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11 avril 2012 3 11 /04 /avril /2012 18:25

AfschriftPortraitThierry Afschrift, professeur de droit fiscal à l'Université libre de Bruxelles et avocat ici inscrit aux barreaux de Bruxelles, Madrid, Genève et Luxembourg, répond à cette question dans une étude publiée hier sur le site de l'Institut Constant de Rebecque ici.

 

Cette question pourrait être reformulée: jusqu'où peut-on prendre dans la poche des plus "riches" pour remplir celle des plus "pauvres"?

 

Avec la crise de l'endettement des Etats-Providence, il s'agit de chercher l'argent où il se trouve quand les caisses publiques sont vides. Il n'est donc pas étonnant que les hommes politiques de nombreux pays surendettés, qu'ils soient de droite ou de gauche, veuillent "faire payer les riches". Il est plus étonnant que la question ne soit plus purement académique dans un pays comme la Suisse, où la gestion cantonale et fédérale a été pourtant bien moins folle qu'ailleurs, grâce au frein à l'endettement. 

 

En Suisse plusieurs cantons - Zurich, Schaffhouse, Appenzell Rhodes-Extérieures - ont supprimé la possibilité de convenir d'un impôt sur la dépense - mieux connu sous le nom de forfait fiscal - avec leurs autorités fiscales. Une initiative populaire lancée par La Gauche est même en cours de récolte de signatures pour l'abolir dans toute la Suisse ici. Le libellé est très explicite: "Halte aux privilèges fiscaux des millionnaires (abolition des forfaits fiscaux)".  

 

Alors que les droits de successions des conjoints survivants, des descendants et des ascendants ont disparu dans la quasi totalité des cantons, une autre initiative, en cours de récolte de signatures, a été lancée pour imposer au taux de 20% les successions supérieures à 2 millions de francs ici. Le libellé est là encore très explicite: "Imposer les successions de plusieurs millions pour financer notre AVS (Réforme de la fiscalité successorale)".

 

La question que pose Thierry Afschrift est donc d'une brûlante actualité, même ici. Cette question présuppose que la redistribution des richesses, puisqu'il s'agit de cela, est indiscutable, qu'elle va de soi et que ses limites ne sont atteintes que quand elle devient contre-productive, inutile. C'est le fameux principe d'utilité marginale:

 

"La redistribution est censée enlever moins de "bonheur" (rapidement assimilé à la richesse) aux uns qu’elle n’en attribue aux autres, de sorte que, sans créer des richesses nouvelles, elle attribue plus de satisfactions qu’elle n’en retire, et est dès lors perçue comme positive."

 

Cela n'est évidemment possible qu'en sacrifiant quelques uns pour faire le bonheur de tous les autres. Or cela n'a été rendu, et n'est toujours rendu, possible que par le conditionnement des uns en question à qui on - les religions et les Etats prédateurs - a inculqué ce sentiment qu'ils devaient se sacrifier pour les autres. Le seul problème est qu'on ne leur demande pas leur consentement individuel et que le sacrifice qui leur est demandé l'est par la force.



Thierry Afschrift remarque fort à propos que ce sacrifice imposé par la force à quelques uns contrevient donc à deux commandements de Dieu: le septième, "Tu ne voleras pas", et le dixième, "Tu ne convoiteras pas le bien d'autrui". Il ajoute que le "Rendez donc à César ce qui est à César, à Dieu ce qui est à Dieu" du Christ peut être interprété "comme signifiant que la religion ne se préoccupe pas des impôts et n’a donc pas à justifier ni à critiquer leur perception, ni à obliger à leur paiement".

 

La force peut revêtir plusieurs formes, puisqu'elle peut être exercée par un tyran ou l'être par une majorité sur une minorité. Dans le cas du tyran il s'agit de la force à l'état brut. Dans celui de la majorité il s'agit de la force maquillée en contrat social version Hobbes ou version Rousseau, qui n'a pas davantage de légitimité morale que la tyrannie:

 

"Justifier l’impôt, et son montant, par le consentement des contribuables, exprimé dans un contrat social se heurte évidemment au fait que personne ne peut justifier de l’existence d’un contrat, et encore moins de son contenu."

 

Il est une autre version du contrat, celle du contrat hypothétique, formulé dans sa Théorie de la justice par le philosophe américain John Rawls [sur les travaux duquel Philippe Manière se base pour justifier une plus forte taxation du patrimoine et une moindre taxation des revenus et des mesures étatiques dans le domaine social, le but étant de rendre les inégalités en France supportables et compatibles avec la mondialisation ici]. Ce contrat aurait dû être conclu pour ne prévoir qu'un principe de différence:



"Du point de vue du patrimoine et des revenus, les seules inégalités acceptables sont celles qui ne peuvent avoir pour effet de rendre la situation des moins favorisés moins favorable que si elles n’existaient pas."



Thierry Afschrift commente:



"Cette conception est [...] extrêmement égalitariste, notamment parce qu’elle a pour ambition de permettre à l’État de corriger même les conséquences patrimoniales du fait que certaines personnes sont naturellement plus douées que d’autres, sous prétexte de la nécessité d’une cohésion sociale, d’une coopération générale entre les individus."



L'avocat bruxellois pose alors la question fondamentale à propos du contrat, sous quelque forme qu'il soit:



"Pourquoi, en effet, la volonté de la majorité, ou de ceux qui prétendent agir au nom de celle-ci, serait-elle plus juste que la répartition initiale des avoirs, qui résulte du travail et de l’épargne de chacun?"

 

Dans tous les cas la répartition des richesses n'a pas d'autre fondement que la force, la prétendue solidarité, qui est un moyen de se faire une clientèle, n'échappant pas à cette règle. Thierry Afschrist cite Bertrand de Jouvenel:

 

"La chemin de la puissance passe par le service rendu."  



En conclusion :



"Le système de répartition par l’impôt n’a pas de légitimité morale, mais repose exclusivement sur la force.

On peut sans doute préférer que la force soit celle du nombre plutôt que celle d’un tyran. Mais cela reste une question de force, et non de justice."



Pour mieux faire admettre l'usage de la force:

 

"La "morale du sacrifice", héritée de la Religion et des pouvoirs absolus est un instrument idéal pour ceux qui gouvernent aujourd’hui. Rien de tel, en effet, que de convaincre le contribuable qu’il est obligé de se sacrifier, au profit de ceux qui bénéficient des largesses du pouvoir."  



Francis Richard

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6 avril 2012 5 06 /04 /avril /2012 22:45

Hans-Rudolf-Merz.jpgLe 23 mars 2007 était voté par le Parlement suisse un Arrêté sur "l'amélioration des conditions fiscales applicables aux activités entrepreneuriales et aux investissements".

 

Un référendum était déposé le 12 juillet 2007 et l'Arrêté était soumis à votation le 24 février 2008. Il n'était approuvé de justesse que par 50,5% des voix.

 

Près de 4 ans plus tard, en décembre 2011, le Tribunal fédéral statuait sur une demande d'annulation de cette votation faite par une conseillère nationale socialiste bernoise, Margret Kiener Nellen. Dans son recours celle-ci invoquait les déclarations du conseiller fédéral Hans-Rudolf Merz, chef du Département fédéral des finances de l'époque [dont la photo provient d'ici], et des partisans de l'Arrêté.

 

Par leurs déclarations ces derniers avaient mal informé le peuple en prétendant que le manque à gagner fiscal résultant de cette réforme profiterait en premier lieu aux PME et qu'il se limiterait à quelques dizaines de millions de francs pour la Confédération et les cantons, ce que contestaient alors les adversaires de l'Arrêté, brandissant des chiffres autrement plus alarmants, sans être toutefois en mesure de les prouver.

 

Tout en critiquant ouvertement l'insuffisance d'information donnée par le Conseil fédéral sur le risque de forte baisse des rentrées fiscales pour les caisses publiques, les juges du Tribunal fédéral ont cependant rejeté le recours de Margret Kiener Nellen au motif que la réforme était appliquée depuis près de trois ans, que les contribuables s'étaient adaptés aux nouvelles règles et qu'il n'était donc plus possible de revoter sur l'objet...

