revient à socialiser les dettes publiques.

 

Il y a en effet trois moyens de lutter contre un déficit budgétaire:

 

- en levant des impôts;

- en réduisant les dépenses;

- en imprimant de la monnaie.

 

La seule sortie possible est d'admettre que ceux qui ont dépensé trop doivent faire faillite. Un Irlandais ne disait-il pas: "Le capitalisme sans la faillite, c'est comme le christianisme sans l'enfer"?

 

Les pauvres existeront toujours, libre-échange ou pas

 

Bertrand Lemennicier ne connaît pas de définition exacte des pauvres. Il y a plusieurs façons de les compter suivant le concept adopté. Les moines et les clochards sont-ils des pauvres? Un pauvre dans un pays est un riche dans un autre.

 

Quand des modifications interviennent les inégalités peuvent s'accroître. Elles ne se réduisent que lorsqu'il y a compétition. N'importe qui peut être économiste... ce qui n'est pas le cas d'un juriste ou d'un médecin.

 

Le libre-échange est d'abord éthique

 

Jacques Garello et Gérard Bramoulle Aix 2012Jacques Garello, au contraire des utilitaristes, défend le libéralisme non pas pour son efficacité mais pour son éthique.

 

Le libre-échange est une libération, puisqu'il permet de se libérer d'un territoire (70% des échanges sont des échanges de services) et puisqu'il permet à chacun de s'accomplir:

 

 "Deviens ce que tu es", disait Jean de La Croix.

 

Le libre-échange est une découverte puisqu'un terrien sur sept visite un pays qui n'est pas le sien et puisque la base de l'échange est le service rendu aux autres: "L'économie, c'est le service des autres" (Frédéric Bastiat).

 

Le libre-échange est harmonie, qui est différente de l'équilibre puisque chacun est un exécutant et puisque la main invisible est le chef d'orchestre. La plus grande conséquence de la mondialisation est que les pays pauvres le sont devenus un peu moins, hormis les pays dictatoriaux où les dirigeants ne sont pas rémunérés pour les services qu'ils rendent mais pour les vols qu'ils commettent.

 

Le libre-échange est espoir. Ce n'est pas le choc des civilisations de Samuel Huntington (il y a plusieurs cultures, mais une seule civilisation) ni la fin de l'histoire de Francis Fukuyama: les deux ont tort, l'un par l'analyse, l'autre par optimisme. Le libre-échange est une promesse de paix universelle.

 

"Faisons la liberté, la liberté fera le reste", disait Jean-Marc Varaut.

 

La meilleure politique est d'ouvrir unilatéralement les frontières au marché

 

Lawrence White est le seul intervenant à s'exprimer en anglais cette année. Ce qu'il dit n'en est pas moins décapant, à l'opposé des idées reçues.

 

En 1999 le sénateur d'Amato interroge Milton Friedman et lui demande ce qu'aurait pensé Adam Smith du déficit des échanges. L'économiste lui répond que la meilleure politique est d'ouvrir unilatéralement les frontières au marché.

 

La métaphore de Johan Robinson illustre cette déclaration: "Que quelqu'un lance des cailloux dans son propre port pour empêcher des bateaux d'entrer est ridicule."

 

Le commerce international reste un commerce entre des personnes. Il faut qu'elles y trouvent chacune un intérêt et que ce commerce soit volontaire. A ce moment-là c'est bénéfique pour les deux parties.

 

Ford s'oppose au libre-échange avec la Corée du Sud en disant qu'il est inéquitable que le nombre des voitures coréennes vendues aux Etats-Unis soit de 476'833 tandis que le nombre des voitures américaines vendues en Corée du Sud est de 5'878. Ceux qui prétendent ne pas être protectionnistes utilisent cette rhétorique de l'échange équitable, alors que n'importe qui peut dire qu'il est préférable d'acheter quelque chose moins cher que de le faire soi-même plus cher.

 

Dans sa Pétition des marchands de chandelles , Frédéric Bastiat parlait de bloquer les rayons du soleil pour donner du travail à un tas de gens...

 

Autre exemple de sophisme: il y a un gros opéra à Paris qui est une grande ville; si on en construit un à Aix-en-Provence, elle deviendra également une grande ville...

 

Francis Richard

 

NB

 

Ce compte-rendu de la 33e Université d'été de la Nouvelle Economie n'est pas exhaustif. Il ne prétend à rien d'autre que d'en donner une idée, la plus juste possible. Il est destiné aux libéraux qui n'ont pas pu faire le voyage, aux non libéraux pour qu'ils aient un aperçu de ce qui s'y est dit puisqu'ils ne trouveront aucune trace de cet événement dans leurs médias préférés.

 

En dehors des débats, qu'il était difficile de résumer, j'ai omis volontairement de parler des présentations de livres. En voici la liste dans l'ordre de présentation (avec le lien pour certains d'entre eux vers l'article que je leur ai déjà consacré peu ou prou sur ce blog, me réservant la possibilité d'en écrire un ultérieurement sur les autres ou plus approfondi sur ceux déjà évoqués):

 

Esthétique de la liberté, Philippe Nemo (à paraître en octobre 2013) aux PUF

Crise, Dépression, New Deal, Guerre, Florin Aftalion, 144 pages, Economica

Le dictionnaire du libéralisme, sous la direction de Mathieu Laine, 640 pages, Larousse (évoqué ici)

A quoi servent les riches, Jean-Philippe Delsol avec Nicolas Lecaussin, 238 pages, JC Lattès (rendu compte ici )

25 millions de propriétaires, Jean Perrin, 120 pages, Editions TME

Ces mythes qui ruinent la France, Alain Mathieu, 192 pages, Editions du Cri (évoqué ici)

La sécu: comment faire mieux, Patrick de Casanove, 176 pages, Tatamis (rendu compte ici)

 

Article reproduit par lesobservateurs.ch le 4 octobre 2012

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10 juillet 2012 2 10 /07 /juillet /2012 21:15

Patrick-de-Casanove.JPGPour la quatrième année consécutive, le Cercle Frédéric Bastiat ici, présidé par Patrick de Casanove [photo ci-contre], organisait du 6 au 8 juillet 2012 un week-end de la liberté.

 

Avec le concours de l'ALEPS ici, de Contribuables Associés ici, de Liberté Chérie ici, de l'Institut Coppet ici et de l'iFRAP ici.

 

Le thème de cette année était la responsabilité. Vaste programme.

 

Lors du dîner-débat du 6 juillet, il revient à Alain Laurent de définir ce qu'est la responsabilité individuelle.

 

L'orateur rappelle que, si l'expression de responsabilité individuelle est employée pour la première fois par Frédéric Bastiat, le concept existe bien avant lui. Pour Aristote le coupable est responsable de son ignorance. Pour un chrétien chacun est responsable de son salut. Pour Kant il n'est pas de responsabilité sans autonomie de la volonté.

 

Alain Laurent fait remarquer que responsable vient du verbe latin respondere qui signifie répondre de ses actes et de spondere qui signifie se porter garant et qui a donné spontané et sponsor. Il cite encore Ayn Rand et le fondement objectif de la causalité de la liberté, Nietzsche et l'empire sur soi-même, Saint-Exupéry et le renard qui dit au Petit Prince qui l'a apprivoisé: "Tu es responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé".

 

Alain Laurent insiste sur la distinction entre responsabilité individuelle qui est une notion générale, et traditionnelle dans le vocabulaire libéral, et responsabilité personnelle qui est la responsabilité propre que chacun exerce en particulier.

 

Le matin du 7 juillet Vincent Ginocchio parle de politique agricole et responsabilité.

 

La PAC, Politique agricole commune, représente 30% du budget européen. Ses objectifs sont d'assurer un revenu décent aux agriculteurs, de lutter contre la désertification des campagnes, de compenser les variations des prix mondiaux, de fournir aux consommateurs une sécurité alimentaire et de protéger l'environnement.      

 

En France la mainmise des SAFER, Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural, sur les terres agricoles, avec leur droit de préemption et leur volonté de maintenir les prix bas, a des effets pervers. Beaucoup de gens incompétents se lancent dans des projets non viables. Les propriétaires ne sont pas incités à vendre ou ne peuvent plus vendre etc. Il en résulte qu'elles sont d'une faible rentabilité.

 

Pour stabiliser les prix agricoles plusieurs mécanismes sont mis en oeuvre: subventions, droits de douane, jachère obligatoire, prix d'intervention, compensations entre prix européens et prix mondiaux (baptisées pudiquement restitutions).

