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16 novembre 2008 7 16 /11 /novembre /2008 21:00

Le 27 novembre prochain, le groupe parlementaire UDC choisira le candidat qu'elle compte présenter à la succession de Samuel Schmid.  En attendant les spéculations vont bon train. Il est intéressant de faire la revue des positions des partis. De gauche à droite.

 Le Matin Dimanche ici ) rappelle que seuls les Verts suisses ont une position claire sur le retour de l'UDC au gouvernement :  ils ne veulent pas d'un candidat qui sera à coup sûr néolibéral et anti-environnemental, c'est-à-dire qui sera pour la libre économie et qui refusera le dogme de la responsabilité humaine dans le réchauffement climatique, bref qui refusera clairement leur doctrine totalitaire et ses conséquences liberticides. C'est limpide comme l'eau de roche !

La seule chose dont les socialistes suisses soient sûrs c'est qu'ils ne veulent pas de Christoph Blocher - leur meilleur ennemi, donc la meilleure promotion qu'ils puissent faire pour lui  - et  qu'ils ne voteront pas pour lui s'il se présente. Autrement ils ne demandent pas que le candidat UDC respecte tel ou tel point de programme.  Ils ne peuvent tout de même pas avoir cette exigence, qui se retournerait contre eux dans trois ans, et qui ne correspond d'ailleurs pas à l'esprit de la démocratie de concordance.  

Alors les socialistes se rabattent  sur les valeurs : « Il est par exemple exclu, rapporte Le Matin Dimanche, qu'un candidat UDC ne respecte pas l'Etat de droit et soutienne l'initiative anti-minarets. De même pour le respect de la Convention européenne des droits de l'homme, dont Blocher a voulu que la Suisse se retire en son temps.» Ce faisant ils tentent de se donner le beau rôle, qui ne leur va pas bien au teint, un peu trop rose.

Si le soutien à l'initiative anti-minarets peut se prouver facilement, sur quels critères les socialistes décideront-ils que le candidat présenté par l'UDC ne respecte pas l'Etat de droit ? Mystère. Evidemment Christoph Blocher, à leurs yeux, remplit tous les critères, même s'ils seraient bien en peine d'en faire une démonstration plus convaincante que celle échafaudée de toutes pièces l'an passé par l'un des leurs, qui répond au nom gaulois de François Cherix.

Le PDC (Parti démocrate-chrétien) est ambigu. Comme toujours. C'est ce qui ne fait pas son charme, et lui vaut une défaveur croissante de la part des citoyens.

D'un côté Urs Schwaller, son président de groupe parlementaire, voterait sans état d'âme pour Ueli Maurer, l'ancien président de l'UDC suisse, qui est pourtant un UDC pur sucre, comme les Verts ne les aiment pas.

D'un autre côté, interrogé par Le Matin Dimanche, Christophe Darbellay pose des conditions : les candidats présentés par l'UDC - il est pourtant peu probable qu'elle en présente plusieurs - doivent apporter la garantie qu' « ils respecteront  la collégialité, les institutions et s'engageront sans réserve pour la voie bilatérale. Rien de plus normal : on a bien demandé à la socialiste Micheline Calmy-Rey si elle était pour l'armée avant de l'élire! »

Et si l'UDC présente Christoph Blocher ? Vade retro satanas ! Dans ce cas-là les démocrates-chrétiens présenteront un candidat.

Les plus prudents sont les radicaux. Le Matin Dimanche rapporte : « Le président Fulvio Pelli s'est contenté de signaler que Blocher n'aurait aucune chance de revenir, mais il a refusé de poser des conditions à l'UDC pour l'heure. » Isabelle Moret la vice-présidente du parti est plus loquace : « L'UDC a bien sûr le droit de faire élire un candidat qui porte son programme. Mais une fois au gouvernement, il devra accepter de porter les décisions collégiales, même s'il est minorisé. Ce que font les socialistes, somme toute. Quant à la question Blocher, l'UDC ne serait pas crédible de le présenter, à moins qu'elle choisisse l'opposition. Elle devrait offrir un ticket à deux candidats ne comprenant pas Blocher.»

Dans le même numéro du Matin Dimanche ( ici ) que dit Christoph Blocher sur le nom du candidat UDC ? Il répond tout naturellement que c'est au groupe parlementaire UDC que revient la tâche de choisir le candidat qui sera présenté aux suffrages du parlement, mais il en dresse le portrait de la manière suivante, qui lui ressemble, à s'y méprendre :

« L'heure est grave face à une situation de crise pour l'économie et pour l'armée (c'est moi qui souligne). Nous allons donc au-devant d'une lourde responsabilité à porter avec un seul représentant UDC au gouvernement, alors que nous aurions droit à deux sièges. Et, surtout, les autres vont tout faire pour attaquer celui ou celle qui sera élu. Car, on ne nous loupera pas si nous ne parvenons pas à redresser le Département de la défense, après avoir dit qu'il était si mal géré et qu'il ne fonctionnait pas. Pour affronter ce défi, il faut donc quelqu'un de très solide. »

Sera-t-il candidat ? Il fait cette réponse qui met les autres partis en face de leur responsabilité : « On aimerait tellement que je dise que je ne veux plus ! Et ensuite on pourrait dire qu'on m'aurait volontiers élu, mais que, voilà, j'ai renoncé de moi-même. Non, les autres doivent annoncer la couleur et dire s'ils ne veulent plus ni de moi, ni de la politique de l'UDC au Conseil fédéral ! A part la gauche, les radicaux et le PDC n'ont pas encore dit clairement qu'ils excluent de me réélire (c'est moi qui souligne). »