 

Certes les adversaires de la réforme avaient peut-être raison de parler de l'incidence de celle-ci sur les rentrées fiscales. Mais en pointant du doigt cette seule incidence, ils omettaient volontairement de parler du principe à l'origine de cette éventuelle baisse significative, la volonté d'atténuer la double imposition que subissent in fine les actionnaires puisque les sociétés paient un impôt sur les bénéfices et que les actionnaires en tant que tels paient à leur tour un impôt sur les revenus issus de ces bénéfices nets d'impôts que sont les dividendes.

 

Le raisonnement du législateur était qu'en pénalisant les distributions de bénéfices la préférence était donnée à l'autofinancement, avec des effets pervers sur le marché des capitaux. Les nouvelles entreprises à fort développement avaient du mal à se financer. Les entreprises anciennes avaient des capacités de financement supérieures à leurs propres possibilités d'investissements rentables.  

 

Comme c'est la saison des assemblées générales d'actionnaires, Le Temps, dans son édition d'hier ici, s'est fait un malin plaisir populiste d'évaluer pour l'année 2011 les sommes, distribuées par les plus grandes entreprises suisses, qui ne seront pas soumises à l'impôt anticipé grâce à cette réforme: 8 milliards de francs. Cette manchette du quotidien genevois participe évidemment d'une campagne de presse destinée à favoriser la révision de l'Arrêté parlementaire du 23 mars 2007, entré en vigueur le 1er janvier 2009.

 

Le Temps, après avoir rappelé que la réforme permet d'alléger l'impôt anticipé sur les distributions de réserves de capital, se livre à des extrapolations fantaisistes. Si l'allègement sur l'impôt anticipé est estimé par l'AFC, l'Administration fédérale des contributions, à 600 millions de francs en 2011 pour 24 milliards de réserves de capital distribuées (quelques lignes plus haut le journaliste du Temps parle d'un allègement de 1,2 milliard...), alors, les réserves totales des entreprises suisses étant de 700 milliards de  francs, leur distribution coûterait entre 11 et 18 milliards de francs...

 

La leçon de toute cette cabale est que les adversaires de la réforme veulent bien qu'elle s'applique aux PME, mais pas aux grandes entreprises. Les mêmes se déclarent, en d'autres occasions, quand cela les arrange, en faveur de l'égalité de traitement... On ne sera pas surpris que les adversaires de la réforme se recrutent dans les rangs socialistes... et qu'ils ne soient pas ravis de l'aubaine qui obligera les autorités à diminuer les dépenses publiques en conséquence...

 

Il serait plus juste, si tant est que les impôts puissent se justifier en dehors du financement des fonctions régaliennes de justice et de sécurité, non pas d'atténuer la double imposition inique que subissent les actionnaires, mais de la supprimer purement et simplement, indépendamment de toutes considérations sur le marché des capitaux, pour le simple respect de leurs droits de propriété, qui ne sont pas moins estimables que les autres.

 

Francis Richard 

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12 mars 2012 1 12 /03 /mars /2012 22:30

Franz-Weber-copie-1.jpgHier les votations ont été l'occasion pour le peuple suisse de refuser deux sur les trois objets liberticides, ceux relatifs au "prix unique du livre" ici par 56,1% des voix et aux "six semaines de vacances annuelles pour tous" ici par 66,5%. 

 

C'est presque un sans faute. Ce n'est évidemment pas satisfaisant pour ceux qui défendent société et économie libres. 

 

L'écart entre les oui et les non étant de 28'445 voix, il s'en est donc fallu de quelque 14'223 électeurs votant non au lieu de oui pour que l'objet liberticide sur le quota unique de "20% de résidences secondaires" dans toutes les communes de Suisse ici ne soit, lui aussi, refusé.

 

Au début du mois de février 2012 le sondage, mandaté par la SSR, devenue entre-temps RTS, de l'institut de recherche gfs.bern ici révélait que 61% des personnes interrogées étaient prêtes à accepter cet objet, contre 27% prêtes à le refuser et 12% d'indécis.

 

Un sondage effectué par le même institut il y a 12 jours, soit trois à quatre semaines plus tard, montrait que le camp des oui n'était plus que de 52% face aux 37% du camp des non, 11% restant indécis. Le résultat final - 50,6% de oui et 49,4% de non -, montre que la campagne des opposants n'a peut-être pas été assez longue ou qu'elle n'a pas été assez rondement menée dans les villes.

 

Car le résultat fait apparaître un fossé entre cantons touristiques de montagne et cantons urbains du plateau. Ce fossé, que d'aucuns appellent déjà Alpengraben, par analogie avec le Röstigraben, montre que les citadins ont voulu faire le bonheur des montagnards malgré eux, ce qui est une justification bien connue dans les régimes ...totalitaires.

 

Les citadins ne subiront évidemment pas les conséquences de ce vote et pourront sans frais se donner le beau rôle de prétendument protéger le paysage contre leurs habitants, noble cause en comparaison des médiocres soucis matériels de ces populations alpines qui ne pensent qu'à... vivre et rester chez elles.

 

En attendant le fédéralisme en aura pris un sacré coup. Ce quota arbitraire de 20% n'est-il pas en contradiction avec l'article 75 de la Constitution fédérale qui dit que l'aménagement du territoire incombe aux cantons ? Certes la Confédération en fixe les principes, selon ce même article, mais un quota est-il un principe ou un pur instrument d'autorité, un instrument arbitraire ?

 

Quand on diminue l'offre, inévitablement les prix montent. Les prix des résidences secondaires vont donc monter, pour le plus grand profit de ceux qui les possèdent. Inversement les prix des résidences principales et des terrains vont baisser, au détriment des autochtones. Ce n'est pas le problème de Franz Weber, Monsieur 20%, [dont la photo provient d'ici] qui n'a que des tourments de vieil esthète, imposés par lui, sans vergogne, aux autres.

 

Quand un objet est adopté, tel que celui-là, "à la raclette", comme l'a dit un média, ne faut-il pas en faire une application compréhensive pour les perdants ? Si ce n'est pas le cas - Franz Weber veillera au grain, il l'a promis -, il faut s'attendre à ce que la loi d'application soit contournée. Ainsi jouera-t-on sur les épithètes attribuées aux résidences.

 

Une résidence secondaire en fait pourra, par exemple, être officiellement une résidence principale ou une société immobilière qui permettra de dissimuler la résidence secondaire que Franz Weber ne saura voir... malgré toute son énergie à vouloir faire courber l'échine des principaux intéressés, pour lesquels il n'a pas la moindre sympathie. 

 

Francis Richard

 

L'internaute peut écouter ici sur le site de Radio Silence mon émission sur le même thème

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7 mars 2012 3 07 /03 /mars /2012 21:50

Eveline-et-les-forfaits-fiscaux.jpgHier, par 35 voix, sans opposition et 5 abstentions, le Conseil des Etats a voté le maintien du régime suisse des forfaits fiscaux, en le rendant toutefois beaucoup moins attractif que précédemment. Ce qui a permis de récolter des voix de gauche, ou leur abstention, pour faire passer ce vote décevant.

 

Le terme de forfait fiscal est d'ailleurs erroné, mais il est entré sous ce vocable dans le langage courant. En réalité il convient de préciser qu'il s'agit d'un régime d'imposition basé non pas sur les revenus et la fortune, mais sur la dépense.

 

Ce régime a fait son apparition au XIXe siècle, précisément en 1862, dans le canton de Vaud. C'était un moyen astucieux d'imposer les richissimes Anglais venus passer leurs derniers beaux jours sur la riviera vaudoise en leur otant tout souci de déclaration fiscale dans leur pays d'origine et en leur offrant des conditions fiscales avantageuses.

 

Ce régime a été adopté par la suite dans d'autres cantons en Suisse et dans d'autres pays que la Suisse, tels que la Grande-Bretagne, la Belgique, les Pays-Bas ou l'Autriche. Il est un instrument de la concurrence fiscale qui contribue à rendre les Etats moins gourmands. Ce qui ne peut être qu'une bonne chose, parce qu'ils sont décidément bien insatiables depuis qu'ils sont devenus des Etats-Providence...

 

Aujourd'hui, même si le forfait fiscal risque, en Suisse, d'être bien moins avantageux, donc bien moins attractif, il devrait être encore un bon motif d'évasion fiscale pour tous ceux qui sont riches et qui sont excédés de voir une grande partie du travail de toute une vie, ou leur héritage, confisquer par des Etats mal gérés et perclus de dettes, ou d'être ostracisés dans leur pays tout simplement parce qu'ils sont riches.