 

Il s'agit donc d'interventions publiques destinées à protéger, qui, au final, ne protègent rien du tout mais déresponsabilisent.

 

Car quels sont les résultats ? Les exploitations agricoles sont peu rentables et disparaissent. Les investissements sont mauvais parce qu'ils ne sont fait qu'en fonction des subventions qu'il est possible d'obtenir. La quantité prime sur la qualité. Les consommateurs paient deux fois les produits agricoles, en les achetant et en contribuant aux subventions dont ils bénéficient. Les pays pauvres subissent une concurrence "déloyale". L'environnement est dégradé.

 

Au sujet des subventions il n'est pas surprenant de noter que seuls 10% des agriculteurs reçoivent des subventions et que les 24 premières entreprises subventionnées en France ne sont pas des exploitations agricoles. Les premiers bénéficiaires sont en effet le Groupe Doux (qui a récemment déposé son bilan...), LVMH, Rotschild, Dassault, Grimaldi...

 

Pour s'en sortir? Il faut ouvrir les frontières européennes à la concurrence, ce qui devrait se traduire par une baisse des prix de l'ordre de 25%. Il faut supprimer les subventions et les quotas et rendre les agriculteurs responsables. Impossible? La Nouvelle Zélande l'a fait et son agriculture est aujourd'hui florissante.

 

Patrick de Casanove, qui est médecin, s'exprime sur politique de santé et responsabilité individuelle

 

La sécurité sociale coûte toujours plus cher et rembourse de moins en moins. Les urgences sont engorgées et des régions sont devenus de véritables déserts médicaux.

 

Cercle-Bastiat.jpgPatrick de Casanove préconise donc de limiter le rôle de l'Etat et de restituer aux individus les moyens d'assumer leur vie et leur responsabilité individuelle. Comment? En remplaçant les 6 ou 7 cotisations de la sécurité sociale par une seule cotisation correspondant au contrat d'assurance privée qu'ils souscriront et qui sera d'un coût nettement moins élevé. Autrement dit en privatisant la sécurité sociale.

 

La liberté des prix permettra de faire la distinction entre les médecins qui soignent, et examinent, et ceux qui se contentent d'être des distributeurs d'ordonnances.

 

Les médecins seront librement choisis non pas en fonction de critères technocratiques déterminés par un organisme étatique mais en fonction du meilleur service qu'ils rendent à leurs patients. Qui pourront exercer leur libre choix de santé.

 

Comment privatiser en France? En établissant une charte qui ne prévoit pas de conditions d'accès, en rétablissant un système concurrentiel d'assurances, en permettant aux patients de se constituer un compte d'épargne santé et en prévoyant pour les plus démunis un filet de sécurité.

 

La publicité et la responsabilité personnelle est le sujet traité par Olivier Méresse

 

La publicité est multiple. Son domaine est difficile à circonscrire. Contrairement aux idées reçues elle est surtout favorable aux petits qui ne disposent pas des mêmes moyens d'information que les grands.

 

Naguère un organisme privé, le BVP, Bureau de vérification de la publicité, délivrait un label de qualité des annonces.

 

Le législateur socialiste - ce qui est un pléonasme - a trouvé ce label insuffisant et a cru bon de protéger davantage le consommateur (lois Evin contre le tabagisme et l'alcoolisme, loi Sapin sur les achats d'espace, accord Ameline avec les médias sur l'image de la femme dans la publicité).

 

L'effet pervers de cette déresponsabilisation? Tout ce qu'on voit maintenant dans la publicité est considéré comme vrai puisque la loi l'autorise...

 

Au début de l'après-midi du 7 juillet, Axel Arnoux, Président de Chauvin Arnoux, expose le combat qu'il mène depuis des années pour le salaire complet, qu'il a instauré dans sa propre entreprise.

 

Pourquoi? Parce qu'il fait apparaître tout ce que l'Etat prend au salarié sur son salaire réel.

 

L'opération est simple, comptable. Le salaire complet est égal au salaire net plus les cotisations dites salariales plus les cotisations dites patronales. Exemple:

 

Un salarié qui touche 1'600 euros nets par mois a en réalité un salaire complet de 3'200 euros. La moitié lui est prélevée par l'Etat... Ce qui est dissimulé en faisant le distingo artificiel entre prélèvements salariaux et patronaux, d'un montant de 400 et 1'200 euros respectivement.

 

Patrick de Casanove a montré que le salarié pourrait s'assurer contre la maladie à meilleur compte dans le privé. Axel Arnoux montre qu'il en est de même pour les retraites.

 

Dans l'exemple donné, en plaçant à 3% le prélèvement qui lui est fait, le même salarié pourrait bénéficier d'une retraite de 2'500 euros par mois pour une durée de retraite de 25 ans (dont il conviendrait de déduire, à la louche, 500 euros par mois pour qu'il puisse s'assurer contre le risque maladie) ou d'un capital de 550'000 euros.

 

Il s'agit donc non pas d'un combat que devraient mener les employeurs mais les salariés, dont, par coercition, on ampute la moitié du salaire sans qu'ils n'aient leur mot à dire.

 

Christian Julienne avait la lourde tâche de parler de politique du logement et responsabilité individuelle

 

Le logement a pris une très grande place dans le budget des familles françaises. Alors qu'il représentait 4% de ce budget dans l'immédiate après-guerre, il en représente aujourd'hui 29%, 35% si l'on inclut les taxes. Il faut dire que sur la même période les propriétaires sont passés de 20 à 60% de la population.

 

En matière d'urbanisme il y a corrélation étroite entre biens publics et bien privés, qu'il s'agisse de copropriétés ou de lotissements. Mais cette corrélation est renforcée par le code d'urbanisme qui mêle allègrement droit et incantation morale, droit et social - la proportion arbitraire de 20% de logements sociaux dans toutes les communes est une absurdité. Le même code d'urbanisme se mêle en outre d'environnement technocratique depuis la loi Borloo...

 

La politique d'urbanisme est déterminée par l'Etat et par les courroies de transmission de son monopole en la matière que sont les sociétés d'économie mixte, les agences foncières et techniques, les sociétés publiques. 

 

Comme l'Etat n'aime pas la maison individuelle, les logements sociaux sont essentiellement des appartements dont la superficie et le nombre de pièces sont définis arbitrairement par lui et non pas par ceux qui les habitent. N'est-il pas significatif que, quand une aide à la personne est décidée, elle ne soit pas versée à l'intéressé mais à l'organisme qui assume la gestion de son logement?

 

Au lieu de servir de secteur de dépannage contre les accidents de la vie, les logements sociaux sont devenus par la grâce de l'Etat un privilège héréditaire. Il n'y a même pas de contrat de bail définissant les obligations du bailleur et du preneur, mais un simple engagement de location, transmissible aux descendants.

 

Le maire d'une commune peut se comporter en véritable despote en matière de logement. Ne détient-il pas entre ses mains à la fois la permission de construire et l'application de la politique étatique d'urbanisme? De quoi, à moindres frais, fidéliser une clientèle électorale...

 

Il serait donc souhaitable que les habitations à loyers modérés ne représentent plus qu'une toute petite part du parc de logements et que des baux de 6 ans soient conclus dans ce secteur de l'habitat.

 

Jacques-Garello.JPGQuelle est la responsabilité des libéraux dans l'opposition? C'est à cette question qu'a répondu Jacques Garello [photo ci-contre].

 

Il incombe aux libéraux de relancer le libéralisme français, à partir du constat que ce n'est pas la pensée libérale qui est en crise, mais la politique libérale.

 

Force est de constater qu'il n'y a pas de politiciens libéraux en France.

 

De gauche comme de droite les politiciens français sont en effet protectionnistes et contre la finance. Ils sont tous étatistes, de Mélenchon à Le Pen. Aussi faut-il faire une nouvelle offre politique, qui soit réaliste, nécessaire et exigeante.

 

Quand les socialistes sont au pouvoir, c'est bon pour les libéraux, parce que les socialistes commettent tous la même erreur anthropologique qui est de vouloir tout diriger administrativement, ce qui les conduit inexorablement à l'échec. Ce n'est plus à démontrer. L'histoire le montre à satiété.

 

Que faut-il faire? Réduire les dépenses publiques, c'est-à-dire réduire le périmètre de l'Etat qui ne doit plus s'occuper d'éducation, de logement ou de protection sociale; privatiser ce qui est privatisable, par exemple la poste, les chemins de fer, l'énergie.

