Mélanie Chappuis aime-t-elle se mettre dans la tête des autres? En tout cas elle le fait très bien. Écrits pour le théâtre, les monologues de ce recueil où elle parle d'Exils puis de Femmes amoureuses le montrent s'il en était besoin.
Mélanie Chappuis s'était déjà livrée à cet exercice avec bonheur en tenant des chroniques dans Le Temps du 24 janvier 2013 au 19 décembre 2014. A l'époque elle s'était mise dans la tête de toutes sortes de personnes, célèbres ou pas.
Cette fois elle fait dire tout haut ce que pensent tout bas des exilés et des femmes amoureuses. Se mettre dans leur tête semble aisé pour elle; c'est une façon de les aimer comme autant de frères humains et de soeurs humaines.
Les exilés ne l'ont pas toujours voulu. Souvent d'ailleurs ils n'ont pas eu le choix, a fortiori quand ce sont leurs parents ou grands-parents qui l'ont fait. Leur apparence trahit alors parfois leur pays d'origine, même s'ils n'y sont jamais allés.
En fait, les exilés gardent souvent deux pays dans leur coeur, celui d'où eux et/ou leur famille proviennent et celui où ils sont établis. Mélanie rend très bien ce sentiment qui n'est pas toujours forcément douloureux, mais qui est pregnant.
Dans un de ses seize textes d'exils, elle dit notamment ceci, qui résume bien ce qui peut se manifester dans la tête d'un exilé, quel qu'il soit, et qui n'est pas maîtrisable: L'homme est un arbre. Ce n'est pas dans sa nature d'être déplacé.
Mélanie Chappuis a écrit trente-huit textes où des femmes amoureuses disent ce qu'elles ont dans le coeur, sur le coeur, et à l'esprit. C'est instructif pour les hommes et rassurant pour les femmes qui se reconnaîtront en telle ou telle.
Dans les relations amoureuses, la raison perd ses droits. Et les sentiments et les sens prennent le dessus sur elle, se nourrissent de manques ou de présences, de mots tus ou exprimés, de gestes rêvés ou réels, de passé ou d'avenir...
Une des femmes amoureuses sait comment faire pour se sortir d'un chagrin d'amour...: Ça semble idiot de préciser, mais vraiment quand on aime on préfère souffrir d'aimer que ne plus aimer. Donc d'abord ne plus aimer souffrir d'aimer...
Francis Richard
Exils suivi de Femmes amoureuses, Mélanie Chappuis, 96 pages, BSN Press
Représentation théâtrale:
Femmes amoureuses, au Théâtre Alchimic, à Carouge (2017)
Livres précédents:
Des baisers froids comme la lune Bernard Campiche Editeur (2010)
Un thé avec mes chères fantômes Éditions Encre fraîche (2016)
Ô vous, soeurs humaines Slatkine & Cie (2017)
La pythie Slatkine (2018)