 

Tout le monde est gagnant avec ce régime : 

 

- les cantons touristiques qui accueillent ces évadés d'enfers fiscaux et qui perçoivent des impôts qu'ils n'auraient jamais perçus autrement, permettant dans le même temps de diminuer la charge des contribuables autochtones;

 

- les acteurs économiques de ces cantons qui profitent des dépenses faites par les forfaitaires;

 

- et, bien sûr, les forfaitaires eux-mêmes qui sont respectés ici parce qu'ils sont riches, ce qui les change de l'opprobre dont ils font l'objet chez eux.

 

La perspective de l'élection à la présidence française de François Hollande, qui, entre autres, veut introduire une tranche d'imposition à 75%, pour les revenus supérieurs à un million d'euros par an, favorise déjà la tentation du vote avec les pieds d'un certain nombre de riches Français, retraités et même actifs. Ces Français savent fort bien qu'ils sont dans le collimateur de François II du seul fait qu'ils sont riches, donc coupables à ses yeux, comme ils le sont aux yeux de nombre de Français. 

 

Les nombreux Français qui approuvent ce racket fiscal, sont pour la plupart des bénéficiaires de l'Etat-Providence français, et ne comprennent pas que les plus riches d'entre leurs concitoyens ne paient pas davantage d'impôts alors que la crise sévit et frappe les plus pauvres. Ils sont tenaillés par ce péché capital qu'est l'envie et font bien souvent partie de la clientèle électorale du candidat socialiste.

 

Pour bénéficier d'un forfait fiscal en Suisse il faut actuellement :

 

- ne pas avoir résidé en Suisse pendant les 10 ans qui précèdent la prise de résidence et la demande de bénéficier de ce régime;

 

- ne pas percevoir de revenus d'une activité lucrative en Suisse; 

 

- être détenteur d'un passeport de l'Union européenne sans condition d'âge ou être un étranger âgé d'au moins 55 ans.

 

En 2010, les forfaitaires sont au nombre de 5'545 en Suisse, parmi lesquels environ 2'000 Français, et les recettes fiscales que les cantons perçoivent s'élèvent au total à 668 millions de francs, dont 204 sont destinés à la Confédération et 165 aux communes. 

 

Les forfaitaires se trouvent pour la plupart dans les canton de Vaud (1'397), Genève (690), Tessin (776) et Valais (1162) et les recettes fiscales que les cantons en question en retirent, sont respectivement, au total, de 229, 156, 74 et 61 millions de francs.

 

Jusqu'à présent le minimum de revenu imposable annuel pour bénéficier d'un forfait fiscal variait suivant les cantons : par exemple 180'000 francs dans le canton du Valais ou 120'000 francs pour un célibataire (150'000 francs pour un couple) dans le canton de Vaud.

 

Désormais, si le Conseil national suit le vote d'hier du Conseil des Etats, il faudra disposer d'un revenu imposable annuel minimal de 400'000 francs pour bénéficier d'un forfait fiscal pour ce qui concerne l'impôt fédéral direct.

 

La Confédération escompterait voir ses recettes passer de 204 millions à 284 millions, soit 40% d'augmentation ! La ministre des finances, et présidente de la Confédération, Eveline Widmer-Schlumpf, [dont la photo provient d'ici] tablerait même sur 100% d'augmentation ! En admettant que les forfaitaires ne s'envolent pas vers des cieux fiscaux plus cléments...

 

Le forfait fiscal est calculé aujourd'hui sur la base d'une dépense minimale égale à cinq fois le loyer ou la valeur locative du logement occupé ou à deux fois le prix de l'hébergement et de la nourriture si le forfaitaire séjourne à l'hôtel. Ces facteurs passeraient à sept et à trois respectivement si le vote du Conseil des Etats d'hier était confirmé par le Conseil national.

 

Ces nouvelles règles s'appliqueraient aux nouveaux venus, mais également, progressivement, au bout d'une période transitoire de cinq ans, aux actuels forfaitaires, qui seront ravis d'apprendre que la Suisse n'est pas plus sûre que les autres pays en matière fiscale... et que des augmentations rétroactives d'impôts peuvent changer la donne.

 

Pour les plus riches d'entre les bénéficiaires actuels, le nouveau régime, destiné à complaire à la gauche et à contrecarrer une initiative lancée par certains de ses membres, pourrait encore être intéressant. Mais ils pourraient aussi, plus facilement que les autres forfaitaires, aller voir ailleurs si c'est moins coûteux...

 

Cela dit, rien n'est joué et il n'est pas du tout assuré que ce nouveau régime d'imposition sur la dépense passe la rampe du Conseil national, où, pour des raisons diamétralement opposées, le PS et l'UDC pourraient l'empêcher de voir le jour. Ce qui ne m'affligerait pas le moins du monde...

 

Francis Richard 

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5 mars 2012 1 05 /03 /mars /2012 23:00

Parlement-suisse.jpgAujourd'hui le Parlement s'est incliné devant le plus fort, les Etats-Unis, dont on sait, depuis Jean de La Fontaine au moins, que sa loi est toujours la meilleure, sinon la plus morale.

 

En effet le Conseil national, après le Conseil des Etats, a accepté les termes de l'accord de double-imposition imposé par l'adversaire américain sous prétexte de mieux négocier avec lui.

 

Il sera plus facile dorénavant aux autorités américaines, qui sont aux abois, faute de cash, de se procurer des informations sur les clients américains des banques suisses, sans qu'il soit besoin pour elles de les identifier par leur nom ou adresse, dans le cas où les dites banques, ou leurs collaborateurs, se seraient livrés à des activités illégales. Ce sera un bon moyen surtout de ternir la réputation des banques suisses...

 

Cet accord a été voté ce jour au Conseil national [dont la photo provient d'ici] par 110 voix contre 56, essentiellement des UDC, hélas, et 14 abstentions. Il ne sera appliqué, assurent les parlementaires et le Conseil fédéral, que si les autorités américaines acceptent de conclure un accord sur les onze banques suisses qui sont dans leur collimateur ici. Il serait pourtant naïf de croire que Washington abandonnera ces proies pour des ombres. 

 

L'autre jour, dans le 19:30 de RTS1, Myret Zaki, rédactrice en chef adjointe du magazine Bilan, a dit tout haut ce que beaucoup en Suisse pensent trop bas : la fin du secret bancaire pour les clients américains est la défaite helvétique par excellence dans la guerre commerciale que mènent les Etats-Unis contre la Suisse pour lui ravir la première place dans la gestion de fortunes.

 

Il n'y a rien de moral dans ce bras de fer entre la petite Suisse et le géant américain, qui privilégie ses intérêts au détriment de ses idéaux de libertés individuelles. Sa main gauche ignore ce que fait sa main droite. Ne lui parlez pas du Delaware ou du Wyoming, ce n'est évidemment pas le sujet. Sa devise hypocrite est plus que jamais : "Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais".

 

Ce qui, en effet, s'est joué aujourd'hui au Parlement est le commencement de la fin du secret bancaire. Il faut être juste. Le secret bancaire a signé son arrêt de mort lente il y a trois ans déjà quand le Conseil fédéral, pour sauver les intérêts économiques de la plus grande banque du pays, l'UBS, a choisi de s'asseoir sur le droit de tout homme à la défense de sa sphère privée, dont le secret bancaire fait partie.

 

Par glissements successifs les autorités suisses ont accepté de ne plus faire de distinction entre fraude et soustraction fiscales, d'autoriser la livraison par milliers de clients de banques suisses en trahissant la confiance qu'ils avaient placé en elles, d'adopter le modèle liberticide d'accord de double-imposition concocté par l'OCDE, dont la Suisse est certainement membre pour mieux se faire poignarder par elle. Car, c'est bien connu, on n'est jamais trahi que par les siens.

 

L'UE attendait en embuscade l'opportunité de revenir à la charge. Elle vient de lui être donnée par la reculade face aux Etats-Unis. Le commissaire européen à la Fiscalité et à l'Union douanière, à l'Audit et à l'Anti-fraude [sic], le lithuanien Algirdas Semeta, a déconseillé aujourd'hui aux Etats membres de l'UE de conclure des accords séparés avec la Suisse et déclaré que l'Angleterre et l'Allemagne étaient prêtes à revenir sur leurs accords, prévoyant des impôts à la source libératoires, signés avec la Suisse mais non encore ratifiés.