 

Pourquoi? Parce que l'Etat omniprésent - les dépenses publiques représentent 57% du PIB - empêche le fonctionnement de la société marchande. Ce qui conduit 100 000 jeunes, chaque année, à quitter la France pour être, sous des cieux plus propices, acteurs de leur propre vie.

 

La solution ne viendra pas de l'actuelle opposition, mais d'en-bas, de la base. Les libéraux doivent devenir militants, prendre leur bâton de pèlerins et vendre le libéralisme, qui est un tout, car des mesures libérales isolées seraient de toute façon inefficaces:

 

"Faites-moi des électeurs libéraux, je vous ferai des élus libéraux." disait le libéral Edouard Laboulaye.

 

Xavier Bébin est délégué général de l'Institut pour la justice ici, qui lutte contre les dysfonctionnements de la justice. Lors du dîner-débat du 7 juillet il traite magistralement de la responsabilité des juges en démocratie

 

Qu'est-ce qu'un juge? Le gardien de la loi, à la fois créateur de normes et arbitre d'une part entre particuliers, d'autre part entre particuliers et administration, tout du moins en droit pénal.

 

Le juge ne jouit pas de l'immunité pénale et ses responsabilités civile et disciplinaire peuvent être engagées. Ainsi son comportement personnel, comme tout justiciable, peut être sanctionné. Il n'en est pas de même de son comportement professionnel, où il jouit d'une impunité de fait, même si sa responsabilité devrait pouvoir être mise en cause en cas de non respect de la procédure ou de dépassements de délais.

 

En revanche si un juge prend une mauvaise décision, c'est l'appel qui est la contrepartie de son irresponsabilité.

 

Comment s'assurer que justice soit rendue, c'est-à-dire que les coupables ne restent pas impunis? Par la délimitation des pouvoirs des juges, par un nouveau mode de nomination des juges, par la construction de nouvelles places de prison:

 

- En cas de récidive, l'application de réelles peines plancher, par exemple, ne devraient-elles pas être appliquées?

 

- L'Ecole nationale de la magistrature formant de très jeunes juges, ne devrait-on pas élire, ou en tout cas nommer, des juges d'au moins 40 ans, ayant une expérience du droit, comme cela se fait dans d'autres pays?

 

- En France 80'000 personnes condamnées à des peines de prison ferme étant en liberté faute de place -il n'y a que 57'000 places dans les prisons françaises, occupées par 67'000 détenus -, ne serait-il pas indispensable d'avoir un taux de détenus par habitant plus élevé, comparable à celui des pays voisins?

 

Il ne faut pas oublier que les libertés fondamentales sont remises en cause par la trop grande impunité dont jouissent délinquants et criminels en France.

 

La-doctrine-sociale-de-l-eglise.jpgAu matin du 8 juillet, les participants peuvent se demander comment René de Laportalière va bien pouvoir se sortir d'un sujet tel que la responsabilité personnelle, la religion et l'Eglise.

 

D'emblée il rassure l'auditoire et se place sous l'égide de trois libéraux, Frédéric Bastiat, Murray Rothbard et François Guillaumat, pour qui l'appartenance à la religion catholique ne pose pas de problème:

 

- Le premier est au début un catholique rationnel, puis un catholique éclairé par la grâce de Dieu.

 

- Le deuxième a permis de redécouvrir l'Ecole de Salamanque.

 

- Le troisième dans une conférence, faite notamment le 20 juin 1998 devant le Cercle Frédéric Bastiat, a brillamment établi les liens entre libéralisme et christianisme. 

 

Puis l'orateur fait l'examen de quatre encycliques, qu'il compare à des coffres immergés. En écartant les algues, selon lui, il est possible de trouver de véritables trésors:

 

- Dans Rerum de novarum, qui traite des rapports entre patrons et ouvriers, Léon XIII fait du Mélenchon avant l'heure, ce sont les algues, mais défend la propriété privée et condamne ce qui s'appellera l'Etat providence.

 

- Dans Quadragesimo Anno, qui traite du capital et du travail, Pie XI ne trouve aucune grâce ni au libéralisme  ni au socialisme, qu'il renvoie dos à dos, ce sont les algues, mais il dit que la propriété privée est un droit naturel qu'il faut laisser intact, défend le principe de subsidiarité et affirme qu'il est incompatible d'être un bon catholique et un vrai socialiste.

 

- Dans Popularum progressio, Paul VI fait du Mélenchon, tout comme Léon XIII avant lui, ce sont les algues, mais il dit que le dessein de l'homme est de faire fructifier ses talents et que chacun est l'artisan de ses échecs et de ses réussites.

 

- Dans Caritas in veritate, Benoît XVI fustige la mondialisation, mais déclare que le développement humain n'est possible que dans la liberté.

 

En résumé, si les papes affirment dans ces encycliques des principes solides, leur analyse sur les raisons de la misère demeure insuffisante. Le libéral y retiendra cependant deux thèmes:

 

- Le principe de subsidiarité

- La nécessaire soumission de l'Etat au droit naturel: ce n'est plus le cas depuis au moins deux siècles, puisque c'est désormais l'Etat qui décide arbitrairement - de manière changeante - de ce qui est bien et de ce qui est mal.

 

Le fondement de la résistance est bien le droit naturel.

 

Max Falque, qui est délégué général de l'ICREI, International Center for Research on Environmental Issues ici,avec sa conférence sur politique environnementale et responsabilité personnelle, témoigne que de telles préoccupations ne sont pas étrangères aux libéraux.  

 

La qualité de l'environnement et le niveau de vie sont liés, de même que la qualité de l'environnement et l'exercice de droits de propriété privée le sont, tant il est vrai que la propriété en commun conduit inévitablement à la surexploitation, sauf quand elle est de taille réduite, homogène et quand les sanctions des abus sont clairement définies à l'avance.

 

Une politique environnementale, qui responsabilise, passe donc par de nouvelles modalités d'appropriation (comme, par exemple, la propriété de servitudes), lesquelles s'avèrent plus efficaces que n'importe quelles réglementations et taxations. En effet la gestion publique est finalement toujours mauvaise ou coûteuse, souvent les deux.

 

Ainsi de belles âmes écolo servent-elles d'alibis à de véritables voyous, comme c'est manifestement le cas avec l'escroquerie des éoliennes.

 

Max Falque résume la politique environnementale étatique par cette sentence:

 

"C'est donner la garde de l'oiseau au chat."

 

La dernière conférence de la matinée du 8 juillet est donnée par Jacques de Guenin, fondateur du Cercle Frédéric Bastiat, sur le thème responsabilité personnelle et l'Etat minimum.             

 

L'Etat est responsable d'une insidieuse, progressive et cumulative diminution des responsabilités individuelles, dans des domaines tels que les relations en entreprise, les retraites, le logement, le surendettement, la solidarité (qui tue la compassion puisque l'Etat est payé pour ça), la santé, le mariage, la PAC, l'interdiction des OGM, l'interdiction du gaz de schiste.

 

Force est de constater que plus les sociétés sont libres, plus elles sont efficaces. Jacques de Guenin souligne que les habitants eux-mêmes de la région de Fukushima ont effectué des réparations immédiates alors que l'Etat a mis plus d'un an à mettre en oeuvre les aides ministérielles pour la reconstruction.

 

Le mal existe et peut détruire les meilleures sociétés. Sur une échelle de 1 à 10 l'orateur a classé les manifestations du mal: 1 graffiti, 2 virus informatiques, 3 les vols, 4 les viols et les violences, 5 les crimes crapuleux, 6 les attentats, 7 les meurtres pour la prise de pouvoir, 8 les guerres de conquête, 9 les génocides, 10 les meurtres de masse communistes.

 

Un Etat minimum est par conséquent nécessaire selon Frédéric Bastiat, Ayn Rand et Robert Nozick, pour que soient respectés les droits à la vie, à la liberté, à la propriété, au fruit de son travail etc. Il fonctionne d'autant mieux qu'il est décentralisé, parce qu'alors tout le monde se connaît et qu'en résulte une société plus paisible.

 

Patrick de Casanove tire la conclusion de ces neuf conférences et de ces deux dîners-débat

 

Les libéraux de toutes obédiences doivent se rencontrer, unir leurs forces pour que s'accomplisse le dessein de l'homme libre, bref devenir tous des militants de la liberté.

 

Et dans le projet Bastiat 2017 ici ils peuvent tous se reconnaître.

