Après avoir fait paraître Pourquoi je suis moyennement démocrate, en mai 2002, Vladimir Volkoff a cru bon de lui donner une suite, deux ans plus tard, en mai 2004.
Pourquoi je serais plutôt aristocrate précise en effet comment il conçoit le gouvernement des hommes, une conception qui semble très éloignée de celle de l'époque. Encore que...
L'auteur tient à s'affubler du qualificatif d'aristocrate par esprit de contradiction. Dans la société où il vivait - et où nous vivons -, il n'y aurait point de salut hors de la démocratie.
Dans le précédent essai, il avait opéré une censure mesurée de la démocratie, il examine cette fois l'anti-démocratie, son antonyme qu'est l'aristocratie, dont le principe est opposé:
- la démocratie [...] se fonde sur la quantité des suffrages,
- l'aristocratie [...] sur la qualité des personnes.
Il ne faut pas confondre gouvernement et structure. La démocratie et l'aristocratie sont des modes de gouvernement, la république et la monarchie sont des structures.
La démocratie peut produire une république - qui est une polyarchie - aussi bien qu'une monarchie. Il en est de même pour l'aristocratie. Les exemples fourmillent.
Il ne faut pas confondre non plus aristocratie et noblesse. L'aristocratie est affaire de qualité, tandis que la noblesse qui vient de connu en latin, est affaire d'illustration.
C'est pourquoi il existe des adeptes de la démocratie aussi bien dans la noblesse que dans le peuple, et inversement d'adeptes de l'aristocratie dans le peuple que dans la noblesse.
Si, en grec, le substantif kratos signifie force, domination, puissance souveraine, aristos est le superlatif de agathos, ce qui évoque:
- la qualité,
- un maximum de qualité,
- plus de qualité que les autres.
Autre distinction:
- la démocratie est une utopie: on ne peut être égaux que si l'on est identiques, or, en démocratie 1=1, c'est-à-dire un imbécile égale un génie, et un voyou égale un saint.
- l'aristocratie est un idéal: il serait bon que les meilleurs soient les plus puissants, et réciproquement.
L'auteur remarque:
On n'en finirait pas de faire la liste des hommes politiques sans don ni compétences que publicitaires et qui furent portés au pouvoir par les suffrages d'un peuple abusé.
Suivez mon regard...
Qui peut juger de la qualité d'un postulant en une quelconque matière?
- Les maîtres dans le domaine en question.
- Les pairs du postulant.
- Le peuple souverain, c'est-à-dire une majorité ignorante de la spécialité dont il s'agit.
Il en résulte que la démocratie aplatit la réalité, tandis que l'aristocratie, éprise de toutes les qualités, exalte toutes les différences.
Autre distinction:
- La démocratie est une idéologie;
- l'aristocratie est une physiologie.
Que les hommes soient différents a pour conséquence, c'est un fait de nature, que d'aucuns sont supérieurs à d'autres dans tel ou tel domaine.
Les supériorités existent, ce qui ne veut pas dire que des erreurs caricaturales ne puissent pas être commises au nom du principe de supériorité...
L'aristocratie est :
- un fait de société, que ce soit dans le commerce, dans l'armée, dans le sport;
- une philosophie: c'est la philosophie de la différence: qui aime la différence ne peut pas aimer l'égalité;
- une éthique: le pouvoir des meilleurs [...] est non pas un droit mais un devoir, non pas une prétention, mais un service.
Le langage, parce que fondé sur la qualité, est aristocrate; ainsi sont aristocratiques:
- le vocabulaire,
- la grammaire,
- l'orthographe,
- la prononciation.
La tendance moderne est à l'écrasement de la langue...
Le christianisme est aristocrate: l'Église du Christ est fortement, peut-être excessivement, structurée.
Le couple est aristocrate: L'aristocratie n'est pas l'art d'être supérieur à autrui; c'est l'art d'être soi-même mieux qu'aucun autre ne saurait l'être. Et si on le fait à deux, il y a une chance proprement miraculeuse pour qu'en jaillisse la vie.
Vladimir Volkoff reconnaît que l'Histoire a quelquefois justifié, ou en tout cas légitimé, la démocratie:
Je ne songe pas à nier que le serment du Grütli (1291), qui a fondé la Confédération helvétique, ou la Boston Tea Party (1773), qui est à l'origine des États-Unis, n'aient produit des résultats d'importance.
Il constate in fine que la démocratie, en étant persuadée que le suffrage universel égalitaire est le meilleur mode de choix des meilleurs candidats et en s'imaginant mettre la quantité au service de la qualité, a une préoccupation aristocratique:
Dès qu'on dit "mieux" ou "meilleur", on pose la recherche de la qualité, c'est-à-dire que, peut-être sans le vouloir ni le savoir, on est aristocrate.
Francis Richard
Pourquoi je serais plutôt aristocrate, Vladimir Volkoff, 160 pages, Éditions du Rocher
Livre précédent:
Pourquoi je suis moyennement démocrate (2002)
Sur l'auteur:
Vladimir Volkoff priait Jeanne pour les libertés de boire et de fumer le 8 mai 2005.