 

Pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? Pourquoi ne pas supprimer le secret bancaire en Suisse même ? On évoquera l'égalité de traitement avec les Américains et les Européens pour justifier sa supression, ce qui ravira les Chefs cantonaux des finances. En application de l'article 47 de la Loi sur les banques, punir la violation du secret bancaire d'une peine privative de liberté, pouvant aller jusqu'à trois ans de prison, ou d'une peine pécuniaire, apparaîtra bientôt comme exorbitant quand trahir ce secret deviendra une obligation pour ce qui concerne des clients étrangers non résidents.

 

Voilà comment pourrait bien être porté une lourde atteinte à la sphère privée dans un pays comme la Suisse qui se prétend toujours son plus ardent défenseur. Encore faudra-t-il au préalable convaincre le peuple suisse d'y renoncer de lui-même. A moins que le Parlement ne l'empêche de s'exprimer sur un objet qui contreviendrait aux conventions internationales adoptées entre-temps...

 

Francis Richard    

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3 mars 2012 6 03 /03 /mars /2012 17:00

Les-Grecs-de-la-Suisse.pngLe Temps a publié deux articles à un jour d'intervalle sur les différences entre Suisse latine et Suisse alémanique. Le jeudi 1er mars 2012 sous la signature de Sylvain Besson, le vendredi 2 mars sous celle de Marie-Hélène Miauton.

 

Sylvain Besson fait écho ici à un article de la Weltwoche, signé Andreas Kunz, basé sur une étude d'universitaires de Lausanne et de Zürich, intitulée : La culture affecte-t-elle le chômage ? - La preuve par le Röstigraben ici. Le Röstigraben est le "fossé linguistique", qui sépare la Suisse alémanique et la Suisse latine.

 

Avec humour, Guy Mettan et Christophe Büchi, dans leur Dictionnaire impertinent de la Suisse, le définissent ainsi :

 

"Gouffre sans fond qui séparerait les Romands des Alémaniques. Comme le monstre du Loch Ness personne ne l'a vu mais tout le monde en parle, surtout les dimanches soirs de votations." 

 

Marie-Hélène Miauton voit dans la Suisse une Europe en miniature ici . Elle se base, quant à elle, sur une étude de l'IDHEAP, l'Institut des hautes études en administration publique, ici.

 

Il est bien des choses qui existent sans que nous ne les ayons jamais vues. Le Röstigraben en fait partie. Les deux études citées le confirment. Et d'autres encore.

 

Sylvain Besson cite celle utilisée par Andreas Kunz, qui - il faut le reconnaître - n'a pas fait dans la dentelle en titrant son article Les Grecs de la Suisse, en parlant des Romands :

  

"78% des Alémaniques répondent oui à la question: «Travailleriez-vous même si vous n’aviez pas besoin d’argent?», alors que les Romands sont 50% à le faire. La durée moyenne du chômage en Suisse alémanique est de 28 semaines, pour 35 semaines en Suisse romande. Autant d’indices d’une «plus forte prévalence de la «culture du loisir» dans les régions latines, par opposition à la culture presque «workaholique» des régions germanophones»"

  

Dans le même registre il est indéniable, tous les chiffres le montrent, qu'il y a plus de chômage dans les cantons romands que dans les cantons alémaniques...

  

Comme pour minimiser ses propos, Andreas Kunz remarque malicieusement :

 

"Nous aimons les Romands. La Suisse serait ennuyeuse sans eux. Mais les chiffres que j’évoque sont réels, notamment les différences observées dans les zones frontalières des régions linguistiques."

 

Andreas Kunz admire le "savoir-vivre" des Romands que la photo de couverture de l'hebdomadaire zurichois est censée représenter : ils seraient peu travailleurs, gros buveurs et dépendants des assurances sociales...

 

Marie-Hélène Miauton remarque que les cantons romands sont plus étatistes et moins démocrates que les cantons alémaniques. Ce qui se voit aussi dans les chiffres :

 

"Par exemple, le nombre de signatures pour lancer une initiative ou un référendum cantonal y est proportionnellement beaucoup plus élevé: 4% de l’électorat à Genève, Neuchâtel et au Jura, plus de 3% dans les cantons de Vaud, Fribourg ou du Tessin, contre seulement 2% à Schaffhouse, Berne ou Saint-Gall et moins de 1% à Zurich, Bâle-Campagne ou en Argovie!"

 

De même la densité des fonctionnaires est-elle bien différente d'un côté ou l'autre du Röstigraben:

"Bien supérieure en Suisse latine, elle a tendance à augmenter encore dans les cantons de Genève et Vaud. En outre, les collaborateurs de l’Etat sont désormais engagés sous contrat de droit privé dans l’immense majorité de la Suisse alémanique (sauf Lucerne, Saint-Gall et la Thurgovie) alors qu’ils restent sous droit public en Romandie (sauf Fribourg)!"

Les dépenses publiques sont plus élevées dans les cantons latins que les cantons alémaniques :

"La moyenne suisse s’établit à 21% [du PIB] alors que Zurich et Soleure sont à 19%, mais Neuchâtel à 27%, le Tessin à 28% et Genève à 32%!"



Marie-Hélène Miauton conclut :



"Tout ceci pour dire que le modèle suisse permet aux mentalités latines et germaniques de se côtoyer au sein d’une confédération qui, tout en harmonisant les règles essentielles de la vie commune, laisse à chacun des Etats son autonomie organisationnelle et sa philosophie politique. L’UE devrait vraiment y réfléchir."



Pour ma part, je conclurai que les Suisses alémaniques, plus sensés, empêchent les Suisses latins de commettre de grosses bêtises et que les latins de Suisse apportent à leurs compatriotes alémaniques cette fantaisie qui leur manque bien souvent.

 

Je conclurai aussi que la démocratie directe, contre-pouvoir face à l'Etat, est un facteur de cohésion helvétique, qui permet de surmonter le Röstigraben, et que la diversité culturelle, maintenue en grande partie grâce au fédéralisme, application helvétique du principe de subsidiarité, est un facteur d'enrichissement pour l'ensemble.



Francis Richard

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28 février 2012 2 28 /02 /février /2012 23:30

Vale-International.jpgLe 6 octobre 1995 un arrêté fédéral est pris, l'arrêté Bonny. Il s'agit de soutenir les régions qui sont confrontées à des difficultés économiques.

 

Ces régions sont appelées technocratiquement "zones économiques en redéploiement". Ce soutien se présente sous la forme d'allègements fiscaux consentis à des entreprises qui y sont créées.

 

Le 1er janvier 2008 la Nouvelle Politique Régionale prend la suite de l'arrêté Bonny. Les régions bénéficiaires changent...et sont moins nombreuses. Ce n'est pas un mal.

 

Le Canton de Vaud a, semble-t-il, fait beaucoup usage de l'arrêté Bonny, de même que le Canton de Neuchâtel. A eux seuls ces deux cantons représentent, d'après un communiqué du Contrôle fédéral des finances du 10 février 2012, "62% du volume d'IFD [impôt fédéral direct] bénéficiant d'allègements en 2008" ici.

 

En tout 60 sociétés sont à l'heure actuelle au bénéfice d'allègements fiscaux au titre de l'arrêté Bonny dans le Canton de Vaud. Les exonérations fiscales pouvant être au maximum de 100% pendant dix ans, avec un état des lieux effectué au bout des cinq premières années. Ainsi 2 sociétés sur ces 60 ne verront pas leurs allègements prolongés.

 

Les exonérations fiscales portent sur l'impôt cantonal et communal direct (ICC) et sur l'impôt fédéral direct (IFD). L'administration cantonale de impôts (ACI) de l'Etat de Vaud et l'administration fédérale des contributions (AFC) de la Confédération sont donc parties prenantes.