 

Francis Richard

 

Post-scriptum:

 

La toute jeune fille de Patrick de Casanove, après la conclusion de son père, réserve la surprise aux participants de réciter le magnifique poème de Paul Eluard, qui date de 1942:

 

Liberté

 

Sur mes cahiers d'écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable de neige
J'écris ton nom

Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J'écris ton nom

Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J'écris ton nom

Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l'écho de mon enfance
J'écris ton nom

Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J'écris ton nom

Sur tous mes chiffons d'azur
Sur l'étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J'écris ton nom

Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'écris ton nom

Sur chaque bouffée d'aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J'écris ton nom

Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l'orage
Sur la pluie épaisse et fade
J'écris ton nom

Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J'écris ton nom

Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J'écris ton nom

Sur la lampe qui s'allume
Sur la lampe qui s'éteint
Sur mes raisons réunies
J'écris ton nom

Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J'écris ton nom

Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J'écris ton nom

Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J'écris ton nom

Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J'écris ton nom

Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attendries
Bien au-dessus du silence
J'écris ton nom

Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J'écris ton nom

Sur l'absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J'écris ton nom

Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l'espoir sans souvenir
J'écris ton nom

Et par le pouvoir d'un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté

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27 août 2011 6 27 /08 /août /2011 11:45

023Initialement l'Université d'Été de la Nouvelle Économie avait lieu tous les ans, ce depuis 1978. Elle a lieu tous les deux ans depuis 2007. Les participants n'en sont que plus heureux de se retrouver après une telle interruption... dans l'amphi surchauffé de la faculté de droit de l'Université d'Aix-Marseille III [ci-contre].

Les thèmes de cette année était on ne peut plus d'actualité : Quelle crise ? Quelle sortie de crise ? Après l'État Providence.

Ces thèmes auraient dû attirer l'attention de journalistes un peu curieux, qui ne se contentent pas de la rengaine répétée à satiété et sur tous les tons : c'est le méchant capitalisme qui est le responsable de tous les maux, donc de la crise financière, puis de la crise de l'endettement public. Il ne s'est trouvé qu'un journaliste pour faire le déplacement parmi tous ceux, nombreux, qui avaient été invités par les organisateurs, ce qui montre combien est grande la curiosité des médias, qui se plaignent de leur perte d'audience...

Anne Jollis Wall Street Journal EuropeEn fait il s'agit d'une journaliste, Anne Jolis [ci-contre], éditorialiste basée à Londres du Wall Street Journal Europe ici. Elle sauve l'honneur d'une profession qui se satisfait des explications données par les fauteurs de crise. Ces derniers qui sont les bénéficiaires de l'Etat-Providence rejettent évidemment sur les autres leurs propres turpitudes.

Anne Jolis a même fait mieux que d'assister. Elle a accepté d'animer un des débats de fin de journée de l'Université d'Été, qui s'est tenue du 22 août 2011 au 24 août 2011, le matin et en fin de journée dans l'amphithéâtre David, l'après-midi dans deux plus petites salles, destinées l'une au public anglophone, l'autre au francophone.

En fait l'Université a débuté, le 21 août 2011, par un dîner d'ouverture au Grand Hôtel du Roy René, comme c'est devenu la tradition. Au cours de ce repas de l'amitié, qui permet de se retrouver entre personnes qui toutes défendent les idées de liberté, deux personnalités ont pris la parole.

 

Michel Kelly-GagnonLeszek Barcelowicz, ancien Ministre polonais des finances, ancien Directeur de la banque centrale de Pologne, Docteur honoris causa de l'Université d'Aix-en-Provence en 1993, a rappelé fort opportunément qu'il ne fallait pas confondre Etat-Providence et solidarité... un mot cher aux Polonais, qui ont su lui donner un retentissement mondial, grâce à l'action incomparable du syndicat éponyme, dirigé alors par Lech Walesa.

Michel Kelly-Gagnon [ci-dessus], ancien Président du Conseil du patronat du Québec ici, ancien Président de l'Institut économique de Montréal ici, a expliqué pourquoi le Canada n'a pas connu la crise : en opérant de grosses coupes ciblées dans le budget, le gouvernement Jean Chrétien, pour sauver l'Etat-Providence, est parvenu à dégager des excédents budgétaires entre 1997 et 2007...

Quelle crise ? 

 

Médaille d'or Ville d'AixLeszek Barcelowicz [ci-contre, lors de la remise de la Médaille de la Ville d'Aix au Pavillon Vendôme ] explique que la crise est due à la politisation de l'économie, à la concentration du pouvoir, à l'absence de concurrence et au protectionnisme.

Pascal Salin incrimine la manipulation des taux d'intérêt par les banques centrales : un taux faible incite à investir dans des activités risquées ou non rentables. Il souligne que l'épargne est insuffisante en raison des politiques fiscales et des retraites par répartition et que la création monétaire est inutile, la déflation naturelle permettant d'augmenter le niveau de vie.

 

Victoria Curzon-Price démontre que le protectionnisme conduit au chômage et à la décroissance. Aux salaires bas des pays émergents, les pays occidentaux peuvent opposer une productivité incomparable. Ce qui les empêche d'être compétitifs ce sont leurs charges sociales et leur modèle social. Elle donne l'exemple de la taxe CO2 qui rend inapte à la concurrence mondiale les principales activités économiques, hormis celles du bien-être et de l'environnementalisme.

 

Session université été nouvelle éco 2011Pour Tom Palmer il faut déconnecter cupidité et capitalisme, car les connoter revient à reprocher la maladie à la médecine. C'est l'interventionnisme qui est responsable de la persistance de la pauvreté parce qu'il engendre privilèges et corruptions, c'est le capitalisme des petits copains, le crony capitalism. Tom cite Tarek el Taib Mohamed Bouazizi, le désormais fameux vendeur ambulant tunisien, décédé le 4 janvier 2011, à l'âge de 27 ans, des suites de son immolation deux semaines plus tôt :

 

"Le capitalisme du libre marché est le seul système compatible avec la dignité humaine."

Jean-Pierre Centi [ci-dessous avec Pierre Garello] rappelle que le pacte de stabilité de la zone euro se donnait pour objectifs : 3% de déficit maximum et 60% du PIB de dette publique maximum. C'étaient des objectifs purement arbitraires. La règle était pourtant l'équilibre budgétaire au XIXe siècle. Cette règle a été oubliée au profit de la théorie keynésienne selon laquelle le devoir d'agir passe par la pratique du déficit budgétaire, comme si le tout se comportait différemment de l'élément, l'économie d'un pays de celle d'une entreprise... Il n'y a que deux façons de répudier une dette : explicite en disant aux prêteurs qu'on ne leur doit rien, implicite en pratiquant l'inflation.

 

Quelle sortie de crise ?

JP Centi et P GarelloFace à la crise il y a ceux qui pensent qu'il faut attendre que le système basé sur l'Etat-Providence s'effondre, d'autres qu'il est réformable, voir l'exemple du Canada, et enfin ceux qui pensent que son effondrement est déjà effectif...

Pour un libéral à quoi sert une constitution ? A limiter le pouvoir répond Jean-Philippe Feldman. Une constitution ne peut le faire qu'en déclarant les droits et notamment les droits de propriété, en séparant véritablement les pouvoirs, en décentralisant verticalement et horizontalement, en appliquant la subsidiarité verticale et horizontale. Mais il ne faut pas s'illusionner. Une constitution n'empêche ni l'autoritarisme, ni le totalitarisme, ni la technocratie... Et de citer Georges Pompidou :

"Comment se ruiner ? Par le jeu ? C'est le plus rapide. Par les femmes ? C'est le plus agréable. Par les technocrates ? C'est le plus sûr."

P Bessard et JP DelsolLes institutions helvétiques se caractérisent, nous dit Victoria Curzon-Price, par la décentralisation politique et la démocratie directe. Il en résulte une concurrence institutionnelle vive, un processus de découverte institutionnelle permanente, une limitation du pouvoir politique et des impôts raisonnables, même si les dépenses publiques représentent tout de même 37% du PIB...

Pierre Bessard rappelle que le secret bancaire n'est pas un privilège mais une protection envers l'Etat et envers les tiers. De même les paradis fiscaux participent à la préservation des droits individuels et permettent un arbitrage vis-à-vis des excès budgétaires. La minimisation fiscale est un devoir moral. L'Etat devrait être au service des citoyens et non l'inverse. 