Il ajoute : « Il ne suffit pas que MM. Pelli ou Darbellay se prononcent personnellement et disent que je n'aurais aucune chance d'être élu ou qu'ils ne me veulent pas, sans indiquer les raisons (c'est moi qui souligne). Il faut que les groupes parlementaires décident clairement. Mais, ils ne savent plus trop quoi faire, à force d'avoir voté contre Blocher puis pour Blocher en croyant m'emprisonner au Conseil fédéral, pour ensuite m'éjecter car l'UDC a gagné comme jamais... »

Pour Christoph Blocher l'UDC doit retrouver sa place au gouvernement, « mais pas à tout prix (c'est moi qui souligne). Voyez comme les autres partis sont déjà en train de poser leurs conditions. Nous ne devons pas l'accepter et revivre ce que nous avons vécu avec Samuel Schmid. Quant à savoir si nous revenons au Conseil fédéral, si c'est avec Blocher ou pas, c'est aux autres de décider ! »

La démocratie de concordance est la force de la Suisse, continue-t-il : on élit « des représentants de partis dont on ne partage pas les idées pour gouverner ensemble. C'est la force de la Suisse. Sauf que quand il s'agit de l'UDC, on exige que nous partagions le programme des autres! ».

Le journaliste du Matin Dimanche regimbe : « Vous exagérez: le PDC est par exemple déjà en train de nuancer son exigence sur la libre circulation des personnes avec l'UE... »

Christoph Blocher lui répond : « Oui, bien sûr, le PDC se rend compte qu'il perd des voix en s'opposant par trop à notre présence au Conseil fédéral. Car, leur base n'a pas compris le coup du 12 décembre dernier et le PDC l'a déjà payé lors de plusieurs élections cantonales ces derniers mois. Donc, oui, nous avons de bonnes chances de revenir au gouvernement. Mais je ne peux pas encore vous dire si notre choix sera respecté... ».

De tout cela que peut-on conclure ? D'abord que l'UDC a été victime d'un simulacre de démocratie de concordance le 12 décembre 2007. Ce jour-là, le parlement a feint d'élire deux UDC au Conseil fédéral pour respecter la concordance, tout en sachant fort bien que ni l'un ni l'autre des conseillers fédéraux élus ne représentait le courant majoritaire de ce parti.

En procédant ainsi le parlement a certes respecté la légalité et la lettre, mais pas la légitimité et l'esprit de la démocratie de concordance. Il en est résulté que l'UDC a été rejetée dans l'opposition, sans que cela soit un vrai choix de sa part. La preuve en est que l'UDC a toujours voulu être représentée au gouvernement et que ce sont les autres partis qui ne l'ont pas voulu.

Il ressort notamment des déclarations des uns et des autres que le courant majoritaire de l'UDC est tout à fait fondé à occuper le siège de Samuel Schmid que ce dernier avait en quelque sorte usurpé, franchissant en cours d'année le Rubicon pour rejoindre le PBD (Parti bourgeois démocratique), groupuscule squelettique et sans avenir, sur lequel il ne pouvait évidemment pas s'appuyer pour exercer sa tâche gouvernementale.

Les autres partis que l'UDC, hormis les Verts, qui vivent dans une autre planète, se rendent compte qu'ils n'ont rien à gagner à continuer d'exclure du Conseil fédéral le courant majoritaire de l'UDC, alors que « l'heure est grave face à une situation de crise pour l'économie et pour l'armée » comme le rappelle Christoph Blocher. S'ils le font tout de même, ils savent bien qu'ils devront assumer l'entière responsabilité des difficultés auxquels ne manqueront pas d'être confrontés les Suisses. Ce qu'ils risquent de payer très cher dans trois ans et ce qui favoriserait une nouvelle progression de l'UDC.

Pour le moment ces autres partis ne sont capables de dire qu'une chose : ils ne veulent plus de Christoph Blocher dont ils reprochent le comportement sans être capables de définir clairement, et de manière argumentée, en quoi il est répréhensible. Ce qui est un peu court, même pour l'opinion façonnée comme on sait par les média. C'est l'aveu que Christoph Blocher leur fait de l'ombre...

Le problème de ces autres partis est qu'ils veulent le beurre, l'argent du beurre et la crémière : ils veulent un UDC dur, mais malléable, et qui se fait tout petit.

Dans ces conditions l'UDC peut très bien présenter à nouveau la candidature de Christoph Blocher. Que risque-t-elle ? Rien. Compte tenu des circonstances, qui ne sont pas les mêmes qu'il y a un an, les autres partis risquent gros.

Un ministère de la Défense dirigé par Christoph Blocher serait un gros défi, tout à fait à sa mesure. Tout le monde aurait à y gagner. Encore faudrait-il que les autres partis fassent taire leurs petites rancunes et songent pour une fois au bien du pays plutôt qu'à leurs susceptibilités... Mais c'est sans doute trop leur demander.

Francis Richard

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  • Francis Richard
  • De formation scientifique (EPFL), économique et financière (Paris IX Dauphine), j'ai travaillé dans l'industrie, le conseil aux entreprises et les ressources humaines, et m'intéresse aux arts et lettres.
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