 

Mais les intérêts de ces deux administrations fiscales divergent. La Confédération est rien moins que sûre d'être gagnante avec ces exonérations, tandis que le Canton de Vaud dresse un bilan positif de l'application de l'arrêté Bonny

 

Les entreprises bénéficiaires en terre vaudoise auraient en effet généré en moyenne, entre 2006 et 2008, 172 millions de francs d'impôts. En tenant compte de l'augmentation des versements au titre de la péréquation financière intercantonale, basée sur les bénéfices exonérés ou non, le solde resterait positif et se monterait à 90 millions de francs. Sans parler des milliers d'emplois créés...ici.

 

La Confédération reproche à l'Etat de Vaud de ne pas s'assurer suffisamment que les conditions d'octroi de ces exonérations sont bien remplies par les sociétés bénéficiaires. Exemple du groupe brésilien Vale International à l'appui.

 

Depuis 2007, Vale International bénéficie d'allègements fiscaux généreux : 80% sur l'IFD et 100% sur l'ICC, ce pendant dix ans. Allègements consentis par le canton, par la commune de Saint-Prex où se trouve l'entreprise, et par le Seco, Secrétariat d'Etat à l'économie.

 

Seulement les contreparties à ces allègements n'auraient pas été tenues et la décision d'exonération de 80% d'IFD accordée par l'ACI serait contestée par l'AFC, qui voudrait la remener à 60%. C'est du moins ce que 24 Heures révèle le 17 février 2012 sous la plume de Daniel Audétat. Il y aurait même un litige fiscal inédit entre l'AFC et l'ACI ici :

 

"Faute de parvenir à un règlement à l'amiable, la première a déposé un recours qui amènera la seconde devant la Cour administrative du Tribunal cantonal vaudois."

 

Aujourd'hui Daniel Audétat dans 24 heures ici [d'où provient la photo] nous apprend que Vale International a été taxée pour les années 2006 à 2009 ... en décembre 2011 par l'ACI et s'indigne cependant :

 

"Encore quelques jours, et Vale International n’aurait payé aucun impôt sur des bénéfices «rapatriés» en Suisse en 2006 après avoir été réalisés dans le monde entier."

 

Cette indignation est de pure forme. Car cette nouvelle est un démenti à la révélation d'il y a onze jours, même si Daniel Audétat prétend que le litige entre l'AFC et l'ACI demeure...

 

Des opposants, tels la Déclaration de Berne, à la concurrence fiscale entre les cantons, qui est pourtant, avec le frein à l'endettement, une bonne chose pour enrayer la pression fiscale, se sont évidemment saisis de cette affaire pour enfourcher leurs dadas : "le manque à gagner pour le pays d'origine et le coût final pour les contribuables vaudois" ici.

 

On a vu plus haut qu'il n'y avait pas vraiment de coût final pour les contribuables vaudois. Quant au manque à gagner du pays d'origine, il ne tient qu'à ce dernier de ne pas inciter les sociétés nationales à prendre le large et de se montrer moins gourmand pour les retenir. Enfin rien n'empêchait les autres cantons de profiter des dispositions de l'arrêté Bonny, tant qu'il était en vigueur...

 

Cela dit, on ne peut qu'applaudir que l'arrêté Bonny n'ait pas été reconduit, parce qu'il n'y a pas de raison que des entreprises, étrangères ou non, jouissent de privilèges fiscaux aux dépens des autres, même temporairement, quels que soient leur domaine d'activité.

 

On voit les recettes fiscales directes et indirectes, et les créations d'emploi. On ne voit pas les réels manques à gagner pour l'économie entière et les destructions d'emplois induits par ces privilèges, le revers de tous les privilèges, quelles que soient les contreparties incertaines acceptées par les bénéficiaires et négociées par les autorités.

 

Francis Richard 

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24 février 2012 5 24 /02 /février /2012 06:30

Eveline-Widmer-Schlumpf-Le-Temps.jpgL'argent étranger placé dans les banques suisses non seulement n'aura plus d'odeur, mais désormais il sera propre.

 

Le Conseil fédéral en a décidé ainsi pour satisfaire les enfers fiscaux, toujours assoiffés de l'argent frais à vampiriser de leurs évadés.

 

Lors d'une conférence de presse tenue avant-hier 22 février 2012, la présidente de la Confédération et ministre des Finances, Eveline Widmer-Schlumpf, dont la photo provient d'ici a expliqué les grandes lignes de cette décision, dont les détails ne seront connus qu'en septembre prochain. En Suisse il convient de se hâter avec lenteur...pour mieux surprendre.

 

Pour que l'argent placé chez elles soit propre, jusqu'à en être complètement transparent, il faudra que les banques suisses adoptent la fisc attitude et deviennent de redoutables et fins limiers, capables de sonder le contenu des bourses et la provenance de leur contenu.

 

Les banques suisses ne devront en effet pas se contenter de demander à leurs clients de signer une auto-déclaration, selon laquelle ils attesteront qu'ils sont bien en règle avec leurs administrations fiscales respectives. Il faudra encore qu'elles fassent preuve de diligence pour débusquer les fausses auto-déclarations.

 

Le métier de banquier va donc évoluer. Le client étranger deviendra un suspect. Il fera l'objet d'une nette discrimination par rapport aux clients autochtones. Tant il est vrai que l'important dans ce métier c'est l'accueil de l'autre ...et la confiance réciproque.

 

Si on a bien compris le film concocté par le Conseil fédéral, le nouveau scénario de celui-ci comportera deux histoires, qui se dérouleront en parallèle, et réjouira, aux dépens de leurs concitoyens, les vampires des pays endettés jusqu'au cou (grâce à leur mauvaise et obstinée gestion, d'inspiration keynésienne).

 

D'un côté les fortunes des impétrants devront avoir été déclarées à leurs autorités infernales, sinon elles seront repoussées avec dédain. De l'autre les revenus de ces fortunes subiront un prélèvement libératoire à la source, du type de celui figurant dans les accords Rubik conclus provisoirement avec l'Allemagne et la Grande-Bretagne.

 

Ce scénario ressemble à s'y méprendre à un scénario catastrophe dont les voisins européens de la Suisse sont friands pour exorciser les situations mirifiques dans lesquelles ils se trouvent. Destiné à faire plaisir à tout le monde, il fera surtout frémir : le secret bancaire ne sera plus qu'un secret de polichinelle et les vampires seront incités à demander toujours plus pour étancher leur soif.

 

Francis Richard

 

Cet article est reproduit sur le site lesobservateurs.ch   

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23 février 2012 4 23 /02 /février /2012 15:15

Simonetta Sommaruga 24 heuresLa Suisse est membre du GRECO, Groupe d'Etats contre la corruption, créé par le Conseil de l'Europe en 1999, depuis le 1er juillet 2006. Une visite d'experts du GRECO a été effectuée en Suisse du 9 au 13 mai 2011 et a procédé à une évaluation du financement des partis politiques de la Confédération, comme elle l'avait fait auparavant dans 39 des 47 autres Etats membres.

 

Seules, jusqu'à présent, la Suède et la Suisse n'ont pas légiféré en matière de financement des partis politiques.

 

A la demande de Simonetta Sommaruga [dont la photo provient d'ici],conseillère fédérale à la tête du Département de justice et police, un avis de droit a été établi le 10 juin 2011 par l'Office fédéral de la justiceOFJ ici. En conclusion cet avis faisait l'inventaire des questions à se poser en cette matière :

 

- le champ d'application horizontal et vertical de la réglementation

- l'éventuel financement étatique direct

- l'étendue de la transparence

- le plafonnement des dépenses de campagne

- les mécanismes de contrôle

- l'autorité de contrôle indépendante

- la constitutionnalité des mesures proposées

- le caractère plus ou moins contraignant des réglementations internationales

 

L'OFJ considérait donc comme allant de soi qu'il fallait légiférer et ne répondait évidemment pas à la question principale à se poser : est-il bien nécessaire de légiférer ? Ce qui revenait à ne pas se poser cette autre question : la Suisse est-elle un pays moins démocratique que les autres parce qu'elle n'a pas légiféré en la matière ?

 

Le rapport d'évaluation sur le financement des partis politiques suisses établi par le GRECO a été adopté en octobre 2011, lors de sa 52ème réunion plénière, à Strasbourg ici. En conclusion de ce rapport six recommandations ont été faites à la Suisse :

 

- tenue adéquate et complète des comptes pour les partis politiques et les campagnes électorales

- communication des dons reçus d'un certain montant et publication de l'identité des donateurs

- accroissement de la transparence par des tiers

- vérification comptable indépendante des partis politiques et des campagnes électorales

- supervision indépendante du financement des partis politiques et des campagnes électorales

- règles accompagnées de sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives

 

Qui l'EEG, l'Equipe d'évaluation du GRECO, a-t-elle rencontré lors de sa visite en Suisse ?