L'impôt est un moyen dans l'Etat limité à ses fonctions régaliennes, nous dit Jean-Philippe Delsol. Mais c'est une arme dans l'Etat-Providence, une arme au service d'une idéologie. Il s'agit d'égaliser, de déraciner les fortunes, selon l'expression d'un certain Maximilien Robespierre... Pour Jean-Philippe Delsol, qui est favorable à la flat-tax (l'impôt proportionnel, qui touche tout le monde) l'impôt progressif consiste à faire payer les riches (seuls 50% des Français payent l'impôt sur le revenu).

Après l'Etat-Providence.

salle rené casinMario Rizzo donne raison à Friedrich Hayek. L'extension de l'Etat, avec son accumulation de lois et de réglementations, est responsable de la crise que nous connaissons aujourd'hui. Il faut diminuer les dépenses publiques et réduire l'Etat. Pour y parvenir un consensus est nécessaire. Il ne surviendra que lorsque le fond aura été atteint.

Steve Davies souligne que réduire l'Etat-Providence rencontre des oppositions. Pourtant il ne peut pas perdurer. La vie sociale en est trop fortement endommagée. Couper dans les dépenses fait mal. Steve préfère donc présenter les choses autrement : le choix privé est l'expression de la liberté, qui seule permet la croissance du marché et la sortie de crise.

Tribune Uni été 2011Douglas Den Uyl expose les arguments avancés en faveur de l'Etat-Providence : la défense des pauvres, le besoin plutôt que le profit, l'égalité etc. Et ceux avancés pour le critiquer : l'Etat-Providence c'est donner aux uns en prenant aux autres, c'est la dépendance, l'inégalité réelle, la stagnation etc. Il ajoute que cela conduit surtout à l'atomisation de la société. Pourquoi ? Parce qu'il est contraire à la morale et encourage l'égo-centrisme.

En effet une personne ne peut être morale que si elle accepte la responsabilité de ses actes et qu'elle agit selon des principes. Ce qui suppose d'être libre de choisir ses principes d'action. Ainsi il est moral d'aider volontairement les autres en leur consacrant 10% des ses revenus. Il n'est pas moral que ce soit l'Etat qui prélève, par la coercition, ces 10% pour aider les autres.

Douglas Rasmussen traite de la justice. Le mot recouvre trois significations : la justice metanormative, la vertu de justice, la justice personnelle. La première a trait aux droits individuels qui sont limités par le consentement, la deuxième à la considération des autres, ce qui est différent de l'égalité de traitement, la troisième à deux maximes principales : connais-toi toi-même et deviens ce que tu es. Un ordre libéral doit fournir la justice metanormative qui permet à la vertu de justice et à la justice personnelle d'exister. En fin d'exposé, Douglas cite Benjamin Franklin :

"Where liberty dwells, there is my country" [là où la liberté demeure, se trouve mon pays]

Château Régis Saint MenetJean-François Mattei estime que la crise politique actuelle est une crise identitaire. Elle ne date pas d'hier. Paul Valéry en parlait déjà en 1919. Aussi a-t-il consacré son dernier livre aux procès faits à l'Europe. Il cite quelques exemples du refus d'assumer l'héritage :

 

- L'Union européenne a chargé une ONG, la Generation Europe Foundation, de recenser les fêtes religieuses européennes. Aucune fête chrétienne ni juive n'a été recensée. Coût : 5 millions d'euros.

- Aucun des sept billets libellés en euros ne comporte d'illustration réelle : elles sont toutes fictives [ci-contre le château Régis à Saint Menet où s'est achevée l'Université d'Été].

 

- Le projet de Constitution européenne ne faisait pas référence aux racines chrétiennes de l'Europe.

Tribune Uni 2011Le conférencier cite alors René Char :

"Notre héritage n'est précédé d'aucun testament."

Hannah Arendt se demandait comment utiliser cet héritage. En l'assumant, répond Mattei, en faisant nôtre ce qui le caractérise, et qui est l'objet de reproches : la découverte de l'universel et l'idée d'ouverture, qui sont les fruits de la liberté.

William Faulkner disait :

"Le passé n'est jamais mort, il n'est même pas passé."

Alors que faut-il faire ?

 

Petit déjeuner sous les platanesIl faut faire savoir que l'Etat-Providence est le problème et non pas la solution. Il est le problème parce que, s'il répond à des besoins réels, il manque de transparence et que l'information sur lui est proche de zéro. Les populations manquent d'éducation économique et subissent au contraire, de la part de l'Etat-Providence, une propagande qui est une éducation véritablement anti-économique.

 

Il faut faire savoir que l'Etat-Providence est immoral - il est par exemple immoral de transmettre des dettes aux générations futures - et que la conception de l'homme, libre et responsable, et l'économie sont inséparables. L'Etat-Providence s'oppose à la liberté et à la responsabilité et ne peut pas enseigner l'économie. Il n'enseigne que deux idéologies qui lui sont favorables : le socialisme et le keynésianisme.

Emmanuel Martin Un Monde LibreDans tous les pays occidentaux, il faut faire savoir quel salaire complet les personnes perçoivent, ou plutôt ne perçoivent pas, en réalité, quel est le jour de leur libération fiscale, à partir duquel elles travaillent pour elles-mêmes et non plus pour l'Etat, quel est le poids de la dette publique de leur pays en prenant des exemples concrets, plus parlants que des milliards d'euros, de dollars ou de francs suisses, qui sont bien abstraits.

Il faut transmettre le raisonnement économique en utilisant tous les moyens modernes existant, à destination de tout le monde, sa famille, ses proches, les médias, via Internet, des articles, des traductions, des films. Car les choses ne changeront pas sans la pression de la société civile. 

Je terminerai par cette citation de Jacques Garello, juxtaposant deux titres de livres écrits par Adam Smith :

"Les sentiments moraux font la richesse des nations."

Francis Richard

PS

J'ai bien conscience que ce compte-rendu de la 32e Université d'Été de la Nouvelle Économie est lacunaire. Tous ceux que je n'ai pas cités ou dont je n'ai pas rendu compte des travaux me pardonneront, j'en suis sûr. Comme lorsque je fais une recension d'un livre que j'aime, je n'ai pas d'autre ambition que de mettre en appétit.

Le programme de cet événement boudé par les médias se trouve ici.

Les deux dernières photos ci-dessus montrent que les participants savent non seulement penser, discuter, mais vivre... et chanter [Emmanuel Martin à gauche sur la dernière photo est non seulement un chanteur insigne mais l'animateur d'un site remarquable, Un Monde Libre, ici].
    
Compléments :

Anne Jolis parle de l'Université d'Été dans le Wall Street Journal ici.

On peut écouter l'intervention de Georges Lane du 23 août 2011 à l'Université d' Été sur le site de Lumière 101 à propos des Retraites au risque de l'étatisme ici.

Quelques liens utiles :

ALEPS :  http://www.libres.org/

Atlas Network : http://atlasnetwork.org/

Alerte éducation : http://alerteducation.eu/

Cato Institute : http://www.cato.org/

Contribuables associés : http://www.contribuables.org/

Entrepreneur Junior : http://www.entrepreneurjunior.org/

Institute for economic studies : http://www.ies-europe.org/

IREF : http://www.irefeurope.org/

Liberté Chérie : http://www.liberte-cherie.com/

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4 juillet 2011 1 04 /07 /juillet /2011 01:00
The bowlerIl y a 210 ans, à Bayonne, le 30 juin 2011, naissait Frédéric Bastiat. Un article du Monde, daté du 3 janvier 2011, signé Nicolas Bourcier, le qualifiait de "Français inconnu" et de "référence des ultra-conservateurs américains". Nul n'est décidément prophète en son pays...

Il existe pourtant en France plusieurs rues Frédéric Bastiat, notamment à Paris, à Mont-de-Marsan et à Mugron, dans les Landes, d'où sa famille est originaire.

A l'angle de la rue parisienne et de la rue d'Artois se trouve un pub, The bowler, qui a servi de point de rendez-vous vendredi soir dernier à des amis sur Facebook,  pour célébrer ce Français inconnu, qui a tout de même inspiré aussi bien Margaret Thatcher que Ronald Reagan, noms que Nicolas Bourcier ne doit, à l'évidence, pas connaître non plus...

En deux mots rappelons donc que Frédéric Bastiat, mort à Rome le 24 décembre 1850, était tout à la fois un économiste défenseur de la liberté des échanges et des choix économiques par les individus, un philosophe défenseur de la liberté individuelle et de la responsabilité, un homme politique défenseur du désengagement de l'Etat dans les activités pour lesquelles les individus peuvent se passer de lui.