 

"L’EEG a rencontré des représentants de l’Office fédéral de la Justice, de la Chancellerie fédérale, de la Commission des Institutions politiques du parlement et des cantons du Tessin et de Genève. L’EEG a également rencontré des représentants de partis politiques, le PLR – les Libéraux-Radicaux, le Parti évangélique suisse, le parti socialiste suisse et le Parti démocrate chrétien. Enfin, l’EEG a rencontré des représentants des milieux académiques, de la presse et de Transparency International."

 

C'est-à-dire tous les grands partis à l'exception du premier en nombre de suffrages.

 

Quoiqu'il en soit la Suisse se voit demander fermement par le GRECO de remettre un rapport sur la mise en oeuvre de ses recommandations d'ici le 30 avril 2013...

 

Mardi 21 février 2012 paraît un rapport d'enquête sur les dépenses électorales ici, établi par l''institut de recherches Sotomo de l'Université de Zurich, dirigée par Michael Hermann. Le Temps du 22 février 2012 nous explique sous la plume de Bernard Wuthrich ici que :

 

"Ce rapport a été commandé par Simonetta Sommaruga dans le contexte des élections fédérales de 2011 et des critiques émises par le Groupe d’Etats contre la corruption (Greco)"

 

Que dit ce rapport commandé par Simonetta Sommaruga ici ?

 

- il estime les dépenses politiques à 28 millions de francs avant les élections fédérales de 2003, à 35 millions avant celles de 2007 et à 42 millions avant celles de 2011

 

- l'UDC ("Sans surprise, c'est l'UDC qui se taille la part du lion", note le journaliste du Temps) aurait dépensé 13,3 millions, le PLR 8,5 millions, le PDC 5 millions pour les élections fédérales de 2011

 

-entre 2008 et 2011, l'UDC aurait dépensé, en affiches et en annonces, 21 millions de francs pour les votations, le PLR 11, le PDC 4 et le PS 1

 

- les caissiers externes, les organisations économiques principalement, lors des votations, auraient favorisé le PDC dans 67% des cas, le PLR dans 66% des cas, l'UDC dans 63% des cas et le PS dans 37% des cas

 

- le montant des dépenses n'est pas un gage de succès : par exemple l'UDC a dépensé 95% des 4,5 millions de francs dépensés lors du scrutin, qu'elle a perdu, relatif à son initiative sur la naturalisation par le peuple.

L'article 137 de la Constitution fédérale dit :

"Les partis politiques contribuent à former l'opinion et la volonté populaire."

Quand on met bout à bout tous ces éléments qui vont être discutés au Parlement à la session de printemps, que constate-t-on ?

- que la Suisse est certainement le pays le plus démocratique des 47 pays membres du GRECO

- qu'elle n'a pourtant pas légiféré en matière de financement des partis politiques

- que l'UDC (que le GRECO n'a pas visité en mai 2011) est le parti qui dépense le plus en Suisse, suivi par le PLR et le PDC

Quel est le but de tout cela, l'avis de droit de l'OFJ, le rapport d'évaluation du GRECO et le rapport Sotomo ?

Le DFJP que dirige la conseillère fédérale socialiste Simonetta Sommaruga lève un coin du voile en disant :

"Les inégalités en matière de financement des campagnes sont criantes."

Il semble qu'en fait soient poursuivis officiellement deux buts :

- la transparence

- l'égalité des moyens financiers pour les partis et les campagnes

Officieusement le but poursuivi est de s'en prendre à l'UDC, accessoirement au PLR et au PDC. En ne tenant pas compte d'une donnée essentielle : les partis politiques ne contribuent pas tous seuls à former l'opinion et la volonté populaire. Il y a aussi, et particulièrement, les médias. 

On peut se demander pourquoi une étude n'est pas menée sur la contribution des médias à cette formation de l'opinion et de la volonté populaire et combien cette contribution pèse financièrement au regard des dépenses effectuées par les partis politiques.

A qui profiterait la prétendue transparence ? Aux partis qui ne sont pas diabolisés et qui sont chouchoutés par les médias, singulièrement le PS et les Verts.

La transparence, autrement dit la publication du nom des donateurs, n'est-elle pas un bon moyen de restreindre la liberté de donner, comme la liberté de s'exprimer dans les urnes le serait si les votes n'étaient pas anonymes ?

A qui profiterait l'égalité des moyens ? Aux partis qui, à défaut d'être capables de convaincre les donateurs de les soutenir, reçoivent le soutien large, régulier et indéfectible des médias.

 

En présence de la criante inégalité de traitement des partis politiques par les médias, les demandes de transparence et d'égalité des moyens financiers pour les partis politiques et pour les campagnes ne sont tout juste pas crédibles et semblent bien hypocrites.

 

Francis Richard

 

Cet article est reproduit sur le site lesobservateurs.ch

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17 février 2012 5 17 /02 /février /2012 22:35

Victoria_Curzon_Price.jpgDans une étude publiée aujourd'hui par l'Institut Constant de Rebecque ici, Victoria Curzon-Price montre que le frein à l'endettement helvétique a fait la preuve de ses bienfaits économiques pour la Suisse.

 

Grâce à ce mécanisme, la Suisse s'est en effet retrouvée moins endettée que les autres pays développés et en meilleure santé.

 

Le 2 décembre 2001 le peuple suisse plébiscite par 85 % des voix une modification ancrant dans la Constitution fédérale le principe suivant, figurant à l'alinéa 1 de l'article 126 :

 

"La Confédération équilibre à terme ses dépenses et ses recettes."

 

Les alinéas suivants du même article précisent ce qu'il faut entendre par ce principe :

 

"2 Le plafond des dépenses totales devant être approuvées dans le budget est fixé en fonction des recettes estimées, compte tenu de la situation conjoncturelle.

3 Des besoins financiers exceptionnels peuvent justifier un relèvement approprié du plafond des dépenses cité à l’al. 2. L’Assemblée fédérale décide d’un tel relèvement conformément à l’art. 159, al. 3, let. c.

4 Si les dépenses totales figurant dans le compte d’Etat dépassent le plafond fixé conformément aux al. 2 ou 3, les dépenses supplémentaires seront compensées les années suivantes."



Pourquoi le frein à l'endettement a-t-il été voté à l'époque ? Depuis le début des années 1990, nous dit Victoria Curzon-Price [dont la photo provient d'ici] :



"La dette publique avait en effet quadruplé en dix ans et on pouvait prévoir qu'il ne faudrait pas plus de dix années à ce rythme pour atteindre les 100% du PIB - vers 2010 !"



Cette disposition, destinée à freiner l'endettement, et non pas à le réduire, s'est en réalité traduite par une réduction de celui-ci depuis 2006 jusqu'à aujourd'hui. Cette réduction s'est opérée par une réduction des dépenses publiques et non pas par une augmentation des recettes fiscales.



Certes la tentation de relancer étatiquement l'économie n'a pas épargné les dirigeants politiques suisses :



"En 2008-2009, arguant la mauvaise conjoncture économique, le Parlement fédéral a approuvé deux trains de « mesures de stabilisation conjoncturelle » pour un montant de quelque deux milliards de francs ; et en 2011 il a suspendu le programme de consolidation budgétaire… à cause de son succès."

 

Mais cela n'a pas empêché l'endettement public helvétique de continuer à diminuer...grâce aux excédents budgétaires, résultats de la contrainte que la Suisse s'était imposée à elle-même de freiner son endettement.

 

Selon la théorie keynésienne, faute de relance par la dette, la Suisse aurait pourtant dû entrer en récession et les pays, qui ont procédé à des relances par la dette - et se sont en définitive surtout endettés -, voir leurs économies relancées...

 

Or c'est exactement l'inverse qui s'est produit, donnant raison à la théorie de l'école autrichienne selon laquelle, au contraire, une relance par la dette prolonge et intensifie inutilement une crise économique.

 

Les prévisionnistes suisses, n'étant pas moins keynésiens que ceux des autres pays développés, ont sous-estimés les recettes publiques et surestimés les dépenses publiques induites par ce mécanisme. Ils n'ont pu que constater que l'économie suisse se portait bien mieux qu'ils ne l'avaient prévu.

 

Pourquoi John Maynard Keynes a-t-il tort, Ludwig von Mises et Friedrich Hayek ont-ils raison ?

 

"L’expérience suisse montre qu’il n’est pas nécessaire de viser de grandes coupes dans les budgets. En réalité, le Conseil fédéral s’y est attaqué assez mollement, puisque son mandat était de stabiliser la dette publique et non pas de la réduire. Mais l’économie « réelle » a apprécié le changement de cap et s’est mise à croître de façon inattendue."

L'économie a été libérée marginalement, mais cette libération a suffi... Le succès inattendu et étonnant pour des keynésiens a été au rendez-vous :

"La raison en est d’une part l’impossibilité politique d’augmenter les impôts en Suisse et d’autre part, un profond respect pour l’Etat de droit et la Constitution, ce qui a pesé davantage dans les décisions en haut lieu que la doctrine keynésienne ambiante. Avec comme résultat un véritable effort de stabilisation des dépenses publiques. C’est ici que réside l’originalité du cas de la Suisse. Sans le droit de référendum, le frein à l’endettement aurait probablement pris la route d’une augmentation des impôts."

La Suisse n'échappera cependant pas "à la crise qui engouffre le continent européen". Il ne faut surtout pas qu'elle succombe à la tentation de "soutenir" son économie. Il faut au contraire qu'elle laisse les marchés "respirer"... et n'abandonne surtout pas son frein à l'endettement salvateur.

Francis Richard

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16 février 2012 4 16 /02 /février /2012 22:00

Gripen.jpgSoyons clair : je n'y connais rien en matière d'avions de combat et me garderai donc bien de défendre tel avion plutôt que tel autre. Aussi n'est-ce pas mon propos.

 

Ce qui m'intéresse, c'est le traitement par les médias de l'affaire du choix des futurs avions de combat suisses, destinés à remplacer les actuels Tiger.

 

Dimanche dernier, 12 février 2012, Le Matin publie deux rapports confidentiels ici [d'où provient la photo], signés Markus Gygax, le chef des Forces aériennes suisses. Ces rapports condamnent sans appel le Gripen, pourtant choisi par le Conseil fédéral le 30 novembre 2011. Il est moins performant que ses concurrents, l'Eurofighter et le Rafale. Il n'est même pas bon pour accomplir les missions les plus simples...

 

La machine médiatique à broyer un adversaire politique est en marche. La manipulation est en route. Le Vice-Président de l'UDC, Yvan Perrin lui-même, tombe dans le panneau et se dit abasourdi par ces révélations. Le PLR, Parti libéral-radical, somme le ministre de la Défense, Ueli Maurer, le seul représentant de l'UDC au gouvernement de s'expliquer. La Commission de politique de sécurité du Conseil des Etats fait de même.

 

Lundi 13 février 2012, Silvia Steidle, porte-parole d'Ueli Maurer, déclare que ce dernier n'a pas eu connaissance des rapports publiés dans la presse dominicale et que le ministre s'est basé, pour proposer le Gripen au Conseil fédéral, sur un rapport d'évaluation d'Armasuisse qui concluait que cet avion de combat était suffisant pour les missions demandées.

 

Mardi 14 février 2012, flanqué de Markus Gygax, le signataire des deux rapports confidentiels, et du chef de l'Armée, André Blattmann, Ueli Maurer tient une conférence de presse. Lorsqu'il a fait répondre qu'il ne connaissait pas les rapports publiés dimanche, il pensait qu'il s'agissait de nouveaux rapports. Or ces rapports volés, partiels, étaient rien moins que nouveaux : ils évaluaient la version précédente du Gripen...Markus Gygax a confirmé que le nouveau modèle remplissait les exigences formulées.

 

A ce stade on ne peut que constater la légèreté avec laquelle les médias se sont emballés au sujet de cette affaire. Ne serait-ce pas tout simplement une campagne médiatique de déstabilisation visant le seul ministre UDC du gouvernement, le seul représentant du diable en quelque sorte ? 

 

Cet acharnement médiatique contre Ueli Maurer, complètement émotionnel et irrationnel, de même que le suivisme impulsif d'hommes politiques, embrayant au quart de tour, laisse pantois, quelle que soit l'opinion que l'on puisse avoir au sujet de l'UDC.      

 

Francis Richard

 

Cet article est reproduit sur le site lesobservateurs.ch   

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13 février 2012 1 13 /02 /février /2012 21:30

Chalet-de-montagne.jpgL'initiative sur les résidences secondaires soumise à votation le 11 mars 2012 est typiquement étatiste. 

 

Cette initiative intitulée "Pour en finir avec les constructions de résidences secondaires envahissantes" a été lancée le 20 juin 2006 par la Fondation Franz Weber et Helvetia Nostra ici . 

  

108'497 signatures valables ont été déposées le 18 décembre 2007, soit deux jours avant le délai imparti  pour aboutir. Rejetée par le Conseil fédéral et le Parlement, elle est soutenue par les socialistes, les verts et le parti évangélique.

  

Si cette initiative est adoptée par le peuple le 11 mars prochain, un nouvel article, 75b, de la Constitution fédérale, venant après l'article 75, qui traite de l'aménagement du territoire, et l'article 75a, qui traite de la mensuration, comportera deux alinéas ici :

  

"1 Les résidences secondaires constituent au maximum 20 pour cent du parc des logements et de la surface brute au sol habitable de chaque commune.

2 La loi oblige les communes à publier chaque année leur plan de quotas de résidences principales et l'état détaillé de son exécution."



Sous le prétexte utopiste d'empêcher le bétonnage et de préserver les paysages, il s'agira donc d'imposer un quota unique, 20%, de résidences secondaires à tout le territoire national, sans considération des particularités cantonales ni communales, sans même que les cantons ni les communes ne puissent décider autrement, ce qui est contraire au principe de subsidiarité sur lequel le fédéralisme helvétique repose [la photo provient d'ici]

  

Il s'agira donc aussi d'imposer aux communes un contrôle inquisitorial de l'habitat par la Confédération, en lui conférant un rôle exorbitant en matière d'aménagement du territoire, qui incombe pourtant aux cantons selon l'article 75 de la Constitution.

 

Ces mesures étatistes seront évidemment préjudiciables aux régions touristiques, où les quotas sont, pour la plupart d'entre elles, déjà atteints, et y provoqueront hausses des prix des terrains et des constructions, puisque la demande y sera dès lors supérieure à l'offre, et pertes de places de travail, puisque la clientèle sera dissuadée de s'y établir et ira voir ailleurs.

 

Ces mesures étatistes empêcheront les propriétaires de résidences principales d'acquérir des résidences secondaires dans les lieux de leur choix, notamment dans leurs lieux d'origine, et favoriseront la construction dans des lieux où les quotas ne seront pas encore atteints. C'est l'effet vicieux habituel de l'instauration de quotas. 

 

Cette propension à unifier tout est typiquement étatiste. Il s'agit de refuser les différences, de vouloir tout égaliser et tout régenter, de ne pas donner le choix, bref d'imposer par voie d'autorité et de ne laisser aucune liberté. C'est ce que j'appelle le syndrome d'unicité.

 

Ce syndrome d'unicité est présent dans d'autres initiatives, telle que celle sur le prix unique du livre qui voudrait empêcher la disparition de librairies traditionnelles et permettre l'accès de tous au livre. J'ai montré ici que c'était illusoire. Et Dieu sait que je ne suis pas hostile au livre puisque j'en achète entre 150 et 200 par an...

 

Ce syndrome d'unicité se retrouve dans l'initiative en cours de récolte de signatures "Pour une caisse publique d'assurance-maladie" ici, lancée le 1er février 2011. La caisse publique en question, si l'initiative aboutissait et qu'elle était adoptée par le peuple, serait une institution nationale unique de droit public. C'est tellement plus simple, croit-on, qu'il n'y ait plus qu'une seule caisse pour réduire les frais. En France on voit le résultat...