Anniversaire BastiatAu cours des échanges de ceux qui ont commémoré l'anniversaire de Bastiat, une nouvelle réjouissante a été annoncée par l'une d'entre eux : Atlas shrugged d'Ayn Rand va être publié le 22 septembre prochain en français. Ceux qui ne lisent pas l'anglais vont enfin pouvoir répondre à la question : who is John Galt ?

Après avoir vidé quelques bières les participants [la photo ci-contre n'en montre qu'une partie] se sont rendus dans un restaurant de la rue de La Boëtie pour y partager un repas, continuer leurs échanges sur la situation économique actuelle de la France, aborder d'autres sujets et faire réellement connaissance parfois, puisque certains ne se connaissaient que via Facebook.

Le lendemain 1er juillet 2011 commençait à Saint Paul-lès-Dax Le Week-End de la Liberté organisé par le Cercle Frédéric Bastiat, dont l'objet est de "perpétuer la mémoire de Frédéric Bastiat et de propager sa philosophie de liberté, d'initiative et de responsabilités". ici.

Parti de Paris plus tard que prévu, votre serviteur n'a pas pu assister au cocktail et dîner du premier jour. Pendant les deux jours suivants il a eu le bonheur de suivre les huit conférences consacrées à La souveraineté de l'individu et [à] la coopération spontanée.
 
Bertrand Lemennicier, professeur d'économie à l'Université de Paris II Panthéon-Assas, a ouvert le feu avec une conférence suivie d'un débat sur la famille. Avec beaucoup d'humour il a expliqué que la disparition de la famille traditionnelle s'expliquait très bien par le changement des contraintes, notamment par la possibilité nouvelle donnée à la femme de travailler sans l'accord de son mari et par l'interventionnisme de l'Etat dans le financement de la famille obtenu grâce à l'électorat féminin.
 
Sur l'école, Lionel Devic, avocat, président de la Fondation pour l'Ecole a d'abord retracé l'histoire de l'école depuis les lois Ferry de 1881 et 1882 qui ont instauré l'école laïque, en passant par le principe posé en 1946 de l'éducation prérogative de l'Etat et en terminant par les lois Debré de 1959 qui ont associé l'école privée au service public. Pour retrouver un enseignement de qualité et former des élèves libres, il faut que les éducateurs soient également libres, ce qui ne peut se faire que par la création de classes hors contrat et par le chèque-éducation.

Jean-Pierre Ferro, ancien officier de la police nationale, a participé à la lutte contre le grand banditisme, la drogue, le terrorisme et le kidnapping à Paris, Bordeaux, Madrid et en Colombie. Les menaces mondiales ont augmenté, les budgets ont diminué. Au cours des quinze dernières années la sécurité privée a pris une importance considérable, sous des formes très diverses, jusqu'au point de représenter des milliers de milliards de dollars de chiffre d'affaires.

Week-end libéral DaxLa légitime défense n'est pas interprétée de la même manière dans tous les pays. En Belgique, Marc Cools, professeur de criminologie à l'Université de Bruxelles et de Gand, explique qu'elle n'est justifiée que pour les personnes et non pas pour les biens. Or de plus en plus le monopole légal de la sécurité est remis en cause du fait que les droits de propriété sont de plus en plus mal défendus. Hobbes était le plus grand menteur qui soit quand il affirmait : "L'Etat vous protège". La sécurité privée est l'alternative. D'autant que des études sur les armes menées en Irlande, en Grande-Bretagne, en Ecosse, en Australie et aux Etats-Unis, montrent que celles-ci ne sont pas un facteur d'augmentation de la criminalité.

 

Patrick Simon, avocat, montre toute la différence qui existe entre la loi, c'est-à-dire le droit décrété, et le droit naturel. La loi est édictée par l'Etat, elle impose des règles, l'autorité fait la loi, la loi est instable, elle dit le bien et le mal, elle a besoin d'un support matériel. Le droit naturel énonce des principes généraux nés de l'expérience, les règles sont spontanées, la justice fait le droit naturel, il s'agit de trancher entre un bien et un autre bien, le droit naturel évolue et résulte d'un processus de découverte, il existe sans qu'un support matériel ne soit nécessaire. Quand le droit naturel n'est pas respecté, la sanction arrive. La loi de 1948 de blocage des loyers en France s'est traduite par le fait que les propriétaires n'avaient plus intérêt à entretenir leurs biens...

 

Après un rappel historique sur la monnaie Philippe Nataf, professeur à l'Université Paris IX Dauphine, montre tout l'intérêt que représentent les banques libres. Cela suppose l'abolition du cours légal des monnaies, la liberté pour les banques d'ouvrir des comptes en or et la liberté pour elles de frapper des pièces en or.

Jacques de Guenin, fondateur du Cercle Frédéric Bastiat, rappelle qu'une entreprise résulte de contrats privés dont l'Etat ne devrait pas se mêler. Dans une économie libre les salaires devraient être librement négociés, en se souvenant qu'un salarié n'est pas employable si son coût marginal est supérieur au profit marginal que son employeur peut en retirer. Pour vivre l'entreprise doit continuellement s'adapter. C'est ainsi que le plein emploi peut être obtenu. Il n'y a pas besoin d'autorité extérieure pour répartir le temps entre le travail et les loisirs. Cela se fait par la négociation de même que la résolution des conflits.

Les interventions de l'Etat, en France, au contraire, provoquent le chômage. Le SMIC empêche l'embauche et coûte plus de deux fois ce que perçoit le salarié. Le Code du Travail empêche de se séparer des personnes qui ne font pas l'affaire et de diminuer les effectifs quand c'est nécessaire. Les 35 heures payées 39 ont peut-être créé 300 000 emplois de fonctionnaires mais ce sont autant de biens et de services dont les entrepreneurs et les consommateurs ont dû se priver. Car un emploi public est plus onéreux qu'un emploi privé, il est la plupart du temps inutile, voire nuisible, puisque rien n'empêche que sa productivité marginale soit inférieure à son coût marginal. Enfin les syndicats subventionnés par l'Etat n'existent que pour mettre de l'huile sur le feu. Dans le privé la syndicalisation est inférieure à 5%... et les conflits beaucoup plus rares que dans le public.

Quelle serait la constitution de la liberté ? C'est à cette vaste question qu'a tenté de répondre Jean-Philippe Feldman, avocat, professeur de droit à l'Université de Rennes. Pour les libertariens il n'est pas besoin de constitution. Pour les libéraux, ce n'est pas le cas. Après avoir passé en revue les différents types de démocraties, Jean-Philippe Feldman dessine le portrait de ce que devrait être, selon lui, le régime le plus à même de défendre la liberté. 

 

Il s'agirait d'une démocratie bi-camérale, où les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire seraient réellement séparés. Le scrutin devrait être majoritaire à un tour pour éviter l'instabilité et les manoeuvres entre partis. La constitution devrait être courte et simple à comprendre par ...les hommes politiques et par les citoyens. Sans être hostile à la démocratie semi-directe le conférencier évoque ses craintes en matière de souveraineté de l'individu et de la part des groupes de pression. Il n'aime pas non plus la rhétorique souvent employée dans ce cadre à l'égard de l'oligarchie.

 

Dans sa conclusion Patrick de Casanove, [voir photo ci-dessus] médecin, président du Cercle Frédéric Bastiat, cite Michel Guenaire :

"Le libéralisme c'est la morale de la liberté."

Le fait est que la loi ne crée pas la morale. C'est la morale qui doit inspirer la loi.

La morale de la liberté repose sur les six derniers des dix commandements :

- Tu aimeras ton prochain
- Tu ne tueras pas
- Tu ne voleras pas
- Tu ne convoiteras pas le bien d'autrui
- Tu ne mentiras pas
- Tu honoreras ton père et ta mère

Elle considère que les hommes sont inégaux mais également dignes.

L'Etat libéral laisse faire les bons et punit les mauvais. Il laisse faire la concurrence et le libre choix. Il est opposé à la spoliation légale, à l'arbitraire, à la soumission, à l'irresponsabilité collective, au mépris de l'individu. Tout homme a des capacités et des talents utiles à l'humanité.

La charité libre permet à l'homme de sublimer son destin dans l'amour du prochain :

"Faites aux autres ce que vous voudriez que les autres fissent pour vous" disait Frédéric Bastiat

Francis Richard
 

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18 novembre 2010 4 18 /11 /novembre /2010 07:10

Colloque LibéralismeLe Cercle Démocratique Lausanne ici et le Liberales Institut ici ont organisé un colloque sur le libéralisme en Suisse le vendredi après-midi 12 novembre 2010 et le samedi matin 13 novembre 2010. Les interventions étaient faites en français, en allemand et en anglais.