 

Dans l'esprit de ces utopistes, unique ne signifie pas exceptionnel ou incomparable, mais obligatoire, sans autre possibilité donnée à ceux à qui l'objet est imposé. Unique est pour eux la panacée, la solution simple, qui résout tout ce qui est complexe et qui permet de ne pas se poser de questions, ne laissant aucune échappatoire. Dans la même acception du terme, souvenons-nous qu'il y a le parti unique... 



N'oublions pas non plus, pour notre gouverne, ce qu'écrivait Antoine Houdar de la Motte il y a quelque trois siècles :



 " C’est un grand agrément que la diversité.
Nous sommes bien comme nous sommes.
Donnez le même esprit aux hommes,
Vous ôtez tout le sel de la société.
L’ennui naquit un jour de l’uniformité."



Il se pourrait bien en effet que nos descendants, lisant l'histoire de notre époque, disent à leur tour, en l'imitant :



" Les ennuis naquirent un jour de l'unicité."



Francis Richard

 

L'internaute peut écouter ici sur le site de Radio Silence mon émission sur le même thème.

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11 février 2012 6 11 /02 /février /2012 11:45

UBS 20 MinutesOnze banques établies en Suisse sont dans le collimateur de l'administration fiscale américaine depuis des mois : le Credit Suisse, la banque Julius Baer, la banque Wegelin, la Banque cantonale de Zurich (ZKB), la Banque cantonale de Bâle (BKB), la Neue Zürcher Bank, la filiale suisse de HSBC, la banque liechtensteinoise LLB et les banques israéliennes Leumi, Hapoalim et Mizrahi.

 

La banque Wegelin a été la première fin janvier à être poursuivie en tant que telle. Ses associés, comme je l'ai raconté ici, ont préféré assumer seuls leurs responsabilités, en soustrayant aux poursuites leurs collaborateurs et leurs clients qui n'ont aucun rapport avec les Etats-Unis, et en donnant, par là-même, l'exemple de ce qu'il faut faire pour épargner les conséquences de leurs actes à ceux qui n'y sont pour rien.

 

Que reproche-t-on à ces onze banques ? D'avoir repris sans vergogne les clients américains d'UBS qui persistaient à vouloir échapper aux foudres de la justice américaine. Comment cette dernière a-t-elle eu connaissance des noms des banques où s'étaient réfugiés ces ressortissants américains fuyant l'UBS ? Par l'UBS elle-même [la photo provient d'ici] qui, après avoir livré les noms de 4'000 de ses clients et payé une amende de 780 millions de dollars, a été contrainte par la FINMA, le gendarme suisse des marchés financiers, de livrer ces informations dans le cadre de l'aide administrative entre la Suisse et les Etats-Unis...

 

Pour justifier cette inquisition fiscale américaine, on parle de moralité. Ce ne serait pas moral de se livrer à de la soustraction fiscale - le terme consacré en Suisse pour l'évasion fiscale - tandis que tant de bons et loyaux citoyens déclarent et paient leurs impôts, paient donc à la place des évadés du fisc, paient donc davantage qu'ils ne devraient si tout le monde était soumis à la même pression fiscale.

 

Ce raisonnement tiendrait si les Etats d'où l'on s'évade, quand on peut, en l'occurrence les Etats-Unis, remplissaient uniquement leurs fonctions régaliennes de justice et de sécurité intérieure et extérieure. Or ce n'est évidemment pas le cas. Ils dépensent sans compter pour remplir des tâches qu'ils se sont attribués. Cela leur permet de se donner de l'importance et de faire de la redistribution sociale, rebaptisée, de manière inappropriée, justice sociale. En réalité cela permet aux politiciens de se constituer une clientèle électorale et de faire perdurer ce système lucratif, pour eux et leurs protégés.   

 

Ces Etats-Providence dépensent tellement sans compter qu'ils sont bouffis de dettes et accumulent les déficits. Pour compenser en partie cette mauvaise gestion des fonds publics et dissimuler leurs erreurs économiques et politiques, ils augmentent les impôts de manière toujours plus inconsidérée - un vol béni par la loi - et s'en prennent plus particulièrement aux plus riches de leurs concitoyens. Ils deviennent ainsi, de plus en plus, des enfers fiscaux, où la sphère privée est réduite à la portion congrue.

 

Pour que rien n'échappe à sa ponction, l'administration fiscale de ces Etats doit en effet pouvoir tout savoir de vous, dans le moindre détail. Elle doit pouvoir connaître toutes vos dépenses, tous vos revenus, tous les éléments de votre fortune, si tant est que vous en ayez une, et s'assurer que vous ne lui cachez absolument rien qui ne puisse être imposé d'une manière ou d'une autre. Vous ne devez avoir aucun secret pour elle, a fortiori bancaire. Vous êtes de plus en plus en liberté surveillée.

 

Si vous avez par vos activités rejoint le club des plus riches, vous êtes l'objet d'une sollicitude fiscale que vous ne pensiez pas mériter. Alors vous cherchez des moyens de ne plus voir confisquer une grande part des fruits de vos activités, justes récompenses de votre travail et de votre créativité. Vous cherchez à vous évader de cette prison, plus ou moins douce. Vous avez tort, ou vous n'avez rien compris.

 

L'argent que vous avez gagné ne vous appartient pas. Il est propriété de l'Etat qui ne vous laisse que ce qu'il veut bien vous laisser après vous avoir assuré de services que vous n'avez pas demandés et dont, pour la plupart, d'ailleurs, vous ne profitez pas, puisqu'ils sont réservés aux protégés dont vous ne faites évidemment pas partie.

 

Aux Etats-Unis, comme dans d'autres pays, la main droite de l'Etat ignore volontairement ce que fait sa main gauche. La main droite américaine ignore, par exemple, ce que fait sa main sinistre en permettant au Delaware d'être le refuge non seulement d'évadés des fiscs latino-américains, mais la grande blanchisserie de criminels en tout genre en provenance d'Amérique Centrale et du Sud.

 

Les onze banques, dans le collimateur des Etats-Unis, s'en tireront comme l'UBS au terme d'une négociation entre Etats. Elles céderont en fait au chantage des Etats-Unis qui peuvent, via la Federal Reserve, les faire mourir en leur interdisant toutes activités en dollars : rien que pour cette raison il serait bon et moral que l'hégémonie ébranlée du dollar se termine enfin...

 

Les onze banques, tôt ou tard, paieront donc des amendes et livreront les noms de leurs clients américains. Un moment de honte étant vite passé, bientôt on ne parlera plus de cette ignominie, qui consiste à trahir ceux qui vous ont fait confiance et, comme Judas, à les livrer aux autorités.

 

Le secret bancaire, que l'on ne défend que quand il est violé au détriment d'un homme du sérail public qui a fauté, ne sera plus qu'un souvenir. Il faut bien vivre... et les banques suisses ont du savoir-faire, à défaut d'être en mesure de se conformer à leurs principes, dont l'infraction était naguère punissable.

 

L'Hebdo de cette semaine ici fait partie de ces résignés à la disparition du secret bancaire :

 

"L'affaire des banques prises dans le collimateur de la justice américaine n'est qu'un début. La Suisse devra aussi céder à l'Union européenne et aux pays émergents."

 

Même si l'Union européenne et les pays émergents ne pratiquent pas encore l'extraterritorialité en matière fiscale comme les Etats-Unis...

 

Un monde libre ne peut que reposer sur les droits de propriété et la protection de la sphère privée qui en découle. Le secret bancaire est un élément de cette sphère privée, auquel les Suisses sont majoritairement attachés. Avec sa disparition programmée par des Etats à l'esprit et à l'action totalitaires, le monde sera moins libre et c'est bien regrettable. Cela ne présage rien de bon.

 

Les clients étrangers des banques suisses, s'ils ne sont pas tentés de transférer leurs avoirs vers des cieux plus paradisiaques, devront donc vivre sans secret bancaire, c'est-à-dire moins bien, sous surveillance, transparents, exposés tout nus à leurs pays d'origine.

 

Puissent les clients fédérés, et résidents, des banques suisses, toujours bénéficier chez elles de la protection de leur intimité et de leur dignité à laquelle ils ont droit, jusqu'à présent ! 

 

Francis Richard

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  • Francis Richard
  • De formation scientifique (EPFL), économique et financière (Paris IX Dauphine), j'ai travaillé dans l'industrie, le conseil aux entreprises et les ressources humaines, et m'intéresse aux arts et lettres.
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