 

Ce fut pour moi l'occasion, parmi les intervenants, de retrouver Victoria Curzon-Price, Pierre Bessard et Uli Windisch et de faire la connaissance d'Olivier Meuwly, de Pierre Weiss et de Philippe Nemo; parmi les auditeurs de renouer des liens avec des amis connus lors de la dernière Université d'été de la nouvelle économie d'Aix-en-Provence, en 2009 [voir mon article Le dissident russe Vladimir Boukovsky à l'Université d'Aix-en-Provence ].

 

Pour rendre compte des différentes interventions de ce colloque, je me suis inspiré largement des résumés mis à la disposition des participants, sans faire usage de guillemets qui auraient alourdi mon texte et qui n'auraient de toute façon pas correspondu à de réelles citations. 

 

La première demi-journée du colloque a été consacrée à l'histoire du libéralisme suisse.

 

Le premier intervenant, Alexis Keller, professeur à l'université de Genève, a parlé des sources intellectuelles du libéralisme suisse et a montré que les libéraux suisses, Usteri, Sismondi, Bellot, Zschokke, Monnard, Snell ou Cherbuliez, ont puisé leurs réflexions à trois sources principalement : la philosophie des Idéologues, la pensée politique britannique (l'utilitarisme et la culture whig écossaise) et la tradition républicaine. Ils s'inspiraient sans problèmes à la fois de Montesquieu, de Rousseau et d'Adam Smith.

 

Bela Kapossy, professeur à l'université de Neuchâtel, a montré ensuite quel rôle avaient joué les conflits internationaux dans la naissance du libéralisme suisse. Le libéralisme suisse est né au XVIIIème siècle. Il s'agissait, alors que se déroulait la guerre de Sept Ans, vers la moitié du siècle, pour les républiques de la Confédération, de trouver la meilleure manière de se défendre contre la pression économique et politique des puissances commerciales européennes. Modernisation de l'économie domestique, critique de la position privilégiée des villes, positionnement au sein de l'Europe d'une Suisse adepte de l'économie de marché ont nourri les débats des libéraux suisses dans la seconde moitié de ce siècle.

 

Karen Grossmann, professeur à l'Université de Zurich, à partir de l'étude des Constitutions successives  de la Confédération, de 1848, 1874 et 1999, constaste que la liberté absolue, présente à l'origine dans les deux premiers textes, s'est atomisée avec le troisième en libertés sectorielles et en droits fondamentaux, l'Etat limitant toujours plus la liberté et vidant de sens le rôle de contrôle du Tribunal fédéral toujours plus lié par la législation fédérale.

 

Olivier Meuwly, vice-président du Cercle Démocratique Lausanne et chargé de cours à l'Université de Genève, rappelle qu'une singularité du libéralisme suisse a été d'accepter l'Etat démocratique comme ferment d'une liberté au service du plus grand nombre. Le libéralisme suisse devra cette réconciliation avec la vocation gouvernementale au mouvement radical, au pouvoir pendant des décennies, au cours desquelles ce dernier développera l'Etat social, puis intégrera des socialistes au sein du Conseil fédéral. A la fin du XXème siècle il perdra de son influence, faute d'avoir réinventé des limites à l'Etat, au profit de l'UDC qui, certes, lui empruntera des éléments libéraux, mais assortis d'une vision conservatrice de la société.

 

Pierre Bessard, directeur du Liberales Institut et délégué de l'Institut Constant de Rebecque, évoque le rôle de refuge de la Suisse pour les libéraux pendant la Seconde Guerre mondiale sous la houlette de William Rappard, cofondateur de l'Institut des Hautes Etudes Internationales de Genève qui accueillera, de 1934 à 1940, Ludwig von Mises, qui partira alors aux Etats-Unis, et, de 1937 à 1966, jusqu'à sa mort, Wilhelm Röpke. Après guerre, en 1947, la Société du Mont-Pèlerin ici, enregistrée aux Etats-Unis, mais financée par la finance et l'industrie suisses, réunira en Suisse les défenseurs de la liberté face au collectivisme. William Rappard prononcera d'ailleurs le discours inaugural. Le premier président en sera Friedrich Hayek et le second Wilhelm Röpke... 

 

Le marché et l'EtatRobert Nef, président du conseil de fondation du Liberales Institut, insiste justement sur l'actualité de Röpke. Son influence a été grande sur les décideurs qui se retrouvaient dans son éthique de l'économie de marché et adhéraient comme lui aux principes de la propriété et de la concurrence, au fédéralisme décentralisé et aux limites de l'Etat fiscal. Depuis, l'Etat providence, l'Etat redistributif et l'Etat titulaire ont pris une place démesurée, incompatible avec les idéaux de Röpke. Ce dernier, à travers ses nombreux ouvrages, gagne aujourd'hui en actualité. A ce propos son livre Au-delà de la loi de l'offre et de la demande a été réédité en français en 2009 ici.

 

Uli Windisch, professeur à l'Université de Genève, raconte plusieurs faits divers qui attestent que l'insécurité n'est pas seulement un sentiment mais une réalité. Il pose donc les deux questions liées entre elles : Faut-il un Etat fort pour assurer la sécurité ? Si oui, est-ce bien compatible avec le libéralisme ? Il expose l'exemple de la ville de New York, qui, après avoir été une des villes les plus dangereuses au monde, est devenue une des plus sûres. Il explique qu'aux habituelles prévention et répression s'est ajoutée la solution de la réparation. Le délinquant, le criminel, sont tenus de réparer les dégâts qu'ils ont commis. 

 

La seconde demi-journée du colloque a été consacrée à la philosophie et à l'économie.

 

Pour Philippe Nemo, professeur à l'ESCP-EAP ici et maître de conférence à HEC, dans l'après-guerre, le libéralisme, en tant que doctrine favorable aux libertés intellectuelles, politiques et économiques, a fait ses preuves. C'est ce qui lui a pemis de l'emporter sur le modèle communiste. Il définit d'ailleurs la liberté comme capacité de non imitation. Toutefois, selon l'intervenant, les théoriciens libéraux devraient éclairer mieux qu'ils ne le font leur réponse à ce qu'il appelle les effets du mimétisme, c'est-à-dire au phénomène des bulles. Dans les domaines de la gestion pluraliste des savoirs, des institutions politiques et juridiques, de l'économie, les théories libérales sont pleinement mûries. Mais elles doivent entreprendre d'autres chantiers sur des phénomènes (qui relèvent, d'autres disciplines, telles que la sociologie, la géopolitique, l'histoire ou la morale), tels que l'immigration, les revendications identitaires, le communautarisme ou le terrorisme.

 

Le libéralisme pourra-t-il ramener l'Etat à ses dimensions naturelles ? C'est à cette question qu'a tenté de répondre Gerhard Schwarz, directeur d'Avenir Suisse ici. L'Etat a trois dimensions : libérale, coopérative et subsidiaire. Le libéralisme ne refuse pas un tel Etat, nécessaire pour garantir la liberté et la propriété, mais il souhaite le maintenir dans des limites les plus petites possibles : "Aussi peu d'Etat que possible, autant d'Etat que nécessaire". Il n'y a cependant pas de mesure objective aux dimensions de l'Etat. On peut se donner des objectifs quantitatifs ou procéduriers pour le contenir. On peut dresser la liste de ses tâches. On peut formuler les lois de façon générale, ce qui permet de laisser la plus grande liberté à l'individu. On peut édicter des interdictions et non des commandements à agir. On peut restituer des domaines à la société civile et à l'économie de marché.

 

Victoria Curzon Price, professeur honoraire à l'Université de Genève et présidente du conseil d'administration de l'Institut Constant de Rebecque ici  fait l'éloge de la petite Suisse qui a su faire de ses handicaps des avantages en les surmontant. Les Suisses ont en effet développé depuis des lustres leur goût pour l'indépendance, l'originalité de leur offre et le commerce, toutes choses qui les ont prédisposés à échanger sur un marché extérieur devenu de plus en plus mondial. Leur refus depuis longtemps de la centralisation politique aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur est aujourd'hui pour elle un facteur important de compétitivité.

 

Vincent Valentin, maître de conférences à l'Université Panthéon-Sorbonne et à Sciences-Po, s'est attaché à montrer que le droit positif n'est pas une menace pour le libéralisme. Selon l'intervenant il faut distinguer entre science du droit et philosophie du droit. La science du droit est descriptive et ne se prononce pas sur la philosophie qui le sous-tend. Aux libéraux de faire valoir leur conception pour faire évoluer le droit.

 

Gerd Habermann, professeur honoraire à l'université de Potsdam et président exécutif de la F.A. von Hayek Stiftung ici, dresse un portrait du combat des libéraux contre l'Etat-providence depuis son apparition en Prusse au XVIIIe siècle. La critique est alors morale, esthétique, politique et économique. Elle est menée par Mirabeau, les auteurs "classiques" allemands et Emmanuel Kant. Au XIXe siècle les libéraux triomphent dans les domaines économique et politique. Mais les réformes de Bismarck viennent réduire à néant leurs efforts. Une période néolibérale s'ouvre après la Seconde Guerre mondiale, mais elle s'accommode d'un Etat providence de plus en plus égalitariste. Lueur d'espoir : les mouvements libéraux connaissent un renouveau ... à l'extérieur du Parlement.

 

Il revenait à Pierre Weiss, député au Grand Conseil genevois et vice-président du Parti Libéral-Radical, de conclure ce colloque. Le libéralisme a-t-il triomphé ? A-t-il gagné ou perdu une étape ? Difficile de répondre. L'intervenant pense que le libéralisme doit redonner toute sa place aux valeurs et à la morale, aux devoirs aussi bien qu'aux droits, qu'il doit dessiner un nouveau paysage dans lequel figurent en bonne place dignité, responsabilité et éthique.

 

Francis Richard

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31 août 2009 1 31 /08 /août /2009 06:00

Le 25 août 2009, Vladimir Boukovsky [photo ci-contre, prise par votre serviteur], le dissident russe, a pris la parole à l'issue de la deuxième journée de la 31ème Université d'été de la Nouvelle Economie (ici) [1], qui se déroule depuis 31 ans à l'Université Paul Cézanne d'Aix-en-Provence, à l'exception de l'interruption de l'an passé. 

Sa conférence avait pour thème : Comparaison entre l'Union européenne et l'URSS, thème qui a fait l'objet de son dernier ouvrage, paru il y a quatre ans aux éditions du Rocher (ici) et intitulé L'Union européenne, une nouvelle URSS ?.

Pour les jeunes internautes il faut rappeler que Vladimir Boukovsky, avant d'être échangé par l'URSS, à l'âge de 34 ans, en 1976, contre le communiste chilien Luis Corvalan, a séjourné au total 12 ans en camp, prison et asile psychiatrique soviétiques. Il s'est rendu célèbre dans le monde libre à la faveur de la sortie son livre, au titre évocateur, Une nouvelle maladie mentale en URSS : l'opposition, publié au Seuil en 1971.

Lors de son intervention Vladimir Boukovsky a souligné les similitudes qui existent entre l'Union européenne et l'Union soviétique. Toutes deux ont la caractéristique d'être dirigées par des personnes non élues, la Commission et le Politburo, d'être contrôlées par un parlement réduit à l'impuissance, le Parlement européen et le Soviet suprême, d'être administrées par des technocraties composées de centaines de milliers de personnes jouissant de gros salaires et de privilèges exorbitants.

Si l'URSS s'est constituée par la contrainte militaire, l'UE se constitue par la contrainte économique. C'est quand l'URSS a cessé de se développer qu'elle s'est écroulée. Il est vraisemblable qu'il en sera de même avec l'Union européenne qui ne cesse de s'élargir. Avec l'Union soviétique il s'agissait de créer la nationalité soviétique, abolissant les nations, traditions et coutumes du passé. Il semble que ce soit bien le même but recherché par l'Union européenne qui veut leur substituer la nationalité européenne.

La corruption régnait en URSS, du haut vers le bas. L'Union européenne n'a rien à lui envier. Le déni de démocratie qui caractérisait la défunte URSS se retrouve de même dans l'Union européenne qui ne tient compte que des votes populaires favorables et refuse de tenir compte des votes contraires. Elle fait voter encore et encore, jusqu'à ce que les peuples fassent enfin le bon choix, celui de leur esclavage programmé.

Le politiquement correct a remplacé le goulag : il n'est pas bon aujourd'hui comme hier d'être un dissident. Vous risquez de le payer cher, d'être puni, d'être baillonné. 32 crimes ont été inventés, répertoriés pour vous condamner. Vous n'avez plus le droit, par exemple, de vous exprimer librement sur des sujets devenus tabous tels que la race ou la sexualité et encore moins d'en faire des sujets de plaisanteries. C'est le commencement de la perte de liberté et celui du goulag. C'est ainsi que l'Autriche a été frappée d'ostracisme parce que son peuple avait élu le mauvais gouvernement, aux yeux des élites de l'Union européenne.

L'Union soviétique, après s'être écroulée, est devenu un champ de ruines et le théâtre de guerres ethniques. C'est ce qui attend l'Union européenne, qui, tôt ou tard, subira le même sort. Certes, à l'Est, le communisme s'est installé violemment, et, à l'Ouest, la social-démocratie s'installe graduellement. Mais au final le résultat est le même parce que le but recherché est le même : l'instauration du paradis sur terre, bon gré, mal gré, et surtout mal gré.

Cette similitude entre l'Union européenne et l'Union soviétique n'est pas le fruit du hasard. Cette convergence a été voulue, même si elle a finalement échoué avec la réunification de l'Allemagne, qui a remis en cause les plans de Gorbatchev et des gouvernements socio-démocrates qui le soutenaient. Cette réunification a été un réel désastre pour lui. Vladimir Boukovsky pense que cette convergence se poursuit entre Vladimir Poutine et l'UE, qui paraît bien indulgente à son égard...

Vladimir Boukovsky répond alors à des questions. Pour lui  la solution, pour se sortir de ce piège, est de revenir à un espace économique européen et de renoncer désormais à toute construction politique européenne. Pour ce qui concerne le réchauffement climatique, il pense que d'en faire un problème global permet de faire croire que la solution ne peut être que globale et qu'elle ne peut être mise en oeuvre que par un gouvernement global. Alors qu'en réalité le changement climatique est en corrélation avec l'activité solaire et n'a rien à voir avec l'activité humaine.   

La veille de cette intervention qui s'est achevée par des applaudissements nourris, Vladimir Boukovsky avait reçu, dans le jardin du Pavillon Vendôme, des mains de  Jules Susini, adjoint-délégué au maire d'Aix-en-Provence, la médaille de la ville, dessinée par Paul Cézanne. A chaque Université d'été de la Nouvelle Economie il est de tradition qu'un de ses invités reçoive ainsi cette distinction de la part de cette ville d'accueil. J'ai filmé pour les internautes ce moment historique au cours duquel Monsieur Susini, sous le coup de la chaleur et de l'émotion, a fait un lapsus qui lui sera pardonné en raison de sa grande gentillesse :


En tout cas ceux qui rêvent de construire le meilleur des mondes européen feraient bien d'écouter ce héros de la liberté justement récompensé à Aix, s'ils veulent éviter que leur rêve ne se transforme en un véritable cauchemar.

Francis Richard 

[1] Lors du dîner inaugural de cette année, l'invité d'honneur était le président tchèque Vaclav Klaus. Dans son intervention ce dernier a remarqué que le titre de Nouvelle Economie n'était pas adéquat et qu'il lui faisait penser à l'économie keynésienne. Selon lui il vaudrait mieux parler d'économie éternelle. En fait ce titre de Nouvelle Economie est historique. Il avait été inventé par Jacques Garello, à une époque où l'on parlait des nouveaux philosophes et de la nouvelle cuisine, pour indiquer une rupture avec les idées économiques socialistes de l'époque.

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Présentation

  • : Le blog de Francis Richard
  • : Ce blog se veut catholique, national et libéral. Catholique, il ne s'attaque pas aux autres religions, mais défend la mienne. National, il défend les singularités bienfaisantes de mon pays d'origine, la France, et celles de mon pays d'adoption, la Suisse, et celles des autres pays. Libéral, il souligne qu'il n'est pas possible d'être un homme (ou une femme) digne de ce nom en dehors de l'exercice de libertés.
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  • Francis Richard
  • De formation scientifique (EPFL), économique et financière (Paris IX Dauphine), j'ai travaillé dans l'industrie, le conseil aux entreprises et les ressources humaines, et m'intéresse aux arts et lettres.
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